Ambiance kitsch et retro ce jeudi 15 mars à La Laiterie de Strasbourg, c'est Carpenter Brut qui vient donner un concert haut en couleur à l'occasion de sa tournée Leather Patrol Tour 2018. L'incoutournable de la synthwave joue ce soir à gichet fermé, mais il laisse à Youth Code le soin de chauffer la salle.
Youth Code
Définir l'identité musicale de Youth Code n'est pas chose facile, à la croisée du post-punk et de l'industriel, le groupe brasse de nombreuses influences qui se marient pour donner naissance à une solution explosive, mais quoi de mieux pour un groupe que de se définir par lui-même ?
« We're from California, we smoke weed, and fuck Donald Trump. », cette phrase prononcée à Strasbourg par la chanteuse résume parfaitement leur attitude scénique et leur musique : un son très travaillé, des paroles politiques mais surtout une musique qui s'affranchit de carcans spécifiques et qui se développe sans autres limites que l'esprit de ses musiciens.
Youth Code joue à Strasbourg devant un public timide sans se laisser démonter, Sara Taylor, la chanteuse, est dans un mouvement constant d'un bout à l'autre de la scène alors que son chant crié et singlant vient supporter la musique hurlante de Ryan George. Mais leur attitude agressive peine à se retrouver dans l'auditoire qui semble rester de marbre face au projet des deux Américains.
Et malheureusement ce public clairement venu pour Carpenter Brut ne se réveillera pas du concert. Youth Code avait pourtant tout, l'énergie, l'ambiance, l'attitude, l'originalité, mais certaines de leurs influences sont peut-être la raison de la réticence des spectateurs. Dans un contexte plus adapté à leur musique, les Californiens auraient sûrement eu plus de chance.
Carpenter Brut
Après une courte pause et un passage d'"Africa" de Toto, la salle est à nouveau plongée dans le noir, cette fois pleine à craquer et prête à accueillir le trio de musiciens. Sur l'écran se profilent des cryptogrammes qui laissent apparaître un texte à mesure que les musiciens montent sur scène. "Leather Teeth" est lancée et les premiers rangs ne tardent pas à se dévouer à la musique de Carpenter Brut.
Mais la timidité règne toujours dans La Laiterie, il faut attendre "Roller Mobster", le troisième morceau du set, pour que le public se réveille et commence à se donner. "Beware The Beast" vient ensuite à résonner, accompagné d'images humoristiques sur l'écran de fond et mettant en garde contre le satanisme. Le tube de ce nouvel album pose l'ambiance frénétique qui restera en suspens parmi l'auditoire jusqu'à la fin du concert.
Carpenter Brut joue la carte de l'intensité plutôt que de la longueur. Le set est très court, une heure tout au plus, mais il concentre tout ce qui fait la puissance du tenor de la synthwave, ses morceaux plus pêchus, ses tubes, - on pense notamment à "Turbo Killer" ou "Meet Matt Stryker" - et ses morceaux plus « chill » dont "Paradise Warfare" et son sublime solo de saxophone.
Ces titres sont accompagnés d'une scénographie haute en couleur, d'images toutes plus années 80 les unes que les autres, frôlant l'obscénité et transpirant le kitsch de tous les côtés. L'écran ajoute vraiment du cachet au concert, il retranscrit précisément le riche univers visuel de Carpenter Brut qui puise ses références dans une pop culture parfois à la limite du parodique.
Arrivée à la moitié du concert, l'entièreté de la salle semble conquise par le show qui lui est proposé, l'euphorie est totale, collective et se propage jusque dans les gradins où l'on peut apprécier avec un œil alléché les images fournies par Carpenter Brut. Le fait d'avoir trois musicien sur scène, un guitariste, un batteur et une claviériste - qui n'est autre que le cerveau du projet - donne un ton très organique à cette musique qui paraît au premier abord purement électronique.
On peut profiter de nouvelles nuances grâce à une balance presque parfaite et un volume sonore adéquat, ce qui rend le tout moins compact qu'en studio et plus "libéré". La guitare se fait une place plus importante dans la musique, moins fondue que sur les titres studio, les riffs accentuent l'énergie déjà calibrée par le beat de batterie et les sons gores de certaines parties de synthés. Carpenter Brut peut alors développer toute sa puissance et ses mélodies catchy agrémentées par cette guitare très présente mais non pas envahissante.
Dans un anonymat partiel - les musiciens jouent majoritairement dans l'ombre - , Carpenter Brut propose un show bourré d'énergie, justement calibré, d'une durée parfaite, sans longueurs et taillé spécialement pour cette tournée. Comme tous les soirs, la frénétique reprise de "Maniac" clôture le concert et vient totalement embraser la fosse. Carpenter Brut sait comment conquérir les foules, et il semblerait que le pari ait été encore réussi à La Laiterie.
Setlist:
1. Leather Teeth
2. Division Ruine
3. Roller Mobster
4. Beware The Beast
5. Wake Up the President
6. Chew BubbleGum And Kick Ass
7. Turbo Killer
8. Paradise Warfare
9. Cheerleader Effect
10. Meet Matt Stryker
11. Monday Hunt
12. Inferno Galore
13. SexKiller on the Loose
14. Disco Zombi Italia
15. Hairspray Hurricane
16. Le Perv
17. Maniac (Michael Sembello cover)
Photos: © Valentin Laurent (Hysteria) 2018.
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe.