Lieu culte pour les groupes locaux, le Rack'Am est une salle de concert de Brétigny-sur-Orge qui, du haut de ses 25 ans, a vu passer quelques noms sympathiques sur ses planches, des noms tel No One Is Innocent. C'est donc « À la maison » que l'organisation du Download Festival et Live Nation ont choisi d'organiser ce Download Project #1. Ce soir, la salle de 350 places accueille trois groupes locaux, dont Wakan Tanka, qui se produira en juin prochain sur les planches du DL.
Un peu plus qu'un concert, c'est une petite fiesta joviale et bon enfant qui se dessine ce soir dans le petit bâtiment qu'est le Rack'Am. Outre les trois groupes qui s’apprêtent à se produire, on note la présence des Maires de Brétigny-sur-Orge et du Plessis-Pâté. Ce sont d'ailleurs ces élus qui ouvrent le bal par un court discours plein d'entrain. L'occasion de poser quelques questions...
Nicolas Méary, Maire de Brétigny-sur-Orge
"Lorsque l'on apprend que ce type d'événement va se dérouler dans sa ville on est à la fois fier et un peu circonspect"
Pour la ville de Brétigny-sur-Orge, quel a été le bilan de l'édition 2017 du Download Festival ?
Nicolas Méary: Un bilan épatant ! C'était une première édition donc forcément on se pose toujours des questions pour savoir si tout va bien se passer, et tout s'est très bien passé. Nous avons eu la chance d'avoir des partenaires assez extraordinaires, des partenaires comme Live Nation que je trouve très professionnels. En tant que Maire, c'est la première chose qui me préoccupait : Quels problèmes pourraient avoir lieu ? Quelles difficultés ? Et tout s'est très bien passé. Après c'est tout bête, c'était un événement international qui donnait de l'ampleur et de l'envergure à notre commune et à notre territoire. L'occasion de découvrir des groupes et beaucoup de choses. En tant que Maire, ce qui m'a beaucoup touché c'est le regard optimiste et positif sur la ville qu'ont donné les personnes présentes, tout simplement.
Justement, lorsque l'on est Maire comment voit-on un événement qui s'axe autour d'une musique qui n'est pas forcément la plus médiatisée ?
Lorsque l'on apprend que ce type d'événement va se dérouler dans sa ville on est à la fois fier, car c'est un événement très important, et un peu circonspect, je l'avoue (rires) ! Parce c'est un public et une musique que je connaissais forcément, je commence à tout découvrir. Et c'est un public jovial, positif, sympathique et passionné.
Quelles sont les attentes pour l'édition 2018 ? Est-il également trop tôt pour parler de 2019 ?
Nos attentes de cette année sont, tout d'abord, qu'elle se passe aussi bien que l'édition 2017. Nous sommes à nouveau ravis d'accueillir des groupes, et notamment un de ma jeunesse : Guns N' Roses. Je trouve cela épatant que cela puisse avoir lieu dans ma ville. Quant à une édition 2019, je peux juste vous dire qu'il s'agit de notre objectif (rires) !
So'n
Et si Muse se mettait à faire du southern/folk ? Peut-être est-ce là le défi que se sont lancés les trois garçons qui composent So'n, premier groupe à se produire. Sous des samples planants et des lights bleues, le trio se met en place face à une fosse à moitié remplie mais attentive à cette mise en scène simple et convaincante. D'entrée, Romain « Rom » Nguyen, guitariste/chanteur, retient l'attention grâce à une voix puissante mais limpide, rappelant quelques ténors du rock-grunge comme Eddie Vedder (Pearl Jam). La mayonnaise prend assez rapidement et le public semble trouver son compte dans ce cocktail rock-pop-folk bien groovie.
À l'entame du deuxième morceau, Rom présente rapidement le groupe : « So'n signifie montagne en vietnamien, alors nous allons vous emmener vers les hauteurs ». Et c'est que l'on se voit bien en haut du montagne à savourer un lever de soleil tant l'ambiance offerte par le trio et l'onirisme de certaines mélodies prêtent à l'évasion.
La prestation n'en est pas moins énergique et chaleureuse, grâce au duo rythmique proposé par Victor Roland (basse) et ainsi que la batterie de Jérôme Marandon, notamment grâce à un jeu de grosse caisse lourd et appuyé.
On en profite d'ailleurs pour souligner l'excellente acoustique proposée par le Rack'Am ce soir qui, en dépit de son statut de salle « modeste », n'a absolument pas à rougir face à des lieux plus importants, bien au contraire.
