« En fait ton truc, on dirait un croisement entre Avril Lavigne, du punk rock et du metal alternatif. Sauf que c'est encore moins bien ».
Réaction primaire d'une auditrice moyenne face à ma tentative de la convaincre que ce retour des finlandais de Lullacry était bon. Oui quand même, ils avaient disparus de la circulation, on entendait plus parler d'eux, ils semblaient morts pour tous … et bien non, ils sont toujours là et ne comptent pas vous laisser tranquille. 7 ans après leur 4ème méfait, ils remettent le couvert avec Where Angels Fear et sa pochette plus laide tu meurs (ça on pouvait s'en douter avant même d'y jeter un coup d’œil, c'est une constante chez eux). Donc comme dit plus haut, oui, on tente de persuader son auditoire au début, après tout, après tant d'années loin des projecteurs, ça ne pouvait être que bon, ce retour (comme celui de Running Wild… oui bon un peu d'ironie ne fait de mal à personne). Et en fait, l'album n'avait même pas encore été ingéré par votre chroniqueur préféré (/modestie) au moment où ma victime fut choisie (tu te reconnaîtras, Lisa). Alors comme il faut faire une chronique, dresser un portrait élogieux, assassin ou nuancé de nos sympathiques et déterminés finlandais, il fallait se lancer. Patatras …
Une écoute, et ce fut la déconvenue. Mais un chroniqueur, dans sa lourde tâche, son combat pour différencier le bon grain de l'ivraie, se doit d'y aller avec recul, objectivité, garder la tête froide et trouver des points positifs/négatifs, pour conseiller, guider, bref, seconde réaction :
« Ker-Ces Amaurea dit
C'est quoi ce mixage à la con et cette voix niaise se voulant couillue
mais se voulant uniquement
nasale au possible
Pardon mon cher, mais je préfère écouter DSO
Alexis dit
Heu ... c'est ce que je dois chroniquer ... t'es en train d'écouter le morceau le plus inspiré de l'album, là. »
Oui, vous lisez toujours bien la chronique de Where Angels Fear du groupe Lullacry en provenance de Finlande.
Il faut donc se rendre compte d'une chose, et ce, même après une bonne dizaine d'écoutes : cet album n'est pas bon. Bon, ça reste un opus tout à fait classique dans le genre, c'est à dire avec une guitare qui reste quand même plutôt avantagée et au premier plan, des riffs qui se veulent percutants et puissants, sans pour autant être compliqués, le genre qui aime bien rentrer en tête dès une écoute, une seule, pour ensuite se faire oublier. On tape donc dans quelque chose de plutôt facile, stylistiquement parlant, d'ailleurs, on ne peut pas dire que ce brûlot soit très ambitieux car ne cherchant en rien à se démarquer des poncifs du genre, répétant les mêmes clichés déjà employés dans cette veine neo-goth « pouf » (comme on dit vulgairement) à chanteuse qui se remplit à chaque fois de plus en plus de groupes sans réelle inspiration, qui soit juste là pour meubler le vide, et participer à vos soirées dîner de con dans la catégorie du groupe le plus cliché de la circulation. Donc, imaginez le tableau : une formation à l'originalité inexistante (ce qui n'est pas forcément un défaut, précisons-le), à la personnalité tout aussi absente (là ça devient plus embêtant), et à la pauvreté abyssale, se contentant de répéter des airs, des structures, des schémas déjà vus, revus, encore revus. En clair, ça ne part pas bien. Mais bon, ce qui est aussi typique dans le genre, c'est de se munir d'une bonne grosse production très claire, idéale pour le format radiophonique. Échec ici, là où même The Murder of My Sweet (on va bientôt en reparler tiens, mon bistouri est à côté de moi) parvenait à donner un peu d'effet de puissance, eux, se vautrent.
Le mixage est bordélique. Oui, vous lisez bien, et vous avez sûrement lu le commentaire ci-dessus de cette charmante jeune femme, mais c'est qu'elle s'y connaît, et l'auditeur moyen ne se laissera pas avoir lui non plus sur une production plaçant le chant en avant de manière outrageuse pour camoufler son manque de puissance (car quand elle est criarde, elle l'est à fond, la jeune femme !), délaissant des guitares qui, elles, sont au premier plan jusqu'à l'arrivée de la voix. On se retrouve donc avec une production en carton et une batterie qui manque cruellement d'ampleur, et ça fait mal d'entendre quelque chose pareil. Avec un son plus supportable, la vacuité du propos aurait pu être un peu mieux camouflée, mais non, aucun moyen d'échapper à la pauvreté de l'ensemble, à cette médiocrité qui vous suit partout, pendant 11 morceaux, qui, eux, vont de l'acceptable (au mieux) à l'insupportable (le plus fréquent).
