Le polyhedron hollandais à douze faces est de retour pour son deuxième album Kwintessens. Mais si ! Souvenez-vous de leur premier album éponyme, et déjà notre étonnement quant à ce nom sorti du monde de la géométrie. Dans notre grande famille du metal on y a accolé tout ce qui était possible : heavy, death, black, pagan, doom, industrial, progressive, math metal... Et pourquoi ne pas attribuer aux Hollandais le genre de geometric metal tant la musique (sans oublier le nom) qui part dans tous les sens nous donne parfois l’impression de léviter en apesanteur dans un flou 3D ?
Cette musique (rien que le prélude), tel un big bang, s’étire et se replie sur elle-même, avec le chant agressif de M. Eikenaar, rarement égalé à ce jour. Particulièrement sur « TETRAHEDRON - The Culling of the Unwanted from the Earth ». M. Nienhuis et J. Bonis arrivent à faire « pleurer » leurs guitares, dont on a l’impression qu’elles fondent sous la chaleur d’un magma en fusion. La frappe sèche de J. Barendregt accentue le côté froid de la structure musicale millimétrée, lorgnant vers une ambiance industrielle martelé « à la baguette et au clic ».
Sur « HEXAHEDRON - Tilling the Human Soil » chaque instrument suit sa propre voie et sa ligne mélodique sans bousculer son voisin. Cela fonctionne puisqu’ils se retrouvent tous à la fin du titre comme par enchantement. « L’interlude » fonctionne assez bien, avec un instrumental oppressant, conduit par une rythmique omniprésente avant qu’une avalanche de paroles sur un lit de riffs partent de façon circulaire. Un peu comme une goutte de pluie tombant sur un plan d’eau en tsunami circulaire (« OCTAHEDRON – Harbinger »).
Inquiétante, cette composition voit une tension qui monte en intensité dans une cascade d’agressions, avec un sample en toile de fond. La musique possède ce côté irréversible où l’on a l’impression de tomber dans un puits sans fond.
« Dodecahedron - An Ill-Defined Air of Otherness » est lumineux en intro mais toujours aussi déstructuré par la suite, fait de rebondissements jusqu’à une plage calme, permettant à l’auditeur de retrouver ses esprits (enfin ce qu'il en reste) et de faire l’inventaire de ses oreilles. Le chant de M. Eikenaar y est travaillé avec des effets vocaux en guise de finale, rappelant des coupure de bobines de films d’horreurs disséquées en rush (« Finale »).
Sur une musique savamment déstructurée jusqu’à l’aliénation, on retrouve sur « ICOSAHEDRON - The Death of Your Body », la voix parlée qui chavire dans une tourmente musicale à rendre fou un chercheur qui travaille depuis des années sur la quadrature du cercle. Avec de pareils titres, les musiciens sont à enfermer !
Finalement, si l'on devait décrire la musique de Dodecahedron, ce serait un peu comme si quelqu'un avait cassé une soupière en mille morceaux et qu'il tentait de la recoller en mettant les bouts de porcelaine et la colle dans un énorme shaker, pensant la rénover en secouant le tout vigoureusement.
Lionel / Born 666