Si quelques légers problèmes de son sont à noter en ce début de soirée, cela n'entache en rien la prestation de So'n qui, après cinq titres joués, quitte la scène avec sourire, humilité et sous les applaudissements d'un public manifestement convaincu. À noter que So'n propose un petit maxi éponyme de cinq titres et que l'on pourra les retrouver lors d'une petite tournée en Essone en mai prochain. Toutes les infos sur leur page Facebook.
Il est temps d'aller à la rencontre des huiles du festival pour en savoir un peu plus sur cette édition 2018…
Armel Campagna, directeur du Download Festival
"L'idée c'est que 2018 soit encore plus peace que 2017."
Salut Armel, alors content de cette petite soirée en terres essonniennes ?
Armel Campagna: Très content, je ne peux pas dire le contraire ! Dans l'absolu, pour une première, on ne savait pas à quoi s'attendre et là c'est carrément cool ! Avec l'équipe, j'ai eu envie d'initier ça dans trois salles du coin : L'Empreinte à Savigny-le-Temple, Le Plan à Ris Orangis et bien évidemment le Rack'Am de Brétigny, il fallait commencer ici. Trois groupes, locaux, dont Wakan Tanka qui va ouvrir la MS2… L'ambiance est excellente, nous sommes satisfaits !
Après la soirée au Dr.Feelgood à Paris, c'était important de faire des événements en Essonne ?
Paris c'était surtout pour la presse. On est en Essonne, c'est le plus gros festival depuis la création du département. Notre but, c'est aussi de promouvoir des jeunes talents locaux. On se doit de rendre la monnaie aux groupes du coin.
Parlons de l'édition à venir, quelles leçons as-tu tirées du DL 2017 ?
Beaucoup. Grâce surtout à un public très averti qui fait énormément de festivals et qui sait ce qu'il veut. Nous savons ce qui n'a pas marché : En 2017 il a fait très beau, heureusement, mais on a vite compris que nous n'avions pas assez de zones d'ombre, un trop gros temps d'attente sur les bars le samedi et ce n'est pas bon pour un festival. Pour une première on est très contents. Qu'est ce qu'il y aura cette année ? Plus de déco, plus de signalisation, plus d'orientation, plus de volume, plus de services, un camping plus grand et encore plus fun avec des bars, des points food. L'idée c'est que 2018 soit encore plus peace que 2017. Le parking sera également plus grand, il y aura plus de navettes depuis la gare, des navettes bus depuis Paris. Les gens pensent que Brétigny c'est loin de Paris, mais non pas tant que ça. Il faut juste prendre le temps : Une heure porte à porte. Pour les campeurs on est à deux minutes du site du festival, ce qui est plutôt rare, avec une scène et un cinéma qui va passer des fils bien kitchs,,, ça vaut le coup, non ?
Grosse évolution : Un quatrième jour de festival, le pari n'est-il pas un peu risqué ?
Écoute on verra bien. Oui, c'est un pari risqué mais quand tu sais que tu as l'opportunité d'avoir Foo Fighters en exclusivité française, Les Guns qui n'ont pas joué en festival depuis cinq ans… On ne pouvait pas refuser ça ? J'ajoute que nous n'avons pas augmenté les prix… On reste à 69€ la journée, 224€ les quatre, 165€ les trois. Avec une programmation génial, ça va être le dernier show d'Ozzy. Bon oui, combien ont dit ça mais lui il semble vraiment dire que c'est le dernier (rires) ! On va se marrer et y en aura pour tout le monde.
Question un peu naïve : Comment avez-vous attrapé ces groupes dans vos filets ?
Ce n'est pas vraiment nous, les groupes ont des plannings hyper chargés. Il faut savoir que les groupes de metal ont des circuits assez connus, c'est une petit fenêtre qui se situe entre début juin et début juillet, avec dix à quinze shows en Europe et une date par Paris. Donc en gros soit ils allaient au Hellfest, soit ils allaient au DL, ils ne peuvent que rarement faire les deux.
Certains sont peut-être encore dubitatif quant à la qualité de ton festival, qu'est ce que tu voudrais leur dire ?
Il y a trop de préjugés sur le public metal et pourtant ça reste le meilleur des publics. Que ce soit les commerçants, la ville, les élus… L'année dernière ils avaient des craintes par rapport à cette foule qui allait arriver. Et cette année ils en redemandent, c'est peace, c'est familial, c'est une expérience à part entière. Avec une programmation exceptionnelle par rapport aux autres festivals d'Europe, j'invite ceux qui se demandent à comparer. Et je crois qu'on est un des seuls festivals, aux portes de Paris, dans une région qui a besoin d'événements culturels, qui offre une telle palette d'artistes. Je vous invite tout simplement à une grosse bonne fête.
