"On a toujours été fier de ce qu'on a fait !
Peut être parce qu’on a toujours fait de notre mieux à l’instant donné.
On était toujours enthousiaste de ce qu’on avait fait à la fin d’un enregistrement. On a toujours essayé de créer notre musique préférée…"
Enslaved fête ses 25 ans de carrière cette année et en profite pour faire une tournée afin de fêter dignement l’évènement. C’est donc dans un Divan du Monde qui commence à se remplir que l’interview doit se dérouler, mais comment faire pour ne pas entendre la musique des premières parties ? En rejoignant le chanteur/guitariste accompagné de Jérôme (qui avait dans le passé fait des chroniques pour La Grosse Radio Metal) tout en croisant Ivar Bjørnson accroché à son téléphone et le reste du groupe dans leur loge, Grutle Kjellson a l’idée de monter tout en haut des escaliers de la salle de concert afin d’être plus au calme.
C’est donc en équilibre entre deux marches que commence l’interview… alors afin de se remettre dans l’ambiance de 1991, je sors mes feuilles de papier A4 qui nous rappelle tout ce qui s’est passé dans la sphère du metal et du hard rock (merci Fef de Metal ManiaX pour ce lien très utile) il y a donc 25 ans quand deux jeunes Norvégiens de 13 et 17 ans décidèrent de créer Enslaved…
Lionel / Born 666 : La première fois qu’on a fait une interview ensemble c’était au bar du Bataclan avant que vous n’ouvriez pour Dimmu Borgir…
Grutle Kjellson : Oui en 2010…
Lionel : Et comme on est bientôt le 13 novembre, soit presqu’un an après les évènements…
Grutle : C’est une tragédie, je me sens très mal et ça a touché au plus profond de moi, c’est affreux pour la France, l’Europe et le monde entier…
Lionel : Revenons à des choses plus heureuse, vos 25 ans de carrière et ce qui c’est passé en 1991.
Grutle : Tiens c’est marrant car c’était l’année de séparation de Vanilla Fudge. Sais-tu que lorsque Led Zeppelin est parti en tournée aux Etats-unis ils ouvraient pour Vanilla Fudge ?
Lionel : Non pas du tout…
Grutle : Je pense que ça devait être en 1969…
Lionel : Que retiens-tu de cette année ?
Grutle : Je me souviens de … Gardens of Grief d’At the Gates, il y a un Blue Cheer mais je préférais ce qu’ils faisaient dans les années 60 et 70, je me souviens du Bolt Thrower (War Master), bien sûr Darkthrone avec Soulside Journey, Death et Human Clandestine d’Entombed, The Cult et Ceremony...
Lionel : Tu avais 13 ans ?
Grutle : Non j’en avais 17, c’est Ivar qui en avait 13… Kyuss, Loudness ah oui les Japonais, Malmsteen bien sûr, Metal Church et 1916 mon album préféré de Motörhead, Primus et Sailing the seas of Cheese, très drôle, Saxon (Solid Ball of Rock) et Type O Negative...
Tu as été influencé par tous ces groupes ?
Grutle : Non, pas tous…
Lionel : Mais à 17 ans tu n’étais pas encore influencé par la musique progressive ?
Grutle : Si j’étais déjà fan de Pink Floyd, Led Zeppelin…
Lionel : Et en 1991 ce qui est triste pour Kiss c’est la disparition d’Eric Carr (mort d’un cancer)…
Jérôme : En Norvège de nombreux groupes ont été influencé par Kiss…
Grutle : Oui pour nombreux d’entre nous qui avons vécu dans les années 70, on a été influencé par les Kiss.
Lionel : Comment s’est passée votre rencontre car vous aviez quatre ans d’écart : toi 17 ans et Ivar (Bjørnson) 13 ans ?
Grutle : On s’est connu car on a commencé à jouer ensemble en 1990 dans un groupe appelé Phobia avant Enslaved. J’étais déjà dans un groupe avec certains de mes amis (certains futurs membres de Theatre of Tragedy), c’est un endroit où l’on répétait avec le kit de batterie et les amplis. Un de mes amis m’a parlé d’un jeune talentueux guitariste qui jouait du thrash et du death metal avec un ampli Marshall il était très jeune mais ensuite ça c’est fait comme cela dans cette salle répète on a donc joué ensemble en octobre ou novembre 1990 j’avais donc 16 ans et lui seulement 12. Et c’est comme ça que ça a commencé.
Lionel :Comment était Bergen à cette époque ?
Non on n’était pas à Bergen mais beaucoup plus loin à Haugesund…
Lionel : Comment viviez le début des années 90 en Norvège ?
Grutle : Il y avait un mouvement extrême dans le metal à cette époque en Norvège...
Lionel : Vous aviez des amis dans ces groupes ?