Car ce Where Angels Fear, vous risquez de le détester. Dans son mariage peu inventif et casse-pied de punk rock, metal alternatif aux mélodies faciles mais non inspirées et son côté adolescent omniprésent (les paroles, quand on se tue à dire que l'écriture c'est important …), le fait de se retrouver face à une formation qui veut se la jouer mutin tout en alléchant les fans d'Evanescence exaspère. Pour ne rien aider, il semblerait que ce charmant combo se soit dit que si jamais on était pas assez intelligents pour ne pas comprendre la structure de la première piste, ils pourraient la décliner à l'infini. Donc, vous vous retrouverez dans des morceaux peu adroits, à l'inventivité sur laquelle on peut s'asseoir, dans un registre plus convenu tu meurs, et des répétitions à tout va. Donc si l'impression d'écouter le même morceau du début à la fin vous prend, c'est tout à fait normal, tant on pense que c'est l'effet recherché par Lullacry. Si ce n'est pas le cas, la copie est à revoir. Et elle est à revoir de toute façon, car en alignant les mélodies bateaux mais aux refrains qui tombent comme des soufflés qu'on laisse trop longtemps dehors, ils se perdent et nous perdent en cours de route, l'ennui étant une compagnie forcément peu désirée. Prenez « Antidote to You » ou « Thousand Suns », par exemple. Une banalité incroyable, une mélodie qui ne monte et ne prendra jamais aux tripes, sur des riffs pseudo-méchants, mais à la faiblesse consternante. Et c'est à peu près ça tout le temps.
Et ce n'est pas la faiblesse de la composition qui sera le seul élément déclencheur d'irritation. Car Tanja Lainio, de sa voix pas toujours juste et se donnant des impressions de puissance, cher auditeur, tu vas détester cette chanteuse, en faire ta pire ennemie, souhaiter qu'elle cesse de te hurler dans les oreilles pour combler des faiblesses techniques encore trop flagrantes (car se prendre pour Courtney Love c'est lourd). Sur « Bad Blood », on se demandera bien pourquoi elle force autant alors qu'un ton plus naturel lui sied beaucoup mieux. Et c'est un exemple qu'elle s'évertuera à répéter, car ce schéma, il est collé à peu près partout. Bon, évidemment, pas besoin de parler des chœurs qui accompagnent cette chanson, on peut en retrouver des identiques chez Avril Lavigne (le timbre de la chanteuse n'en est pas si loin d'ailleurs), enfin, là n'est pas le problème si ce n'est que ça renforce encore un peu plus l'aspect cliché et adolescent du quintet. Elle parvient pourtant à emporter l'adhésion sur les ballades plus calmes, comme « Stay », où, miracle, l'émotion est réellement présente, faisant de cette piste l'une des tolérables de Where Angels Fear.
Car bien sûr, il y a quelques petites choses à sauver là-dedans, sinon un « c'est mauvais » en guise d'introduction aurait suffit à torcher cette chronique (et à m'éviter de perdre du temps). La ballade « Stay » est agréable, car même si Tanja semble parfois à la limite de la justesse dessus, elle est touchante, et sincère, et cette légère guitare acoustique donne son petit effet, son charme, mine de rien. Le fait qu'une ballade se targue d'être un bon morceau dans un océan de médiocrité, en général, n'est quand même pas bon signe. On retiendra peut-être « I Am » qui, malgré ses paroles au ridicule prononcé (le refrain est à se taper la tête contre les murs tellement ça en devient grotesque), possède une mélodie au feeling rock plus intelligent, quelque chose qui marche un peu plus, et même si la frontwoman veut encore une fois faire un peu trop de forcing parfois (voir commentaire auditrice n°2 au début dans l'introduction), le refrain se retient facilement, beaucoup moins poussif. Même si la piste n'est pas parfaite (les guitares qui veulent absolument donner un effet de puissance qu'elles n'arrivent pas forcément à atteindre), ça fait du bien à entendre après tout un début lamentable. Et puis l'éponyme « Where Angels Fear » sort un peu de la routine, avec une mélodie plus sombre, un refrain où Tanja semble un peu plus à l'aise et où la mélodie de guitare est intéressante. Plutôt que de calquer les morceaux de cet opus sur l’infamie « Antidote to You », on aurait préféré que ce soit sur un schéma comme celui-ci. Mais on ne peut pas tout avoir non plus, le génie frappera peut-être la formation une prochaine fois.
Donc au final, qu'est-ce que l'on peut dire ? Que l'on aimerait vraiment trouver de bonnes choses dans ce brûlot de Lullacry, leur tout nouveau bébé en 7 ans d'absence. Seulement, une inspiration faible, mêlée à des répétitions et automatismes systématiques et mauvais, un chant très souvent irritant, une production peu avantageuse et une personnalité inexistante ne seront pas des points qui aideront à accorder un peu plus de sympathie pour ce quintet, qui, décidément, doit vraiment se remettre au travail s'il espère se remettre à niveau. Et ils peuvent se réjouir au moins d'une chose : ce ne sera pas difficile pour eux de faire pire que Where Angels Fear. Tout est dit.
Allez encore quelques extraits en conclusion car vous adorez ça :
« Gloomy San dit
J'écoute du Lullacry et c'est vraiment nul! Tu connais ?
Alexis dit
Oui, malheureusement. »
« Ju de Melon dit
Ca va, t'as pas trop souffert à faire la chro ? *mode sadique on*
Alexis dit
La prochaine fois que tu me files encore une promo de ce calibre, j'vais me pendre
Ju de Melon dit
Rappelle-toi que t'as le The Murder of My Sweet bientôt...
Alexis dit
... »