Odd Fiction
Amis du burlesque, du second degré et la dérision, bonsoir ! C'est avec un goût amer dans la bouche que l'on arrive à la prestation de Odd Fiction puisque notre entretien avec Armel a quelque peu débordé sur le début du set du quatuor. Et l'on est un peu déçu de ne pas avoir pu assister à l'entrée en scène de ces oiseaux tant le visuel de ces derniers semble travaillé. Outre ce visuel, on ne peut qu'être attentif aux instruments : basse cinq cordes, guitare huit cordes… Est-on sur le point d'assister à un cours de mathématique ? Eh bien oui ! Cela se voit, cela s'entend. Odd Fiction semble être un fameux mélange d'Animal as Leader et Meshuggah. On note au passage que la bande propose une musique instrumentale, chacun se concentrant ainsi sur la technique : les distorsions et les tapping vont bon train. La fosse est plutôt réceptive et l'ambiance s'avère bien plus « hot ».
Mais contrairement aux deux influences citées précédemment, le groupe assume humour tranchant et percutant ; les déclarations sont toujours l'occasion de provoquer quelques éclats de rire : « Heu bon, désolé, c'est un morceau que l'on a pas eu le temps de finir ». Couplées à une gestuelle et une attitude dans la même veine, ces déclarations font mouche et le fait est que l'on passe un excellent moment en compagnie de ces bonhommes carrément dans le coup et totalement investis dans leur set.
Si So'n voulait faire voyager son public vers les hauteurs, Odd Fiction l'a complètement envoyé dans la stratosphère. Nul doute que la bande a glané quelques nouveaux fans durant ce concert. Pour les autres, une visite sur leur excellent et tout aussi déjanté site internet s'impose.
Wakan Tanka
Retour à un registre beaucoup plus sérieux puisque c'est Wakan Tanka qui s'installe face à un Rack'Am désormais copieusement rempli. Et c'est donc ce trio qui a été choisi pour jouer lors du Download Festival 2018. Hors de question pour ces messieurs de se reposer sur leurs lauriers et c'est un groupe déterminé qui monte sur la scène. Premier constat : l'accueil réservé au combo est des plus chaleureux et bruyant ; WT semble donc disposé d'une fan-base solide ce qui laisse imaginer un show des meilleurs qualités. Autre constat : pas de bassiste, le troisième luron s'installe donc derrière un arsenal d'appareil de programmation et claviers.
Difficile de décrire la musique de Wakan Tanka tant celle-ci pioche dans différents mouvements : funk, soul, stoner, metal… Un énième groupe qui n'a « pas de frontières » diront certains. Mais ce soir on a envie de dire que c'est une formation qui maîtrise ses choix et l'ensemble, des plus cohérents qui, pousse à la fête et la bonne humeur. Outre son statut de chanteur, Erwan encense le show grâce à un jeu de guitare éclectique oscillant entre efficacité et recherche ; notamment lors des parties les plus funky jouées ce soir, ou encore d'autres sonorités plus électro (toujours cohérentes avec la base rock) qui invitent à se mouvoir tranquillement.
Le chant d'Erwan colle parfaitement à l'ensemble, se montrant même parfois impressionnant avec des montée qui rappellent un certains Robert Plant. Le public est, encore une fois, en feu et les trois bonhommes se montrent carrés et humbles ; peut-être un peu impressionnés par la réaction de la fosse.
Au termes de 45 min bien psychées, Wakan Tanka salue le Rack'Am et sans aucun problème que l'on peut dire que le groupe est plus que jamais armé faire passer un bon moment aux futurs festivaliers. C'est bien tout le mal que l'on peut leur souhaiter, rendez-vous le 18 juin !
Après cette très belle prestation, il est temps de poser à (très) chaud quelques question à Wakan Tanka...
Entretien avec Wakan Tanka
Bonsoir messieurs, vos impressions sur cette soirée ?
(personne n'ose parler mais tout le monde rit)
Chris (batterie) : Cool !
David (claviers) : Très grosse ambiance, beaucoup de monde... Nous avons fait des tests et pris des risques. Des choses ont payé, d'autres sont à travailler.
Chris : On dirait la sortie d'un match de foot avec l'entraineur (rires) !
