Vendredi 15 juin, 0h45 - Mainstage 2
Hail to the King !
Nous l'attendions tellement, cela semblait faire une éternité que le King n'avait plus foulé les terres françaises tant nous ne pensions plus, il y a encore quelques mois, le revoir suffisamment en forme pour effectuer son comeback de l'enfer. Car King Diamond y a été, le temps de quelques pénibles mois qui ont suivi ce 29 novembre 2010 où, après un malaise, il est emmené à l'hôpital pour y subir un triple pontage coronarien. L'opération dura sept heures et fut un succès, mais le rétablissement s'annonçait long et nul ne savait s'il pourrait revenir ou non aux affaires. Un an et demi plus tard, une semaine après son brillant concert au Sweden Rock, il est là devant nous au Hellfest et une foule très amassée vers le devant de la scène - pas très nombreuse au final, ceci étant dû à la pluie battante qui commence à s'abattre sur le site au moment où Megadeth termine son set.
Peu importe, La Grosse Radio Metal a décidé de braver les éléments et de suivre cet évènement aux premiers rangs, dans le pit où fans de la première heure côtoient gaiement d'autres plus récents mais totalement acquis à la cause du dénommé Kim Bendix Petersen (son vrai nom). Pendant l'heure et demie d'attente (alors que Dave Mustaine s'égosille juste à côté), nous discutons avec deux fans danois venus des Îles Feroé (dédicace à Tyr au passage) uniquement pour ce show, idem pour l'ami israëlien juste derrière moi - artiste lui-même et qui verra son futur nouvel album masterisé par Andy LaRocque, guitariste historique de King Diamond bien évidemment présent ce soir. Sans oublier les quelques "bourrés de service" qui heureusement ne viendront pas trop gâcher l'ambiance.
Un drap noir recouvre la grande scène le temps que les choses se mettent en place, on imagine donc qu'un décor théâtral est en train d'être monté juste derrière, le King et ses amis ayant décidé de mettre les petits plats dans les grands via une production digne des plus grands pour un spectacle digne de ce nom. Et nous ne serons pas déçus, du moment où le rideau se lève jusqu'à la dernière note d'un concert certes très pluvieux mais inoubliable.
Lorsque le théâtre horrifique se voit enfin révélé à nos yeux, une grille noire nous sépare du King et de ses musiciens au moment où la troupe danoise allume une première bougie mythique. "The Candle", King Diamond décide de débuter son set avec la première chanson de son histoire en "solo", celle qui ouvre Fatal Portrait sorti en 1986 (opus réalisé peu après le premier split de Mercyful Fate). L'ambiance est à la fois macabre et chalereuse, KD semble plutôt en forme et ce n'était pas gagné sur le papier car quelques rumeurs (perte de voix, du coup conférence de presse annulée) circulait à son sujet. Mais il est bel et bien là, en chair et surtout en os, os qui servent d'éternel support à son micro. L'ambiance est vite irrespirable près des barrières, mais première constatation : outre la voix convaincante, les musiciens sont en harmonie et le son sans défaut majeur.
Le show, véritable spectacle digne des plus sombres nouvelles d'Edgar Allan Poe, se déroule ainsi sans accroc. Les grilles perdureront jusqu'à ce que le "Up from the Grave" de rigueur ordonne à deux hommes cagoulés qu'on les retire. "Let It Be Done" en interlude, et désormais rien ne séparera King Diamond de son public. un groupe au diapason autour de son frontman donc, mais aussi quelques guests (pas très invisibles ceux-là) amusants dont plusieurs intérprétés par la même personne : l'actrice Jodi Zachia qui tour à tour interprétera la grand-mère dans sa chaise roulante ("Welcome Home", voir photo ci-dessus), une sorcière voudou ("Voodoo" ou plus tard "Eye of the Witch"), une ombre de la nuit ("Shapes of Black") ou encore et bien évidemment la célèbre Miriam (maman de la démoniaque Abigail, sur "The Family Ghost" où elle est encore vêtue de blanc, et le grand final "Black Horsemen" où elle souffre habillée de noir et sur le point d'accoucher du monstre aux yeux jaunes). Tout une performance de la demoiselle qui sait parfaitement tenir ses rôles avec une crédibilité à toute épreuve. A noter aussi la présence de Livia, l'épouse du King, pour quelques choeurs en l'apparence discrets sur le côté droit de la scène mais qui permettent au côté vocal de prendre une excellente ampleur.
