Prophets Of Rage au Zénith de Paris (10.11.2017)

Après leur prestation monstre aux festivals d’été, Prophets Of Rage était incontestablement l’un des groupes les plus attendus en salle cette automne. Entre temps, le supergroupe a réaffirmé son sérieux en sortant un album tout en continuant de jouer les meilleurs titres de Rage Against The Machine, Public Enemy et Cypress Hill en live. Alors simple machine à profit se reposant sur l’héritage de Rage ou vrai bon groupe ? Le débat était dans toutes les conversations en arrivant ce soir au Zénith.

Nova Twins

Encore peu de monde dans la fosse quand Nova Twins monte sur scène, c’est la rançon de la première partie inconnue dans ce genre de grande salle. Tout de suite, le trio va nous livrer son mélange assez particulier entre rock, rap et électro le tout supporté par le flow rappé de la chanteuse principale Amy Love, très inspiré par Zach de la Rocha.

Lorsqu’on parle de mélange rock/electro, il ne faut pas s’imaginer une musique joviale pour autant. Il n’est pas difficile de deviner d’où viennent les Nova Twins tant les instrus sont typiques de la grime anglaise avec ces basses malsaines et vicieuses. Au final, le groove est bel et bien là et la chanteuse alterne entre ses deux micros pour modifier sa voix à sa guise rendant le tout encore moins organique.
Malheureusement, le son est assez affreux et n’aide pas les spectateurs à s’impliquer dans une musique si particulière. La guitare de la chanteuse semble être là pour faire figuration puisque rien ne change lorsqu’elle s’en sépare et le son de la basse trafiquée prend beaucoup de place dans le mix.

Mais le trio ne désarme pas et va finir par conquérir une partie de la foule en redoublant d’efforts, provoquant un joli début de moshpit en fin de set. Il faut dire que le mélange rap-rock-grime passe particulièrement bien en première partie de Prophets Of Rage, on pouvait difficilement rêver d’une meilleure place pour Nova Twins. En revanche, il est clair que le duo de frontwomen a encore du mal à occuper tout l’espace sur une scène aussi grande que celle du Zénith.

Après 45 bonnes minutes de jeu, le groupe s’éclipse et reviendra dans 5 jours au Point Ephémère, dans une salle où il devrait prendre pleinement possession de la scène.

Prophets Of Rage

Avant que le groupe au grand complet ne débarque, on a droit à un petit moment en compagnie de DJ Lord qui nous envoie une ribambelle de tubes de la pop au heavy metal tout en montrant tout son talent au scratch. Au bout d’un petit quart d’heure, cette introduction devient cependant carrément longue et on se demande quand va débarquer le groupe en entier. En jetant un rapide coup d’œil sur la salle, on remarque que les gradins sont loin d’être complet et honnêtement à plus de 60€ la place, c’est bien fait. Pour qui en doutait encore, la gentrification des concerts est clairement en marche et il faut être riche pour se payer une place, c’est un fait. Peut-être encore plus choquant pour un groupe comme Prophets of Rage censé supporter des valeurs de gauche et parler à un public populaire.

Parenthèse fermée, le groupe peut débarquer sur le fameux titre de Public Enemy, « Prophets of Rage ». Tout de suite on constate que personne n’est là pour blaguer, le flow de Chuck-D est impressionnant de justesse pour un MC de 57 ans et le reste du groupe lui emboite le pas. Dès le premier titre, la fosse rentre en fusion mais ce que tout le monde attend ce sont évidemment les chansons de Rage Against the Machine. C’est chose faite sans tarder avec un « Testify » d’anthologie et son solo au cable par Tom Morello. Le guitariste arbore son fameux signe « Fuck Trump » sur le dos de sa guitare et est lui aussi bien survolté comme à son habitude.

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Sans faire de vague, la légendaire section rythmique Tim Commerford et Brad Wilk n’a rien perdu de son groove et nous fait jumper sur quasiment tous les titres. Personne ne tente de tirer la couverture à lui et on a vraiment l’impression d’une bande de copains se faisant plaisir en jouant les chansons des uns et des autres, en témoigne cette folle bataille de solos entre Morello et DJ Lord sur « Hail to the Chief ».

