Avec la sortie de Kingdoms Disdained, son neuvième album studio, il est certain que Morbid Angel était particulièrement attendu au tournant par ses fans. Après les errances artistiques et electro d'Illud Divinum Insanum, le renvoi de David Vincent (lequel a depuis formé I am Morbid), le retour de Steve Tucker et l'annulation de deux tournées européennes, les fans de la formation floridienne n'ont pas été ménagés ces dernières années. Alors Kingdoms Disdained est-il l'album qui permettra à l'Ange Morbide de revenir en état de grâce auprès de son public ?
En tout cas, les choses démarrent bien dès "Piles of Little Arms", puisqu'on retrouve le death sale et putride qui caractérise les albums du combo, que ce soit sous l'ère Tucker ou sur les quatre premiers opus. D'ailleurs le chanteur/bassiste est irréprochable sur cet album. Certes, on peut toujours lui reprocher de ne pas être son prédécesseur et de n'avoir eu qu'un rôle d'éternel remplaçant. Mais critiquer ses performances vocales sur ce Kingdoms Disdained relèverait à coup sûr de la mauvaise foi. Puissant sur le doomy "Paradigms Warped", ne manquant pas de hargne sur le premier couplet de "Architect and Iconoclast" ou celui de "From the Hand of King", Steve Tucker réalise un superbe album, à la fois côté micro, comme côté basse. En effet, la production de ce nouvel opus met clairement cet instrument en avant ("Paradigm Warped"), complétant parfaitement les riffs ciselés de Trey Azagtoth.
Concernant ce dernier, il est certain que lors des premières écoutes, peu de riffs vont se hisser à la hauteur de ceux de "Chapels of Ghouls", "Immortal Rites", "Fall From Grace" ou "Rapture". Mais l'atmosphère qui colle à ces onze compositions transpire l'ADN de Morbid Angel ("D.E.A.D", "Architect and Iconoclast"). Et il est indéniable que le guitariste possède sa propre patte guitaristique, qui définit à elle seule l'esprit du groupe. On peut prendre pour exemple "The Fall of Idols", qui malgré un solo légèrement brouillon sur le pont, reste sombre et rapide à la fois.
Comme souvent, Trey a su s'entourer d'excellents musiciens additionnels, notamment en la personne de Scott Fuller (batterie). Ce dernier propose un jeu varié, puissant, rapide ("Piles of Little Arms", "Garden of Disdain") et percutant ("Paradigm Warped"), sans chercher à singer ses illustres prédecesseurs à ce poste, Pete Sandoval et Tim Yeung, chose particulièrement étonnnante vu son jeune âge.
Sur Kingdoms Disdained, l'écart qualitatif avec le précédent opus est tel que l'on ne peut que savourer chacune de ces compositions, qui nécessitent toutefois plusieurs écoutes avant de pouvoir les apprivoiser. Mais une fois cet effort fourni, l'amateur de Morbid Angel toute période confondue pourra se rendre compte du travail réalisé par le musicien et son leader en tête.
Le seul point de reproche concernant ce nouvel album pourrait porter sur les soli d'Azagtoth, parfois peu inspirés ("The Righteous Voice") ou presque brouillons (les sonorités de guitare à la fin de "Garden Disdain"). De même, on reprochera certaines longueurs dans les morceaux "The Righteous Voice" et "The Pillars Crumbling", qui auraient gagné à être un peu plus concis et directs. Certes, nous sommes exigeants, mais avec un tel retour en force et malgré un changement de line-up particulièrement marquant, Morbid Angel peut aisément remonter sur le trône du death en maîtres du genre. Un bel opus qui nous replonge aux racines du death metal, dans ce qu'il a de plus bestial et dérangeant.
Déjà disponible chez Silver Lining Music
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