Car notre King Diamond a beau tenir son rang de vocaliste hors pair entre aigus falsetto qui font sa célébrité depuis presque 30 ans, chant habité d'une certaine folie ou moments agressifs plus démoniaques, il fatigue un peu sur la fin des 75 minutes de show et ne parvient peut-être pas à conserver la même puissance d'antan. Peut-être un peu malade notre héros ce soir, mais ultra courageux et à l'attitude scénique tout simplement irréprochable. Au final, dans la chaleur de la nuit et le coeur de l'action, nous ne remarquons pas forcément ces très légers éceuils qui de toute façon ne perturbent en rien l'excellent déroulement d'un concert haut en couleurs (et en noirceur). Quoiqu'il arrive, il n'était pas seul ce soir-là, entouré de musiciens exceptionnels et talentueux à l'extrême qui s'en sont donnés à coeur joie sans la moindre fausse note. On évoquait Andy LaRocque tantôt, ce dernier enchaîne les riffs et les solo comme un métronome, bien aidé d'un Mike Wead tout aussi performant. Et lorsque les deux se permettent de troquer leurs électriques pour des électro-acoustiques à teneur "flamencoïsante", on touche au sublime, Mike nous offrant à un moment un solo assez magique dans le style. A la basse, Hal Patino (que nous avions déjà vu au Hellfest en 2010 avec Pretty Maids) emballe la rythmique de ses doigts précis, soutenant un Mike Thompson viril et carré derrière ses fûts.
Il ne reste plus qu'à parler du choix des titres, forcément restreint tant cette prestation aurait mérité une bonne demi-heure de plus quand on y pense, mais plutôt bien effectué car retraçant la carrière solo du King du premier au dernier album à date. Et plus encore, puisqu'un "Come to the Sabbath" viendra émerveiller l'assistance, reprise de son groupe culte Mercyful Fate avec qui il a posé les jalons "visuels" du black metal et surtout inspiré les plus grands du heavy ou thrash metal (Metallica parmi tant d'autres). Morceau fédérateur s'il en est, beaucoup se sont écriés "Melissaaaaaaa" pour un rappel hypothétique mais cet instant ne viendra pas. Peu de regrets donc, même si un "Abigail" du fabuleux disque conceptuel éponyme aurait été une véritable cerise sur le gâteau, et parfaitement "chantable" pour un King qui a su rivaliser avec ses limites sur le fameux "At the Graves" faisant figure de hit en puissance et qui pourrait résumer à lui seul la carrière solo du bonhomme. Deux rappels dantesques viendront ponctuer ce véritable voyage horrifique dans le temps pour une conclusion parfaite, deux titres du fameux Abigail entourant un "Halloween" extrait du premier opus. Impossible de rêver mieux comme final.
Un concert qui s'est déroulé en un éclair. Bien trop court, et ce de l'avis de tous, mais point trop gâché par cette satanée pluie. Du moins pas pour ceux "à fond" sur le devant de la scène, ce détail ayant semblé plus dérangeant pour ceux éloignés des premiers rôles. La magie a opéré et appelle désormais un nouvel album de King Diamond, prévu plus ou moins pour 2013 si tout se passe bien. Quant à ceux qui espèrent un retour de Mercyful Fate, qu'ils regardent la prestation de décembre dernier en Californie lors d'un medley interprété en compagnie de Metallica pour patienter un peu, car cela ne semble pas à l'ordre du jour. Peu importe pour l'instant, King Diamond is back et les festivaliers du Hellfest 2012 s'en souviendront !
Setlist (1h15) :
- The Candle
- Welcome Home
(Drum Solo)
- Voodoo
- At the Graves
- Up From the Grave
(Let It Be Done + Bass Solo)
- Dreams
- Sleepless Nights
(Double Guitar Solo)
- Shapes of Black
- Come to the Sabbath (Mercyful Fate Cover)
- Eye of the Witch
- The Family Ghost
- Halloween
- Black Horsemen
(Bravo à notre cher Vyuuse qui a récupéré cette setlist officielle auprès de l'ingénieur son)
Crédit Photos :
© 2012 Nidhal Marzouk / Yog Photography
© 2012 Thomas Orlanth pour La Grosse Radio
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