Toujours aussi bruyant et malsain, Unsane débarque après cinq ans d'absence avec Sterilize, un album qui poursuit dans le style développé depuis presque trente ans par les New-Yorkais. Rythmique pilon, guitare abrasive et chant à la limite de l'hystérie servent une musique aux thèmes abordant le glauque dans tous ses domaines. Le trio fait toujours mal aux oreilles et cela fait plutôt du bien à constater.
Monsieur death metal vous n'avez pas le monopole du gore et du malsain sachez-le. Nan, nan, désolé mais alors que Cannibal Corpse essayait de sonner comme Slayer dans son garage, un trio issu des bas fonds new-yorkais faisait déjà un sacré boucan dans les clubs de la Grosse Pomme en s'exprimant sur des sujets qui n'avaient rien à voir avec les petits chatons. Ou alors bien morts les chatons, décomposés même. Mené depuis 1988 par le guitariste-chanteur Chris Spencer, Unsane donne dans le noise- rock torturé.
Oui mais alors, pourrait dire l'auditeur lambda, quel rapport avec le metal excepté le boucan ? Déjà il y a cette thématique sanglante que le groupe new-yorkais partage avec certains combos plus brutaux que lui, et de plus Unsane a tourné avec Slayer et Entombed au cours de sa carrière. Et si l'on écoute les albums post-Wolwerine Blues des entombés on peut y déceler parfois une influence noise dans leur musique.
Chaque album d'Unsane pourrait être la bande-son du Maniac de William Lustig, tout y pue le sang, la sueur, le sperme et la mauvaise dope injectée dans des toilettes sordides entre deux passes. Le rock du power trio suinte de riffs et de soli à la fois sales et bruyants, le chant haineux est au bord de la rupture et l'assise rythmique assommante.
La musique d'Unsane a cependant le défaut d'être assez prévisible, ce qui fait que cette nouvelle offrande, la septième, sonne un peu comme le premier disque éponyme des New- Yorkais, celui dont la pochette est le cliché d'un cadavre mutilé sur une voie ferré (oui oui Monsieur death metal). Il y a donc peu de surprises sur ce Sterilize, à l'artwork toujours aussi sanglant, qui fait suite à Wreck sorti en 2012. Un disque qui a mis du temps à venir par ailleurs car Unsane revient de loin depuis leur précédent album, leur batteur Vinnie Signorelli ayant dû faire face à des problèmes de santé qui ne lui garantissaient pas de pouvoir de nouveau frapper comme une brute sur ses toms.
Tout est donc affaire de riffs chaotiques déjà sur Sterilize comme sur l'introductif « Factory » qui nous laisse penser que l'usine dont il est question dans ce titre est l'usine de la peur. Parfois cette façon de faire sonner son instrument comme un messager de l'Apocalypse rapproche le riffing de Spencer des ambiances dévelloppées par Neurosis comme sur « The Grind » et « Distance » par exemple. La guitare est souvent dissonante et joue sur chacun des titres une mélodie en lead malsaine qui renforce l'impression de malaise urbain dégagé par la musique d'Unsane. Ou alors elle est heavy, proche d'un doom rock comme sur « Inclusion », « We're Fucked » et le presque post-core « Avail ».
Le chant de Chris Spencer semble parfois gorgé de glaviots haineux (« Factory »), entre colère hurlée sur « No Reprieve » et « Lung » par exemple. Le vocaliste est à la limite de la rupture même par moments comme sur « Aberration » ou le concluant « Avail » sur lequel le guitariste-chanteur paraît déverser sa colère contre le monde entier. Sa voix semble exprimer aussi l'angoisse existentielle comme sur « Distance », voire la rage et la tristesse mêlées comme sur le très explicite « We're Fucked ». Parfois on pense à la façon de chanter de David Yow (Jesus Lizard) comme sur « The Grind » tandis que l'efficace et oppressant« Aberration » rappelle aussi le groupe culte de noise issu de Chicago, mais en plus malsain.
A noter par ailleurs que certains « refrains » (il est préférable de mettre des guillemets en employant ce mot pour Unsane qui n'a rien d'un pondeur de tubes radiophoniques) sont plutôt réussis et efficaces aussi comme sur « Distance » et « A Slow Reaction » par exemple. De même, parfois le groupe sonne presque mathcore comme sur « No Reprieve » avec ses parties virevolvantes de basse et de batterie. Entre autres petites surprises sur ce Sterilize, il y a aussi ces nappes musicales industrielles que l'on entend en intro sur « Lung » et lors de l'enchainement avec le titre suivant « Inclusion », un morceau sur lequel la batterie est enveloppée d'un effet de reverb aussi. La basse de Dave Curran est aussi très mise en avant dans le mix et intervient en solo sur le break de « Avail ».
Mais malgré ces quelques « innovations », on ne peut s'empêcher de trouver une certaine linéarité à ce nouvel album des New-Yorkais, cette impression est renforcée par le duo « Lung » et « Inclusion » qui forment un peu le ventre mou du disque. Soulignons aussi que le groupe semble avoir tendance au recyclage parfois comme on peut le constater sur « A Slow Reaction » dont le riff ressemble assez à celui de « Distance ».
Ces menus défauts ne décourageront pas les fans les plus fidèles à se procurer Sterilize cependant. Quant aux autres auditeurs, s'ils en ont marre du conformisme musical qui régne sur les ondes et ont besoin d'une bonne dose d'énergie et de rage, ce nouvel album d'Unsane leur stérilisera efficacement les oreilles. Monsieur death metal où allez-vous comme ça ? Chez le disquaire l'acheter ? Bien, bien...
Liste des titres :
1. « Factory »
2. « The Grind »
3. « Aberration »
4. « No Reprieve »
5. « Lung »
6. « Inclusion »
7. « Distance »
8. « A Slow Reaction »
9. « We're Fucked »
10. « Avail »
Sorti le 29 septembre 2017 chez Southern Lord Records