“Peu de groupes de rock qui parlent de James Brown... et je pense que c'est ça le problème aujourd’hui!”
A l’occasion de la sortie de Family Tree, septième album du combo, nous avons rencontré Chris Robertson et Jon Lawhon, guitariste-chanteur et bassiste de Black Stone Cherry. Ils nous parlent de ce nouvel album, de son aspect très familial, et de leur collaboration avec Mascot Records!
Merci de nous accorder cette interview. Comment vous sentez-vous à l’approche de la sortie de Family Tree?
Chris: La sortie d’un nouvel album est toujours un peu stressante, même si c’est différent à chaque fois. C’est un bon stress, mais il y’a toujours une part de toi-même qui se demande comment il va être reçu.
Vous-vous sentez confiants?
Chris: Oui, c’est l’album le plus fort qu’on ait pu sortir jusqu’à présent. Je n’ai jamais été aussi confiant pour la sortie d’un album que pour Family Tree.
Votre précédent album était beaucoup pessimiste, on sent avec Family Tree un aspect beaucoup plus optimiste et moins agressif.
Chris: On était évidemment dans un état d’esprit différent lors de la composition de Kentucky, on était remontés contre notre ancienne maison de disque. Avec ce nouvel album Family Tree, on se sent vraiment à notre place, et il n’y a rien de mieux que de se sentir confiant et à l’aise avec ce que l’on fait. On voulait juste s’amuser et faire un album qui donne envie de danser!
C’est important pour vous d’explorer de nouvelles tonalités sur chaque album?
Chris: Oui, bien sûr. Avec cet album, c’est comme si nous nous étions trouvés, on fait ce qu’on a toujours voulu: du rock, classique, sans sous-genres. Ce n’est pas du heavy rock, du hard rock, c’est juste du rock’n’roll. Un retour à quelque chose qui swing.
John: On est souvent décrit comme un groupe de rock sudiste, mais ça c’est juste parce qu’on parle bizarrement. (rires)
C’est votre deuxième album avec Mascot Records, comment se passe votre collaboration?
Chris: Très bien, on aimerait vraiment continuer à bosser avec eux pour le reste de notre carrière.
Jon: Le patron de Mascot Records, Ed, est avant tout un vrai fan de musique, pas un businessman, c’est quelqu’un de super sur le plan humain.
Chris: Il entretient vraiment un climat de confiance avec tous les employés, mais aussi avec les groupes. C’est une fierté de travailler avec Mascot Records. Je souhaite vraiment à tous les groupes de vivre ça, de pouvoir travailler dans ces conditions.
Vous vous sentez plus libres aujourd’hui?
Chris: Oui ils nous ont clairement dit de faire un album comme nous le sentions. Un album qui nous corresponde vraiment. On ne nous a pas dit “ok, écrivez ce genre de morceaux, comme ci, ou comme ça”, ce qu’on a eu auparavant avec d’autres labels. Ils nous font confiance, on leur fait confiance, et le résultat est un bon album et un bon travail d’équipe!
Jon: Kentucky était notre premier opus avec Mascot, on était juste tous les quatre, à bosser sur l’album. On est parti sur le même principe pour celui-ci, mais il y a une grosse différence entre les deux. Il y avait vraiment une raison pour que notre précédent album soit plus agressif. Family Tree est plus posé, nous sommes plus libres et on a eu le temps d’assimiler tout ça depuis. Ce nouvel opus est un concentré de nous, notre personnalité, et d’où nous en sommes musicalement.
Chris, tu as décidé de mixer cet album, comment ça s’est passé?
Chris: Nous avons produit l’album, et j’ai fait le mix, chez moi. Ca a fonctionné. Quand on travaille avec quelqu’un d’extérieur au groupe, il embellit forcément votre son, mais à sa façon. Or, pour cet album, on voulait vraiment que le son reste fidèle à ce que nous faisions, et à la façon dont nous l’avions enregistré. Je pense que j’étais la bonne personne pour faire ça, je savais vraiment le son que nous voulions donner à l’album.
