Créatures, c’est d’abord une logo kitsch fait de lettres gothiques, d’une croix renversée en guise de T, décorée de toiles d’araignées et de chauves-souris. C’est ce genre de groupe dont on imagine la musique un peu vite, et qui nous fout une bonne petite claque pour nous rappeler qu’on ne juge pas sur la couverture. Le Noir Village est le premier album de ce one man band français créé en 2008. Après une démo en 2009, Sparda, le leader, s’est lancé dans cet opus et en a réalisé, en tout modestie, la composition, l’écriture, l’enregistrement des guitares, de l’ocarina, des gongs et des « choeurs célestes », entre autre. On passe du black au symphonique, avec des touches de doom et d’ambiant, mais attendez-vous aussi à être surpris par des solos de violoncelle sortis des tréfonds des donjons. Mouahaha.
Entouré de plus d’une quinzaine de musiciens et d'artistes, Le Noir Village nous propose de suivre l’histoire d’un village paysan du XIIe siècle assailli par d’horribles monstres. Les paroles en français évoquent un bestiaire horrifique, peuplé de loup-garous, vampires, démons, le tout la nuit, et durant la pleine lune, sinon c’est pas drôle. "L’Horreur Des Lunes", le premier morceau, raconte la transformation d’un homme en loup-garou : "Je suis le Monstre Lupin qui terrorise la campagne / Je suis le Lycanthrope qui dévore vos compagnes". La voix, majoritairement en chant guttural, est bien maitrisée et permet d’entendre les paroles malgré les guitares qui crachent derrière. On a parfois le droit à des échanges entre plusieurs personnages, interprètés par de nombreux invités comme Oz, d’Electric Age, dans le rôle du vampire, et autres pour les voix de démon, d’ange ou de prêtre.
Coucou
Le travail sur l’ambiance est impressionnant, passant du registre black au médiéval dans la même composition. En plus du vocabulaire bestial, on nous sert sur plusieurs morceaux, comme "Cadavre Abandonné", une petite mélodie type film d’épouvante de années 80. Si si, vous savez le "OoooouuuouuuOOOooouuuuu". Le tout accompagné de cris d'horreur et de bruits étranges.
Souvent, les discours des personnages s’alternent avec des couplets rapides, chantés par des personnages devenus fous. Le troisième morceau, "Martyre D'un Tanneur," une complainte de 13 minutes, commence ainsi par le discours solennel d’un prêtre, rendant son jugement en parlant : "Ses nombreux crimes commis jadis / Son dos courbé mime le diable et sa malice / Un homme très bizarre, le village craint ce fou / Son âme est noire ! Vous en conviendrez tous". Suivi des cris de l’accusé : "AAAaaaaah ! Je ne veux pas finir ma vie en cage !"
En fait, le portail, c'était peut-être pas une bonne cachette...
On est vite plongé dans la vie du Noir Village, parce que la musique est bien, mais aussi par envie de suivre l’histoire. Les personnages sont récurrents, les histoires se recoupent, et c’est un véritable plaisir de découvrir, des loup-garous, des démons, ou des humains, qui sont les véritables monstres.