"...Notre race humaine n'est qu'un incident trivial dans l'histoire de la création : l'humanité est peut être une erreur, une excroissance anormale, une maladie du système de la Nature. (H.P.Lovecraft)"
Les étoiles sont à nouveau alignées. Il est temps pour The Great Old Ones de créer à nouveau. La création s’accompagne des douleurs de l’enfantement, et le sang a coulé à nouveau. Un sang salé comme l’océan primordial dont nous sommes tous issus.
EOD est un acronyme pouvant avoir plusieurs significations. Nos contemporains pourraient y voir le jour où les ressources de la Terre sont utilisées d’avantage que ce que cette dernière peut régénérer durant une année donnée (Earth Overshoot Day). Les adeptes de Cthulhu que sont les Bordelais de The Great Old Ones y verront plus probablement l’Ordre Esotérique de Dagon. Cette mystérieuse organisation vénère Père Dagon, Mère Hydra et bien sûr le grand Cthulhu, tous issus de l'océan et des profondeurs mystérieuses qu'il recèle.
A travers la mythologie inventée par H.P. Lovecraft, The Great Old Ones poursuit donc son petit bonhomme de chemin depuis la sortie du très prometteur Al Azif, en 2012. EOD A Tale of Dark Legacy est déjà le troisième album du groupe, un nombre qui signe souvent la maturité d’une formation. D’ailleurs, l'âge adulte s'accompagne souvent de nombreuses modifications. L’an passé, des changements importants dans le line-up ont eu lieu. On remarquera l’arrivée de Jérôme Charbonnier et d’Aurélien Edouard, en remplacement respectivement de Sébastien Lalanne et de Xavier Godart, conservant ainsi le mur d’instruments à cordes habituel de la formation. Notons cependant que l’album a été enregistré par l’équipe d’origine.
En effet, une des caractéristiques du groupe est de plaquer trois guitares sur la basse, ce qui permet une puissance et une profondeur de son remarquables. Si on devait caricaturer le style de The Great Old Ones, on pourrait dire qu’il s’agit d’hurlements sombres d’un dément, sur de lourds riffs à la limite du doom, réhaussés par des sonorités de guitare stridentes. Le tout accompagné d’un occasionnel court texte parlé. Que l’on appelle l’ensemble du post black metal, du black mélodique ou ce que l’on veut ne changera rien à l’affaire, mais démontrera juste que de coller des étiquettes sur les groupes ayant une certaine originalité n'est pas chose aisée.
Ce troisième album n’échappe pas à la règle, et on reconnait assez facilement la signature griffonnée sur un parchemin en peau humaine d’une oeuvre inspirée.
L’hommage appuyé envers l’oeuvre inspiratrice du groupe, à savoir le Mythe de Cthulhu d’H.P. Lovecraft transparait dans les paroles, mais aussi dans l’ambiance musicale. Chacun a son imaginaire et ses références propres, mais quiconque ayant lu l’œuvre noire, désespérée et quelque part malsaine du père de Cthulhu, se rendra compte que The Great Old Ones respecte parfaitement cette atmosphère avec sa musique.
Le chant black metal a toujours eu la particularité d’exprimer à la fois la souffrance et la haine, et ici, cela se prête à merveille. Globalement, le rythme de cet album est sans doute un peu plus rapide que les opus précédents, notamment par rapport à Al-Azif. D’occasionnels ralentissements, comme dans “The Rital” ou “Wanderings” par exemple, ne servent qu’à mieux repartir par la suite.
Le dernier morceau, de plus de dix minutes, est d'ailleurs particulièrement réussi. Ceci dit, pour un album dédié aux cultes des profondeurs, on ne pouvait pas se permettre de rater un titre comme “Mare Nostrum”. Son introduction au violoncelle ajoute un peu plus de ténèbres et d’angoisse, dignes d’une bande son d’un vieux film de vampires.
(The Great Old Ones au Hellfest 2015)
EOD A Tale of Dark Legacy montre bien son sombre héritage, issu directement des deux albums précédents, sans pour autant trop se répéter. La présence de quelques excellents morceaux, comme par exemple “The Shadow over Innsmouth”, qui est peut être le plus représentatif de l’ensemble de l’oeuvre du groupe, démontre que le potentiel est encore intact.
The Great Old Ones a su se faire remarquer par une musique intéressante et inspirée. Leur présence sur quelques grandes affiches dans diverses tournées en est une preuve supplémentaire, s’il en fallait encore une. Ne doutons pas que l’avenir, s’il restera certes sombre pour l’Humanité, offrira encore quelques opportunités aux adeptes des Grands Anciens...
EOD A Tale of Dark Legacy, sorti le 27 janvier 2017 chez Season of Mist.
Playlist:
1. Searching for R Olmestead (intro) (0:25)
2. The Shadow over Innsmouth (9:25)
3. When the stars align (4:48)
4. The Ritual (9:31)
5. Wanderings (1:15)
6. In Screams and Flames (7:50)
7. Mare Infinitum (10:55)
Thomas Orlanth