Jon: C’est dur pour lui de donner cette réponse, mais quand on s’est demandé qui allait mixer, on a demandé à Chris d’en faire une version, mais aussi à Kevin Shirley, qui est une des personnes les plus talentueuses pour faire ce job. On a demandé un mix du même morceau puis on a écouté les deux versions. Le mix de Kevin sonnait super bien. Mais celui de Chris sonnait comme nous. Il y avait des choses que nous voulions modifier sur les deux versions mais le mix de Chris reflétait vraiment ce qu’est Black Stone Cherry. Ca s’est plus ressenti sur ce mix que sur n’importe quel morceau que nous avons sorti auparavant.
Vous allez continuer de travailler comme ça pour les futurs albums?
Jon: On ne peut jamais vraiment savoir à l’avance. Je serais personnellement très heureux de continuer de cette façon.
Quand vous travaillez sur vos albums, est-ce que vous essayez de faire évoluer votre son, avec du nouveau matériel, de nouvelles techniques pour trouver “votre” son?
Jon: On utilise beaucoup le même matériel. Je pense que l’attitude et l’état d’esprit dans lequel on se trouve au moment de faire un album jouent un rôle beaucoup important sur notre son et nos compositions, que le type de guitare qu’on utilise. Pour cet album, on était vraiment à l’aise, nos enfants, nos femmes, venaient souvent nous voir, les amis, nos parents, tout le monde passait. Ca change beaucoup de choses d’enregistrer près de chez nous. J’habitais littéralement à cinq minutes. C’est ce qui nous permet de garder une atmosphère très familiale. Ca nous a aidé à être plus à l’aise en studio, le soir on pouvait rentrer dire bonne nuit à nos enfants. On s’est amusé, et on a pu profiter de ces avantages. Par le passé, quand on allait enregistrer nos albums notre famille nous manquait.
La famille prend une place très importante sur cet album.
Chris: Avant d’être un groupe, nous sommes des amis. Et ce qui compte le plus pour nous, ce sont les amis, et la famille. C’est facile pour nous, car ça a toujours été comme ça, on a été amis avant même d’avoir le groupe. Nous voulons tous la même chose et nous créons des chansons à propos ce que nous sommes et de ce que nous voulons.
Ton fils a même été enregistré pour les choeurs de “I Got the Blues”… Comment est venue l’idée?
Chris: Très naturellement, en fait il se promenait dans la maison en chantant ça au moment où on enregistrait l’album. J’ai trouvé ça très cool, je l’ai amené au studio, je l’ai mis devant le micro et il l’a chanté. C’est quelque chose à nous, qui restera toujours.
L’enregistrement a été différent de d’habitude?
Chris: Oui, autant pour l’écriture, rien n’a changé, mais pour l'enregistrement, nous avons décidé de changer de méthode. D’habitude, on répète énormément les morceaux avant d’aller les enregistrer. Cette fois-ci nous avons répété une fois, une demo a été faite, on a demandé au batteur quelle chanson il préférait faire en premier, car la batterie, c’est toujours le plus important. On a écouté les morceaux une ou deux fois, puis on a joué! Je pense que l’énergie de cet album vient de ça, il n’y a pas cette usure liée aux nombreuses répétitions. C’est beaucoup de spontanéité.
Jon: Oui, c’était plutôt excitant d’enregistrer de cette façon, on pouvait ajouter des parties plus spontanément. On enregistrait le processus créatif, en même temps qu’on enregistrait l’album.
Chris: Les morceaux étaient assez bons à ce moment là pour ne pas qu’on gâche tout. (rires) C’est vrai, quand on a un morceau, vraiment écrit, qu’on connaît bien de bout en bout, c’est différent. Là, c’est comme si les morceaux étaient encore en formation, on ajoutait ou modifiait certaines parties.
Warren Haynes a été invité sur cet album, pourquoi ? Comment s’est passée cette collaboration?
Chris: On a tout simplement été voir Gov’t Mule, et on pu discuter avec Warren après le concert. On en avait un peu parlé. Puis on a reparlé de ça avec notre manager, qui l’a contacté. A ce moment-là, le titre “Dancin’ In the Rain” lui a été envoyé. Il a adoré le morceau, ça a commencé comme ça. Ensuite, tout ce que je sais, c’est que je me suis retrouvé au téléphone avec Warren Haynes pour parler de l’enregistrement, et il me donnait ses idées. La semaine suivante, il enregistre et je reçois ses pistes… Ça donne vraiment quelque chose d’incroyable... Ce que je veux dire par-là, c’est que ce n’est pas tous les jours qu’on a un de ses héros qui participe à la création d’un morceau sur son album. Plus j’écoute ce morceau, plus je trouve ça énorme.
