6:33 & Arno Strobl – Giggles, Garlands & Gallows (EP)

6:33 et Arno Strobl


Giggles, Garlands & Gallows
 

En téléchargement gratuit www.633theband.com jusqu'au 31 mai

« Eh ! Voilà l'asthmatique ! Jette ton aérosol et viens dans le sous-sol. »

 

   Détestez-vous les clowns ? Moi également. Aussi bien ceux qui viennent des films adaptés de Stephen King que ceux sur les Happy Meal.

   Les clowns de 6:33, eux, bien que très très méchants, préfèrent faire la guerre aux nains et dominer la terre. De temps à autre, pourtant, il leur arrive de poursuivre de jolies filles en forêt et de les torturer, comme sur la vidéo de leur titre « Beretta » qui était extrait de leur premier album, Orphan of Good Manners. Alors du coup je me méfie. Très bien reçu, ce melting-pot musical a dévasté le monde du metal, puisque rares sont les artistes qui savent mélanger le Metal avec du Jazz Bebop, de la salsa, du Trip Hop et les sons les plus fous. On a beaucoup parlé de la reprise d'East 17, « It's Allright », montrant leur ouverture d'esprit. Du gros délire et du pur génie, à l'instar de feu Carnival in Coal dont je suis l'ultimate fan. Excellent groupe de scène, les Parisiens de 6h33 ont cette tendance à rendre le public jubilatoire partout où ils vont. Alors cette année ils se sont justement associés à la voix et le talent d'écriture d'Arno Strobl (ex- Carnival in Coal, Maladaptive) pour vous régaler, gratuitement ! avec ce nouvel EP, Giggles, Garlands & Gallows qui est tout simplement monstrueux. Ecrit sous acides, de main de maître.

 

   Trois titres et déjà l'EP Giggles, Garlands & Gallows est culte et présage un second album incontournable que l'on attend avec impatience pour septembre. Etant une grande fan de Carnival in Coal, à ce point que je me considère parfois comme leur veuve épleurée, lorsque j'ai appris que Arno Strobl allait se mettre aux commandes de 6:33 le temps de quelques chansons, (d'ailleurs le groupe a déjà changé de chanteur puisque désormais c'est Rorschach qui continuera l'aventure, par ailleurs il contribue aux voix sur le titre "M.I.D.G.E.T.S.") je ne voulais sous aucun prétexte rater l'occasion de vous parler de GG&G.

 

« Order of the Red Nose »


   Dès les premières notes de « Order of the Red Nose », premier des trois titres, avec ses 10 bonnes minutes qui démarre sur cette voix très narrative d'Arno et des notes de clavier déjantées sortant tout droit de l'esprit fou de Niko (Guitares), je fonds en larmes tant la coloration et ce son propre à Carnival in Coal sont présents et me rappellent mon défunt amour. D'après Einstein, il vaut mieux avoir une imagination débordante qu'une grande intelligence. GG&G allie les deux ! « Order of the Red Nose » est en effet un voyage aux confins de ce qui est musicalement possible. Délire musical ultime aux variations de rythme, de genres musicaux, et aux influences riches !

   (Mais qu'est Carnival in Coal ? Se demandent certains. Alors rappelons le, il s'agit d'un groupe français, originaire d'Amiens et absolument incontournable, qui savait aussi bien adapter « Maniac » de Flashdance en version Death Metal que de parodier les plus grands groupes de Metal, comme Pantera, dont l'étendue musicale se situe entre... musique d'ascenseur et ... Brutal Death ?)

   Tout le titre « Order of the Red Nose » dégringolle à vitesse grand V, comme un clown malsain sur un vélo d'enfant pédalant à toute allure, ralenti par quelques notes de piano et quelques passages avec des riffs incroyables ! Prenons par exemple ce passage ressemblant quelque peu à Ministry à partir de 8:20 ou encore les voix qui résonnent en polyphonie répétant « You got it », tout comme Queen dans « The Prophets Song », rappelant le, premier titre enregistré en polyphonie dans le monde de la musique. Qui d'autre que Queen savait nous surprendre si génialement en faisant se succéder différents courants musicaux dans un même titre ? Avec GG&G, on égalise leur génie dans cet art si délicat de mélanger les styles musicaux pour les pousser à leur paroxysme. Bien sûr, dans les influences nous pouvons également citer ce bon vieux Mike Patton, dont l'univers infini est une inspiration pour tous ces groupes en mal de brassages, comme Mr Bungle, Polkadot Cadaver, The Alter Boys, plus récemment Hail Spirit Noir (que notre cher Born666 a chroniqué et littéralement adoré) et bien sûr Carnival in Coal.

   Une atmosphère déjantée et mélancolique à la fois, le groupe se permet des alliances improbables de claviers et de guitares avançant à pas de gnome dans un rythme saccadé avant de reprendre un rythme Bebop de plus belle. Le groupe reconfirme son positionnement très avant-garde par la présence de nombreux samples et synthés. Quant aux passages bourrins chantés en voix Death par un Arno très en forme, ils sont d'une technicité et d'une complexité déconcertantes. Ces accents propres au Death, on les retrouve avec quelques notes de basse isolée disséminées par-ci par-là. Parce que, contrairement à Carnival in Coal, 6:33 ne s'éloignent jamais du Metal. Enfin...presque.

