Difficile ces dernières années de passer à côté d'un concert de Gojira, tant le groupe domine la scène metal française. Non mécontents d'aller à la rencontre de sa solide fan base française, les Landais nous offrent une série de dates à travers l'hexagone, après avoir écumé les scènes des festivals cet été. Pour étrenner sa tournée française, Gojira a choisi la belle salle de l'Autre Canal à Nancy, accompagné par les suisses de Nostromo, fraichement reformé après 11 ans d'absence, de quoi faire monter les températures glaciales de ce mois de janvier.
Nostromo
La salle est déjà bien remplie, attendant avec impatience ou curiosité Nostromo, qui ne fait pas dans la dentelle pour son retour, en balançant dès le début du set un combo "Epitomize" et "Selfish Blues" dans la tronche des sceptiques. Le charismatique Javier au chant est une boule de nerf, maîtrisant ses lancers-rattrapés de micro comme à son habitude.
La setlist est très intelligement déployée, piochant dans les trois albums dernièrement réédités, alternant entre gros grind et gros hardcore. Les Suisses prennent un réel plaisir à jouer, il ne leur aura pas fallu beaucoup de temps pour retrouver leurs marques et leurs habitudes.
Le public est matraqué, mais conquis, et leur détracteurs peuvent bien rentrer chez eux. A la question "Est-ce-que le retour de Nostromo est une réussite?" on pourrait répondre "Est-ce que le soleil se lève à l'Est?". De quoi nous donner envie d'une suite sur album.
Gojira
Le passage de Nostromo aura eu le mérite de chauffer la salle comme il se doit pour l'arrivée de Gojira, qui se fait attendre. Batterie sous les projecteurs, écran géant en attente, et c'est sous un vrombissement de foule que Mario entre et martèle sans avertissement "Only Pain" en guise d'introduction. Un morceau certes efficace mais qui ne suffira pas à faire adhérer les foules. Le coup d'envoi ne sera réellement donné qu'à l'intro du très lourd "The Heaviest Matter Of The Universe", suivi par le magistral combo "Silvera" et "Stranded". On aurait peut-être aimé avoir ces morceaux plus tard dans la soirée, mais qu'importe, on apprécie la facilité technique des Landais, qui enchaînent la rythmique avec une désinvolture assurée.
Joe et son t-shirt Evil Mario est un peu fatigué ce soir ("j'ai oublié comment on fait pour gueuler"), mais ses trois compères déploient tellement d'énergie qu'on le ressent à peine. Quelle énergie sur scène et dans le pit! Les fans scandent "Jean-mi, Jean-mi!" et plus tard, Mario et Christian feront monter un fan sur scène pour crowdsurfer. La chaleur monte d'un cran.
Comme à l'acoutumée, on apprécie les alternances entre morceaux très puissants comme "Backbone" et ceux plus aériens comme "Flying Whales". Tout ceci fait écho avec la discographie dissonante du quartet, et leur jeu sur les rythmiques et les sonorités.
Coté setlist, il y a de quoi être déçu pour ceux qui ont eu l'occasion de les voir cet été (et ils sont sûrement nombreux dans la salle), puisque le groupe privilégie encore trop massivement Magma, avec pas moins de six morceaux joués ce soir. Même si on est content d'entendre "Wisdom Come" ou "Vacuity", on aurait aimé une setlist plus représentative de l'étendue de la discrographie du groupe. Le solo de batterie reste toujours autant discutable, mais on ne refuse rien à Mario, le chirurgien des fûts. Outre cela, la prestation du quartet reste indiscutablement précise et efficace. Le jeu de scène couplé au jeu de lumière nous emporte quoi qu'il arrive.
Le groupe s'applique à nous faire vivre des moments forts à chaque concert, par leur technicité, leur générosité et leur bonne humeur communicative. Gojira, ça n'est pas quatre membres, c'est un entité à part entière, chacun portant le groupe à sa manière pour le mener le plus loin possible. On sent toute leur humilité et on ne peut que respecter et apprécier de les voir se donner à fond à chacune de leur apparition. Après le rappel, le quatuor remercie chacun à sa manière la foule, et nous laisse tout transpirant pour affronter l'hiver lorrain.
Merci à Warner Music pour l'accréditation et à L'Autre Canal pour l'organisation.
Crédits photo: Mathieu Mussler / Bee Metal Magazine