Grutle : Oui je devais en avoir un ou deux mais bon nous nous n’étions ni satanique, ni black metal ni autre chose…Ce que je veux dire, c’était une toute petite scène, il devait y avoir à peu près 10 groupes. Ce n’était pas grand mais c’était une période intéressante. Les musiciens de Mayhem et de Darkthrone sont de bons amis.
Lionel : Et quels sont tes musiciens préférés de l’époque, ceux qui t’ont poussé à faire ce que tu as fait ?
Grutle : Donc je peux dire que le premier c’était Kiss, vraiment parce que c’était ahurissant et cool à la fois tout en étant des business man. A cette époque ils proposaient de collectionner des cartes Kiss dans des paquets de bonbons et j’ai commencé à collectionner ces cartes. Et comme c’était le début des années 80 et que j’étais un petit gosse je faisais des cassettes des disques que j’empruntais à mes frères et sœurs, il y avait donc du Kiss, du Nazareth, et les premiers Maiden évidement. Ensuite j’ai commencé à acheter des disques et des K7, le premier Metallica, puis Slayer, Anthrax, Megadeth et par la suite on a découvert les cassettes underground avec tous ses groupes intéressant qui étaient fantastiques, les fanzines, c’était une supère époque…
Lionel : Après 25 ans de bon et loyaux service es tu toujours fier et content de toute votre discographie ?
Grutle : Oui ! Peut être parce qu’on a toujours fait de notre mieux à l’instant donné. On était toujours enthousiaste de ce qu’on avait fait à la fin d’un enregistrement. On a toujours essayé de créer notre musique préférée…
Lionel : Un jour tu m’avais dit que tu n’étais pas trop heureux de Monumension avec « A Monument Part II & III »…
Grutle : Oui je sais, je sais, c’est exactement ce que je te disais. Sur le moment j’étais content, c’est après coup que l’on peut se poser des questions.
Lionel : En étant norvégiens, dès le début tu as choisi de jouer du viking metal. C’était assez nouveau pour l’époque ?
Jérôme : Bathory!!!
Grutle : Bien sûr j’avais été aussi influencé par Bathory. Disons que j’étais encore plus inspiré par la mythologie, la philosophie encore plus que par ce qui concerne les vikings. Bien sûr il y en a toujours une part, les ruun, la philosophie, la croyance, plus important que les tenus et les casques des viking (rire)…
Lionel : Pendant tous ces concerts, ces tournées as-tu vécu des moments complètement stupides sur scène ?
Grutle : Pas vraiment, à part des blagues un peu nulles que j’ai pu dire bien sûr (rire)…
Lionel : Pourquoi au Hellfest avez-vous joué de vieux titres ?
Grutle : Pour les 25 ans aussi…
Lionel : Mais pas ce soir ?
Grutle : Non on l’a déjà fait (rire)...C’était le but de notre tournée des festivals cet été…et là on joue d’autres titres tirés de notre carrière, et on joue des morceaux de notre dernier album.
Lionel : Peut-on dire que tourner maintient la jeunesse ?
Grutle : Peut être dans mon esprit mais pas dans mon corps (rire)…
Jérôme : Pourquoi ne jouer pas assez souvent des titres de Blodhemn ?
Grutle : Parfois on nous demande « Ansuz Astral » mais notre lineup a complètement changé par rapport à cette époque. On essaye d’adapté certains titres de Blodhemn à ce que l’on fait maintenant. On essaye de les réadapter à notre lineup actuel.
Jérôme : C’est pourtant un chef d’ouvre…
Grutle : Disons qu’il est spécial… (rire)
Lionel : Des moments de doutes ?
Grutle : Pas vraiment, on a toujours essayé d’aller de l’avant. On ne s’est jamais dit qu’il fallait faire ceci ou cela c’est comme cela que ça s’est passé. Comme on n’a jamais fait de plan sur la comète, pourquoi avoir des doutes ?
Lionel : Quand allez-vous travailler avec Steven Wilson ?
Grutle : (rire) je ne pense pas qu’il ait envie.
Lionel : Tu n’aimes pas ce qu’il a fait avec Opeth ?
Grutle : Si, j’adore. Je ne vois pas comment cela pourrait arriver. Tu sais il y a pleins de chose que j’aime. J’adore King Crimson mais je ne pense pas que Robert Fripp ait envi de collaborer avec nous (rire)…
Jerome: Et Kerry King ?
Grutle : “Fuck No !”
Lionel : Ton meilleur moment?
Grutle : Quand j’ai tenu pour la première fois notre premier mini LP dans mes mains, la première sortie officielle… Mais je suis aussi toujours heureux de créer, d’écrire des morceaux et de jouer en live…
Jérôme : peut-on crier ensemble « Enslaved » ?
Grutle : bien sûr !!!
Jérôme & Grutle : Ennnnnslaaaaaveeeeeeed…
Photos : © 2016 & 2010 Lionel / Born 666
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