Mike Portnoy’s Shattered Fortress (+ Next to None) au Trianon (01-07-2017)


Depuis son départ de Dream Theater en 2010, Mike Portnoy n’avait plus beaucoup eu l’occasion de jouer des titres de son ancien groupe, hormis ponctuellement avec Flying Colors ou avec le supergroupe fondé avec Billy Sheehan, Tony MacAlpine et Derek Sherinian. Cela est désormais réparé, puisque le batteur le plus occupé du prog a décidé de célébrer ses 50 ans en rendant hommage à son ancienne vie artistique le temps d’une tournée unique.

Shattered Fortress. Les fans de Dream Theater savent très bien quel projet se cache derrière cette appellation, puisqu’il s’agit du titre d’une composition du Théâtre de Rêve, concluant la 12 step suite, une saga musicale inspirée des déboires alcooliques et de la rédemption du batteur auprès des alcooliques anonymes. Et c’est l’intégralité de cette saga que Mike Portnoy s’apprête à jouer ce soir au Trianon, en compagnie des musiciens d’Haken et d’Eric Gillette, jeune prodige de la guitare révélé par le Neal Morse Band. Mais avant ce programme, place à Next to None, au sein duquel joue un certain Max Portnoy

 

Next to None


C’est devant un public encore peu nombreux que les Américains de Next to None entrent en scène. Emmenés par Thomas Cuce aux claviers et au chant, c’est pourtant vers le jeune batteur que les regards sont tournés dès le début de leur set. Et pour cause, c’est Max Portnoy qui est présent derrière les fûts et qui reprend par ailleurs la gestuelle et les gimmicks caractéristiques de son père.

Le jeune groupe (dont la moyenne d’âge ne dépasse pas 18 ans) fait preuve de beaucoup de technique en dépit de son manque d’expérience. Toutefois, Next to None évolue dans un metal progressif moderne, teinté de metalcore et peine à proposer des morceaux accrocheurs. En réalité, si les musiciens sont tous très bons dans leur domaine respectif, les compositions qu’ils proposent manquent cruellement de cohérence. Pire que cela, le chant nasillard de Cuce devient rapidement irritant tandis que l’ensemble oscille maladroitement entre les genres.

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Les plans au piano particulièrement mélodiques côtoient des passages hurlés typiques du metalcore dans un ensemble qui manque de maturité. Next to None est finalement victime de sa propre fougue, vraisemblablement liée à son jeune âge. Etant donné le niveau technique des musiciens, il est certain que le jour où le combo aura définitivement trouvé sa voie et aura su canaliser son énergie, il pourra certainement se créer des adeptes au sein du public prog. En attendant, les jeunes musiciens sont confrontés soit à des applaudissements polis, soit à une indifférence totale de la part d’un public qui n’attend qu’une chose, voir Portnoy senior au plus vite.

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Mike Portnoy’s Shattered Fortress

Quoi de mieux que l’enchaînement « Overture 1928 »/« Strange Déjà Vu » pour démarrer le set de Shattered Fortress ? Ces deux titres constituent à eux seuls une entrée en matière indiscutable pour les fans de Dream Theater, car ils ouvrent rien de moins que Scenes From a Memory, l’album le plus souvent plébiscité par les fans du Théâtre de Rêves. C’est d’ailleurs l’occasion pour le public de s’en donner à cœur joie et d’accueillir les musiciens d’Haken, Eric Gillette et Mike Portnoy comme s’il s’agissait du Dream Theater période 2000.

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Immédiatement, on remarque le large sourire qu’affiche le batteur, qui prouve qu’en dépit de ses nombreux projets, cette musique qu’il a développée pendant des années reste chère à son cœur. Côté instrumentistes, la présence de trois guitares (là où John Petrucci assure d’habitude l’intégralité des parties à lui seul) n’alourdit en rien l’ensemble. Charlie Griffith, Richard Henshall et Eric Gillette se posent d’ailleurs en dignes héritiers de leur modèle et lui font honneur en retranscrivant ses riffs et ses soli à merveille.

