Skindred, c'est un peu la quintessence de La Grosse Radio réunie en seul groupe : du rock, du metal et du reggae. Depuis leur création en 1998, les Britanniques ont testé diverses recettes alliant, généralement avec beaucoup de réussite, ces trois ingrédients. Ils reviennent avec un nouvel album, Big Tings, qui fait la part belle à ces trois genres musicaux, et y ajoute une dose généreuse de pop et d’electro.
La fusion des genres a toujours été très prisée dans le metal, mais le reggae est un style qui se mêle moins souvent aux musiques extrêmes. Skindred a pourtant fait de ce mélange sa force et sa renommée, et applique cette formule depuis deux décennies, l’enrichissant de rock et d’electro.
Le titre d’introduction éponyme de ce nouvel album Big Tings, laisse un peu perplexe : il est beaucoup plus léger que ce à quoi Skindred nous a habitués, il y a quelque chose de presque pop rock (en plus consistant, tout de même) dans l’ambiance de ce titre. Les arrangements sont très electro, avec un rythme cadencé, des chœurs que ne renierait pas Fall Out Boy, et le chant toujours si particulier de Benji Webber, parfois lancinant, parfois crooner. L’ensemble est étonnant, groovy, avec un esprit plus dance que metal.
La suivante, "That’s my Jam", change un peu d’univers, avec un début très rock 'classique', avant que le refrain ne revienne vers quelque chose de plus heavy grâce à un chant de metal mélodique, dans lequel on peut trouver des relents de reggae, et à un rythme plus direct. Les chœurs féminins tranchent avec le chant dance hall du break et les arrangements classiques pour le groupe sont rehaussés par un clavier atypique qui oscille entre une sirène de pompier et une cornemuse. Le titre est indéniablement efficace et semble avoir pour ambition d’envoyer tout le monde sur la piste de danse. On retrouve le potentiel addictif du groupe exploité à plein.
Nouveau changement d’ambiance avec "Machine", qui joue la carte du punk énervé avec miaulements furieux de Webbe et riffs de guitare bien saignants de Mikey Demus. Là encore, l’ensemble est dansant et entêtant, en partie grâce aux chœurs omniprésents qui donnent une légère touche pop punk. L’alliage de ces différents éléments donne l’impression que No One Is Innocent a copulé avec Fall Out Boy (non, vraiment, n’essayez pas de visualiser l’image dans son sens littéral, vous allez vous faire du mal).
Le groupe a définitivement misé sur les chœurs, aussi bien féminins que masculins, mais toujours bien vénères et avec un soupçon d’étrangeté bienvenue (les "Let’s go" sur "Last Chance", les "Wowow" sur "Loud and Clear", le début presque tribal de "Broken Glass"…). Mais la basse groovy de Daniel Pugsley n’est pas en reste, pas plus que la batterie d’Arya Goggin. Les guitares et les claviers, tour à tour tranchants et chaloupés, sont eux aussi parfaitement en place. Bref, les arrangements sont globalement une réussite.
Certains morceaux sont assez classiques dans leur construction mélodique, mais le groupe a l’art d’entremêler des éléments issus d’univers différents pour produire un résultat qui garde leur empreinte, que ce soit quand il invite un rappeur ("Last Chance") ou quand Benji Webbe joue aux crooners.
L’album est clairement le moins metal de la formation et le plus dance pop ("Big Tings", "Alive"). Enfin, dance pop selon Skindred, cela reste tout de même suffisamment lourd, varié et imaginatif pour prendre son pied.
Et certaines chansons reprennent le cahier des charges classique du groupe, telle "Loud and Clear", avec son chant très reggae dans les couplets, ses riffs lourds qui débordent de tous les côtés et son refrain ultra percutant. Un pur classique de Skindred.
Le groupe n’en oublie pas les balades de rigueur, "Tell Me" et "Saying It Now", dont la musique et les arrangements sont certes beaux mais un peu en dessous des textes très mélancoliques et prenants, qui permettent à Webbe de montrer une autre facette de ses talents vocaux avec une interprétation intense et habitée.
Même s’il propose un album moins lourd que ses prédécesseurs, le groupe garde son énergie et son empreinte metal intactes, et arrive à innover tout en restant fidèle à son identité, ce qui n’est pas donné à tout le monde.
Quand d’autres délaissent les guitares au profit des claviers au prétexte que ce n’est plus ce que veut entendre le public, on est reconnaissant à Skindred de prouver qu’on peut mixer des genres différents, et qu’intégrer de l’electro et du rap ne signifie pas pour autant abandonner son énergie rock et son ADN alternatif. Auditeurs de tous styles musicaux, unissez-vous derrière Skindred !
Tracklist
Big Tings 3:34
That's My Jam 3:16
Machine 3:32
Last Chance 3:59
Tell Me 4:41
Loud and Clear 3:31
Alive 3:21
All This Time 3:02
Broken Glass 3:53
Saying It Now 4:35
Sorti le 27 avril chez Napalm Records.