L'originalité n'est pas vraiment ce à quoi tous les groupes prétendent. Et si une mode le prouve bien, c'est évidemment celle du revival, qui, ces temps-ci, fait fureur, surtout dans le thrash. Sans doute parce que ce n'est pas nécessaire dans le genre en question pour s'imposer, peut-être aussi parce que les formations aiment se faire plaisir en rendant des sortes d'hommages musicaux à leurs idoles … Les raisons peuvent être multiples. Si les plus intransigeants n'écoutent pas de thrash, les autres peuvent au moins demander à passer un bon moment, bien que le combo ne soit peut-être pas forcément non plus capable de produire ça … (ce qui serait encore bien plus grave pour le coup). Tout droit venu du Danemark avec quelques membres bien connus qui ne font donc pas figure de novices dans le style, The Kandidate est un quatuor dont l'objectif principal est le dernier : conquérir le monde à l'aide de sa puissance de feu, avec Facing the Imminent Prospect of Death.
Et pour commencer, tout cela passe par un son extrêmement bien huilé, confié aux mains d'experts qui savent comment mettre le son de nos scandinaves totalement en valeur. C'est bien simple, le duo guitare / batterie, s'il ne fait pas de démonstrations constantes, est littéralement propulsé au premier rang, afin de constituer la puissance de frappe dont disposent ces jeunes expérimentés. Pas question d'approximation ou d'amateurisme, le groupe désire sonner professionnel, et ça se voit. Ou plutôt, ça s'entend. Et au final, ce n'est pas plus mal car le rendu est bon, chacun disposant de son espace d'expression qui lui est bien propre. Basse et voix (bien qu'un peu sous-mixé) ne sont ainsi pas oubliées dans le mixage, à la joie des fans du genre, ainsi, tout sonne très revival, sans doute le but fixé dès le départ, une ligne directrice à laquelle The Kandidate va s'essayer tout au long de la traversée.
Car oui, tout nous rappelle le bon vieux thrash des années 80-90, l'âge d'or, et ce n'est donc pas aux musiciens les plus innovants que vous aurez à faire ici. Cependant, si non seulement les codes du genre sont parfaitement respectés et joués, ces danois se permettent également d'ajouter une forte dose de hardcore afin de donner un second souffle à la musique délivrée. Ce qui résulte bien sûr d'un mélange qui, s'il n'est pas atypique, sonne quand même très efficace et accrocheur, massif, servant ainsi de bon défouloir. La musique est facilement mémorisable, et les pistes, quant à elles, sont très courtes. Pour preuve, reprenant cette caractéristique chère au hardcore, les morceaux sont très courts, le plus long (et probablement le plus technique) durant … 3:50 minutes (« Let the Maggots Have It »), pour une durée totale de 31 minutes. Pour les allergiques aux longueurs du metal progressif, on le recommanderait presque comme remède miracle (même si le To Live and Die For des néerlandais d'All For Nothing peut très bien faire l'affaire également).
Hélas, trois fois hélas, les défauts pressentis se révèlent au fur et à mesure de l'écoute. Une légère monotonie dans les structures est à déplorer, le combo ne sortant que très rarement des sentiers battus, sur « Let the Maggots Have It » notamment. Ainsi, tout s’enchaîne avec exactement la même rage, mais quelques titres peuvent faire retomber l'enthousiasme initial. De plus, la linéarité de certains riffs peut en exaspérer plus d'un, une légère impression de répétition là aussi devenant une sentence passablement lourde à supporter sur des épaules si frêles et encore juvéniles (bien qu'ils aient de l'expérience d'autres formations, The Kandidate n'existe que depuis 2009). Qu'est-ce qu'il manque encore à ce tableau ? Le jugement est sévère, et bien que la qualité soit globalement là, il est à déplorer un léger manque d'identité. En effet, ce côté déjà entendu surveille constamment l'auditeur lorsqu'il entame l'écoute d'un nouveau titre de cette galette. Difficile de pouvoir pleinement se démarquer dans ces conditions, bien que, dans l'ensemble, le bilan soit plus qu'intéressant.
"Et merde, pourquoi on a sorti cet album ?"
Et c'est pas comme s'ils n'avaient pas une voix à la hauteur, histoire de redorer leur blason. Après tant de critiques envers ces scandinaves, il faut bien leur octroyer à nouveau des qualités. Parce que oui, non seulement sur le plan musical, on en trouve plus d'une, mais question chant, Jacob Bredahl (ex-Hatesphere) excelle tout simplement, dans un chant typique pour le genre, qu'on identifierait bien au hardcore très souvent, ravageur et hargneux. Sa voix ne varie pas toujours suffisamment, mais elle est assez puissante et expressive pour que l'on puisse passer largement au-delà de cet aspect technique qui en deviendrait presque dérisoire. Ceux à qui ce frontman manque dans son ancien groupe risquent, ici, de se faire relativement plaisir en entendant à nouveau son timbre et son charisme. La conviction qu'il met dans « Fucked in the Search For Life » et son exploration des tons agressifs de « Beyond the Mind, Sleep You'll Find » en font l'une des figures de proue du style. Voilà de quoi conforter les bonnes sensations du début.
Le principal problème rencontré devant les morceaux, c'est leur homogénéité. Structurellement, stylistiquement, tous usent de la ficelle hardcore / thrash / death avec plus ou moins de succès. Néanmoins, deux se démarquent très nettement par rapport aux autres. « Beyond the Mind, Sleep You'll Find » propose la partition de guitare la plus intéressante et les variations les plus affirmées, quant à « Let the Maggots Have It », elle sert d'aération salutaire, là où certains peuvent friser la saturation devant un plat parfois légèrement trop réchauffé. Parce qu'ainsi, d'autres pistes paraissent bien moins reluisantes. Sans être mauvaise, « One and Alone » laisse de glace, trop simpliste, indigne des autres. On rattrape largement « Modvind », qui, elle, ne cache pas son amour pour Entombed, une influence elle aussi assez visible de long en large.
Détailler plus pour un tel disque serait inutile tant il se comprend aisément, mais possède une durée de vie finalement plus longue que prévue, grâce à son côté rouleau compresseur et le dosage assez fort d'éléments hardcore, voir punk. Facing the Imminent Prospect of Death a presque tout pour ravir les amateurs du genre, mais à un moment, les danois de The Kandidate devront demander bien plus. Inutile cependant de bouder son plaisir : l'écoute est agréable, et le disque tient avec le temps. Mais il manque encore le petit truc qui fait toute la différence ...