De même, Ross Jennings (chant) est largement à la hauteur des lignes de chant d’un James Labrie lorsqu’il était au meilleur de sa forme et parvient même à atteindre certaines notes qui sont désormais pratiquement hors de portée de la tessiture du Canadien. Enfin, Diego Teijeda s’immisce à merveille dans le rôle de Jordan Rudess, allant même jusqu’à s’approcher des premiers rangs avec un Keytar, à l’image du sorcier des claviers.

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Lorsque Portnoy prend enfin la parole pour expliquer le concept de la soirée, le public se met à entonner un « happy birthday to you » sincère et touchant, qui semble émouvoir le batteur. Et en termes d’émotion, cela ne fait que commencer.

Lors de la sortie d’Awake en 1994, Mike Portnoy avait déjà narré ses problèmes d’alcoolisme avec le titre « The Mirror ». C’est donc tout naturellement que celui-ci trouve sa place dans la setlist de ce soir et réjouit les fans de la première heure par la même occasion. Mais c’est avec « The Glass Prison » que les choses sérieuses démarrent. Malgré le côté puissant et dense des riffs de ce titre et de « This Dying Soul », ces titres sont un régal à entendre et certains spectateurs vont même jusqu’à sauter sur place pour manifester leur enthousiasme.

Ce set donne également aux fans l’occasion de redécouvrir « The Root of All Evil », présent sur l’inégal Octavarium, et le très Opethien « Repentance » sur lequel c’est Portnoy lui-même qui assure le chant. On apprécie d’ailleurs de voir apparaître sur l’écran le visage des musiciens invités en studio par le batteur, afin de se confier sur leurs erreurs passées. Ainsi, tour à tour se succèdent Steve Hogarth (Marillion), Corey Taylor (Slipknot), Chris Jericho, Steven Wilson ou encore Mikael Akerfeldt (Opeth).

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Chacun des titres de la 12 Step Suite s’imbrique finalement bien dans l’ensemble et rien ne sonne de façon décousue. D’ailleurs, « The Shattered Fortress » vient rajouter de la cohésion au final en rappelant chacun des thèmes déjà joués. Si la version studio de ce titre peut faire penser à un patchwork de tous les riffs de la 12 Step Suite, c’est en s’intégrant à l’ensemble qu’elle prend tout son sens et conclut à merveille ce set.

Mais la soirée est encore loin d’être finie et Mike Portnoy revient, toujours entourés de ses talentueux acolytes, pour faire une fois de plus honneur à Scenes from a Memory. L’enchaînement « Home », « The Dance of Eternity » et « Finally Free » va achever plus d’un fan dans la fosse du Trianon, tant l’interprétation est magistrale. On se rend compte que Mike Portnoy a finalement bien plus le sens du spectacle que son successeur au sein de Dream Theater, et son jeu sonne de façon bien plus groovy, notamment sur le solo de fin de « Finally Free ». « The Dance of Eternity » donne également l’occasion aux musiciens d’Haken de se frotter à l’un des instrumentaux les plus corsés techniquement de la discographie du batteur à la barbe bleue et surtout de s’en sortir une fois de plus brillamment.
 

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C’est un set sans aucun temps mort et surtout sans défaut que ce groupe éphémère a délivré ce soir, devant un public aux anges. Loin d’un simple tribute Band, ce Shattered Fortress nous a permis de nous replonger le temps d’une soirée dans cette œuvre magnifique, et l’on se prend à regretter plus de sept ans après la décision de Mike Portnoy. Quoi qu’il en soit, « Happy Birthday Mike ! »

Setlist Mike Portnoy’s Shattered Fortress

Overture 1928
Strange Déjà Vu
The Mirror
The Glass Prison
This Dying Soul
The Root of All Evil
Repentance
The Shattered Fortress
Home
Dance of Eternity
Finally Free

Photographies : © Nidhal Marzouk 2017
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe
Un grand merci à Garmonbozia



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