Erwan (guitare/chant) : Nous avons travaillé en résidence, je pense que le set à plutôt bien marché. Mais vraiment, on ne s'attendait ni à autant de monde, ni à une telle réaction.
Pouvez-vous nous présenter votre groupe rapidement ?
Erwan : Nous jouons ensemble sous ce nom depuis trois ans. Le délire de Wakan Tanka, Le Grand Esprit, c'est quelque chose de massif, omniprésent, que l'on peut retrouver partout. C'est aussi une forme de rite initiatique qui amène l'auditeur à l'introspection.
Chris : Nous sommes très ouverts au niveau des influences, nous ne disons jamais non au test. Disons que différents styles comme le stoner, l'électro, la pop, du funk viennent se greffer à une base rock. Il n'y a pas vraiment de limites.
David : Nous nous inspirons de tout ce que nous écoutons et nous nous faison découvrir des choses mututellement, c'est comme un jeu. Et dès que l'on dévouvre un nouvel artiste, nous cherchons des inspirations.
Chris : Autant du Philippe Katerine que du Justice (rires).
Pas de bassiste, donc ?
À la base ce n'est pas un choix, et nous n'avons jamais trouvé de bassiste disponible à temps complet. Du coup nous l'avons remplacé par d'autres sons et l'on a vu que ça fonctionnait bien.
Chris : Parfois les contraintes deviennent libératoires. Nous avons essayé de trouver d'autres moyens, de là est venu le synthé et l'electro. Cela donne une couleur et au niveau des personnalité ça passe très bien entre nous trois, on se débrouille très bien. Pas besoin de rajouter, ça marche bien comme ça.
En tant que musicien essonniens, que représente un événement comme le Dowload ?
Chris : C'est cool et ça fait du bien que ce genre d'événements ne se limitent plus qu'à la capitale ou sa grande proximité. Les gens de la région parisienne écoutent et jouent de la musique, écoutent du rock.
Erwan : C'est génial que ce festival soit en banlieue. Cela créer de la dynamique et cela permet des partenariats avec les salles du coin et des événements comme celui-ci.
David : C'est assez dingue de voir d'aussi grandes stars si proches de chez nous.
Vous allez donc passer sur la même scène que ces stars le 18 juin prochain. Quelle est votre histoire avec le Download ?
Erwan : On a fait pas mal de concerts dans le coin et nous étions les parrains du tramplain du Rack'Am. Il y a eu un partenariat entre le Download et le Rack'Am, et la salle nous a choisis pour la représenter au Download.
Chris : Nous sommes bien implantés dans les salles locales, il y a eu pas mal de coups de pouces de ces salles. Nous avons été bien drivés et préparés, nous n'avons pas été livrés à nous-même. Ils nous ont choisis mais ne nous ont pas lâchés.
Comment appréhendez-vous cette date ?
Erwan : Beaucoup d'excitation et beaucoup de pression. On va dire que c'est un beau gros coup de pied au cul. On était assez relaxes et on se concentrait sur la composition pure cette année et après avoir entendu cette nouvelle on a acceléré le mouvement. Et après le concert de ce soir, on voit qu'effectivement des choses fontionnent et d'autres moins. C'est cool, ça nous donne un nouvel axe de travail pour affuter le couteau, être prêts techniquement et ne rien regretter ce jour là.
Eh bien que vous faut-il travailler d'ici la date fatidique ?
Erwan : Plus de fluidité, que tout se passe et créer une sorte de magie sur scène. C'est encore une fois comme un entraînement sportif finalement. Il va falloir rester bien concentré.
Chris : Dès que l'on a monté ce projet, on a eu cette volonter de professionnalisation, cette date a été un choc, mais ça confirme nos envies et notre projet. Nous allons pouvoir aussi nous préparer à l'après Download.
Du coup quels sont ces objectifs ?
Erwan : Je crois que cela se passe déjà, dès maintenant. Oui nous avons une belle opportunité, il faut bien l'utiliser pour aller vers les partenaires qui voudraient travailler avec nous. Le show sera entièrement filmé, ça nous fera un bon support de promotion. Tout de suite après on enchaînera une tournée en Bretagne.
Face au beau succès de cette soirée, que voulez-vous dire aux gens susceptibles d'apprécier votre musique ?
David : Ce que l'on voudrait dire aux fans c'est : venez kiffer avec nous. On aime le gros son et des phases plus cools, c'est bon délire !
Chris : Venez, on est gentils (rires) !
Photo : © 2018 Nidhal Marzouk
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