Jon: Quand j'ai reçu une version du morceau, je me suis vraiment posé pour prendre le temps de l'écouter. Au bout de seulement quelques instants je savais que c'était ça, il y avait rien à redire. J'ai écouté le morceau de bout en bout 50 fois, je n'avais aucune remarque, rien, c'était parfait !
Il y a d’autres personnes avec qui vous aimeriez travailler à l’avenir?
Chris: Oui. Malheureusement beaucoup ne sont plus de ce monde. J'aurais adoré travailler avec Gregg Allman par exemple.
Y a t-il un morceau à la signification particulièrement forte pour vous sur cet album ?
Chris: Il y a ce morceau, "My Last Breathe", il s'agit de moi, m'adressant à mon fils. A propos de sa mère, moi, le décès de son grand-père, des choses très personnelles. Tout ce morceau, c'est vraiment: et si je vivais mes derniers instants, qu'est-ce que je dirais à mon fils?
Jon: Le même morceau pour moi. Je me reconnais beaucoup dans les paroles de Chris. Il y a vraiment un constat de la vie, puis une question: qu'y a-t-il à en tirer? C'est à ce moment que la voix de notre choriste intervient et c'est un instant que je trouve réellement chargé d'émotion. A chaque écoute, c’est toujours aussi fort.
Chris: C'est aussi un bout du morceau que j'adore. Si je devais retenir un morceau dans ma vie, ça pourrait être celui-ci.
Vous avez un morceau appelé "James Brown" sur cet album, vous avez beaucoup d'inspirations soul ?
Jon: Oui certainement plus que les gens ne peuvent le penser!
Chris: Oui bien sûr, de grosses influences comme Wilson Pickett, Otis Redding, tout ce qui tourne autour de la Motown. On apprécie beaucoup de genres de musique, ils nous nourrissent. Peu de groupes de rock qui parlent de James Brown... et je pense que c'est ça le problème aujourd’hui !
Et pourquoi spécialement James Brown?
Chris: C'est le “godfather of soul”. (Rires) James Brown est vraiment la rock star de toutes les rock stars. Son nom est vraiment venu naturellement au moment de la composition et le refrain en a découlé tout aussi naturellement. Ça a fonctionné.
Jon: Je pense que le nom de James Brown est venu naturellement grâce à la tonalité et l'univers de la musique nous avions composée au préalable. C'était déjà très influencé par lui. On est parti de cette influence mais sans vouloir parler de lui à la base.
Parlons rapidement de votre EP "Back to Blues", d'où vient ce projet d'album de reprises ?
Jon: On a toujours voulu faire un album de reprises. On est globalement très influencé par le blues. Je crois que c'est Chris qui a commencé à mentionner ça. Puis on l'a rappelé en se disant "tu veux vraiment faire ça?" (Rires)
Chris: J'ai toujours voulu faire ça et d'un coup ça a été ok, le label a appelé, puis c'était bon. Le blues est une partie de notre son. Le rock vient en partie de là. C'était juste un truc cool pour nous. Ça nous a inspiré et permis de voir notre musique sous un nouvel angle.
Jon: Ca nous a également permis de retrouver nos anciennes influences.
Chris: Le but est vraiment de faire une musique qui remue les gens. Et pas uniquement en headbangant. Le choix de l’EP était vraiment pour ne pas faire un album entier. On aurait pu, mais c'était plus cool pour nous de rester sur un format d’EP.
Jon: Ca a été numéro 1 des charts pendant un moment. On était super heureux que les gens adorent cet EP autant que nous.
Quels sont vos prochains projets pour les mois à venir?
Chris : Tournées, tournées, tournées, pour le reste de l'année. On va revenir faire une tournée européenne!
J’ai une dernière question pour vous deux: si vous aviez à choisir deux albums qui ont changé votre vie, vous choisiriez lesquels?
Chris: Jimi Hendrix, Are you experienced, mon premier album reçu un Noël. Puis Legend, la compilation de Bob Marley.
Jon: Les Beatles, Abbey Road et Robert Johnson, la collection entière. Je connaissais mais je n'avais jamais vraiment écouté. Ça m'a pris et j'ai tout écouté en une journée. Et ensuite c'est resté plusieurs semaines je ne pouvais plus décrocher!
Merci à tous les deux pour cette interview!