   La production impeccable met en avant cette fusion et ce qui est saisissant, c'est le travail réalisé par Emmanuel Rousseau aux Studios Wasteland qui a dû incroyablement s'amuser dans le dosage du millefeuille. Je tends un énorme chapeau au Monsieur, parce que la production est tout juste géniale! L'on peut parfaitement entendre la basse, qui est ici absolument nécessaire pour donner de la profondeur aux titres et qui se permet des accents groovy. Aussi, sans elle, le morceau filerait trop vite entre nos doigts ! La voix d'Arno est sublime et au premier plan avant d'être tamisée et relayée au second dans les passages criés afin de laisser les cuivres littéralement envahir l'atmosphère. (Bien que 6:33 n'ait jamais eu de batteur, et c'est Dietrisch von Schtrudle qui se colle à la prog.) Mais quel génie !

 

« M.I.D.G.E.T.S. »


   « M.I.D.G.E.T.S. » ! Derrière ce nom insultant pour les nains le clown entend enfin les démolir. J'ignore si ce morceau est encore plus délirant que le précédent, mais je peux vous assurer que vous allez écarquiller vos yeux plus d'une fois à l'écoute de ce deuxième chef d'oeuvre de ... 12 minutes. Toujours dans ces rythmes de cirque glauque, 6:33 et Arno Strobl nous servent un titre d'une grande maîtrise. En ce qui concerne les influences, on se rapproche davantage ici d'un Devin Townsend, avec cette batterie survitaminée à 1:28 puis 2:38 rappelant le finish apocalyptique du titre « Hope » de Strapping Young Lad. De par son atmosphère survoltée, on est très proches également de l'univers de ce musicien hors pair. Enfin, Frank Zappa n'est pas très loin. Le saxo sublimé d'un écho ? C'est bien là un clin d'oeil au compositeur de génie et c'est juste magnifique !

   Le groupe ne fixe aucune limite dans les breaks soudains et prolongés, les notes de piano complètement délirantes et  burlesques et enfin les quelques sublimes envolées mélodieuses.

   L'ambiance est malsaine, plus malsaine encore que sur le premier titre. A l'instar d'un Dog Fashion Disco, on a des passages insalubres et les voix criées sont plus grasses, comme chez ce combo américain qui vaut également le détour, tant il est sous-estimé ! Il faut impérativement écouter leur album éponyme ou simplement le titre jazzy « Pogo the clown » si vous n'êtes pas convaincus !

   Quant aux textes tantôt narrés tantôt superbement chantés, Strobl se faisant aider de temps à autre par Rorschach, ils sont juste désopilants, second degré et les nains en prennent pour leur grade :

« 15 days bodies, ways, corpses,
Dismembered little bodies,
Eviscerated human dollies,
With objects stuck into their butts,
A holocaust in liliput »

Du début à la fin, les titres de l'EP ne cessent de surprendre et la claque ne s'arrête pas là.

 

« I Like It. »


   Tous à vos planches ! Ce titre le plus accessible de l'EP démarre avec du Surf Rock et s'épanouit dans un registre plus Pop, édulcoré, contrastant avec ses paroles dégueulasses susurrées par Arno avec grâce. On est très proches de The Alter Boys et son Rock Californien totalement déluré qui nous donne envie de  taper dans les mains et chanter « I like it ! I like it !». Un OVNI musical de plus, il finira de vous essorer dans des rythmes rockabilly. Les nombreuses voix féminines en arrière plan colorent le morceau et lui donnent un coté délicieusement ingénu ! Du pur régal.

« Tst tst tst, that's not rock'n'roll, Baby »

  
   Trois titres incommensurables, qui transcendent le bizarre et les genres musicaux sans complexe aucun. De surprise en surprise, 6:33 et Arno Strobl servent des mélodies et des ambiances de film d'horreur d'une beauté extravagante. Pas de limites, pas de frontières, juste une musique d'une grande émotion et intelligence qui me fait saliver d'avance pour la suite.

   Alors il ne faut pas se priver ! On télécharge et on découvre parce que nous, à la Grosse Radio, on est déjà totalement accros ! Je vous laisse découvrir le premier titre en vidéo !


 

PS : Je vais ma faire taper sur les doigts, mais je ne pouvais pas également vous conseiller de découvrir, par tous les moyens, le groupe Maladaptive, qui exerce dans un registre beaucoup plus classique, Heavy/Thrash. Arno Strobl y a chanté pendant un temps (quid de l'avenir du groupe ?). De plus, les compos sont d'une beauté et me donnent une pêche !! Et aussi, parce que Maladaptive compte en son sein des musiciens tout simplement bluffants comme Fred Leclercq (Dragonforce) et aussi Nicolas « Nicklaus » Minier (ex-Carnival in Coal, Vakarm), qui est juste le guitariste le plus talentueux que je connaisse. Voilà. C'est dit.

 

Katarz

 
 

NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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