C'est un fait, la musique est un art. Et comme tous les arts, sa création repose sur une envie, sur un fantasme. C'est un peu ce que l'on se dit lorsque l'on découvre Memento Mori, premier album de la jeune formation toulousaine Aephaenemer. Un fantasme des plus pervers qui consisterait à imaginer le résultat d'une énorme orgie entre Dimmu Borgir, In Flames, Children of Bodom et Epica. Pervers mais également salutaire, car en dépit de quelques maladresses et d'un certain manque d'inspiration, ce Memento Mori s'affiche comme une œuvre démesurément burnée, jouissive et particulièrement catchy.
Formé en 2013, c'est en 2014 qu' Aephanemer, le jeune groupe en provenance de la ville rose, sort un premier EP, Know Thyself. Deux ans plus tard, le quartet passe aux choses sérieuses avec un premier disque intitulé Memento Mori. Présentée sur le papier comme du death mélodique à chanteuse, la véritable identité d'Aephanemer s'avère bien plus développée que cela. Aux premiers abords, on est évidemment tenté de comparer le groupe à Arch Enemy, mais cela serait une erreur monumentale car 1) C'est faux, 2) Les amateurs du combo suédois seraient totalement dégoûtés et 3) Cela ne serait pas rendre service aux Toulousains.
Aephanemer aime brouiller les pistes. Lorsque l'on regarde la pochette pour la première fois, on est bien plus tenté de penser que l'on est face à du Blue Bills ou encore du Spiritual Beggars qu'à du Dark Tranquillity. Couleurs chatoyantes, ambiance sous-marine, gros soleil... Cela sent plus les « herbes » que la testostérone.
Et pourtant dès l'écoute de "Unstoppable", on réalise que l'on est pas en train d'élever des chèvres sur le plateau du Larzac mais bien sur l'immense champ d'une bataille médiévale. « Épique » est le terme qui définit peut-être le mieux cette musique puisant à grandes louches dans ce que le metal offre de plus mélodique/symphonique : In Flames, Wintersun, Amon Amarth, Nightwish, Children of Bodom, tout le monde y passe et le résultat s'avère vraiment convaincant.
Ce côté « catchy » découle essentiellement des très bons riffs et les nombreux soli de Martin Hammiche, jeune homme on ne peut plus talentueux qui s'exprime très souvent aux travers des 53 minutes de musique proposées. Tellement souvent qu'on en oublierait presque les growls puissants de la chanteuse Marion Bascoule (qui assure également la guitare rythmique). Et cela serait bien dommage étant donné que la demoiselle montre un coffre franchement impressionnant non sans rappeler inéluctablement celui d'une certaine Angela Gossow. Marions Bascoule s'essaye également au chant clair sur quelques morceaux comme avec "The Call of the Wild" (qui devrait faire plaisir aux fans d'Epica) et la très festive "Memento Mori".
Outre les divers groupes cités plus haut, on a envie de se dire que les influences proviennent également d’œuvres vidéo-ludiques, plus particulièrement la série des Castlevania et plus précisément la bande originale (ou OST, pour les puristes) de l'épisode Symphony of the Night. Un constat peut-être anodin mais qui mérite d'être souligné pour les amateurs de la série.
Assurée par Anthony Delmas et Mickaël Bonnevialle, la rythmique basse/batterie est malheureusement un peu trop noyée sous les guitares et les samples. Voilà qui, pour le coup, est bien dommage, car une batterie et une basse mieux misent en avant auraient apporté du groove et automatiquement amplifié cette sensation de « puissance » et cet aspect épique à souhait présents tout au long des dix pistes. Autre petit défaut : un certain manque de cohérence dans l'écriture. Le meilleur exemple est peut-être la troisième compo, "Hellebor". Au bout de presque quatre minutes, la musique s'arrête nette pour repartir sur un nouveau sample, curieux. Un constat qui revient de façon récurrente et l'on se retrouve avec des morceaux dans l'ensemble très longs (trois font moins de cinq minutes). Enfin, si le groupe impressionne par sa technique il faut admettre que l'ensemble a déjà été entendu à plusieurs reprises et très peu d'originalité est proposée ici.
Mais ces trois remarques misent à part, il n'y a pas lieu de s'alarmer. Il faut au contraire saluer le fort appétit de la formation et sa musique très percutante qui comblera les amateurs de compositions épiques, les amoureux de riffs ultra catchy et les rêveurs en herbe. Memento Mori est un album forgé avec plaisir dans le plaisir et qui fait plaisir, servi par des musiciens talentueux qui n'ont plus qu'à rectifier quelques tirs comme proposer des compositions plus courtes, plus carrées mais tout aussi efficaces et percutantes. Un bon premier album, en somme.
7,5/10