Au final les titres de Rage remplissent la moitié de la setlist et l’interprétation de Chuck-D et B-Real est satisfaisante même s’ils ne remplaceront évidemment jamais Zack. Le flow de B-Real imite vraiment bien celui du mythique chanteur et la voix plus grave de Chuck vient compléter le tableau de fort belle manière mais on sent que le frontman de Public Enemy n’est pas forcément à l’aise sur ces titres. Sur ceux de Prophets of Rage, le tout fonctionne beaucoup mieux et c’est normal en somme.

Les titres qui passent le mieux sont ceux de The Battle Of Los Angeles et notamment « Sleep Now In The Fire », au riff si simple mais tellement efficace ! On est presque frustré de ne pas avoir droit à « Calm Like A Bomb » ou « Vietnow » mais il faut évidemment laisser leur chance aux nouveaux titres de Prophets Of Rage. Ces derniers reçoivent un assez bon accueil et ne semblent pas révolutionner quoi que ce soit mis à part le funky « Legalize Me ».

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On pourrait écrire un roman sur le sujet, mais voir jouer Tom Morello c’est quand même quelque chose. Sur tous les titres, le guitariste apporte sa petite touche de folie et sans chercher à jouer un million de notes à la seconde, l’inventivité du garçon n’a pas pris une ride. Au contraire, elle est toujours en perpétuelle évolution, ses interventions sur les nouveaux morceaux ne sentent pas le réchauffé et on le sent heureux de pouvoir rejouer les titres de Rage sur scène avec ses deux anciens acolytes.

Le public accueille avec joie tous les morceaux joués et même le medley hip-hop de milieu de set passe très bien avec ce petit jeu initié par B-Real juste avant « Jump Around » de House Of Pain. Les slams ne s’arrêtent pas et c’est l’ensemble de la fosse qui saute à l’unisson, chose pas évidente à obtenir dans une salle aussi grande. Evidemment, on a le droit à quelques discours engagés bien gentils, mais qui n’ont pas grand-chose à voir avec l’esprit révolutionnaire de Rage à l’époque. On préfère retenir l’hommage sobre de Tom Morello à son ami Chris Cornell juste avant de jouer « Like A Stone » tout en laissant la foule se charger du chant.

Au final, pour ceux qui ont vu la bande sur les festivals d’été, la setlist n’a que très peu changé même avec la sortie de l’album. L’ajout de « Bombtrack » est vraiment appréciable mais le final reste lui inchangé : « Bulls On Parade » et « Killing in the Name » que B-Real qualifie de « chanson la plus dangereuse au monde ». Pas de rappel, le groupe a joué plus d’une heure trente et aura donné à ses fans précisément ce qu’on pouvait attendre. Le show est de grande qualité et voir jouer des titres aussi mythiques par ceux qui les ont composés est une sensation assez indescriptible. Reste à voir ce que le futur réserve à Prophets Of Rage car si le groupe veut s’installer dans la durée, il lui faudra trouver une formule plus pérenne que celle de la nostalgie de Rage.

Le live est disponible ci-dessous jusqu'au 11/05/2018

Setlist:
Prophets of Rage (Public Enemy)
Testify (Rage Against the Machine)
Take the Power Back (Rage Against the Machine)
Guerrilla Radio (Rage Against the Machine)
Living on the 110
Hail to the Chief
Bombtrack (Rage Against the Machine)
Fight the Power (Public Enemy)
Hip-Hop Medley
Sleep Now in the Fire (Rage Against the Machine)
Like a Stone (Audioslave)
Cathedral (Van Halen)
Know Your Enemy (Rage Against the Machine)
Bullet in the Head (Rage Against the Machine)
Legalize Me
Unfuck The World
How I Could Just Kill a Man (Cypress Hill)
Bulls on Parade (Rage Against the Machine)
Killing in the Name (Rage Against the Machine)

Photographies : © Nidhal Marzouk 2017
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe



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