Twilight, chapitre V : Abduction
C’est en 2016 qu’Abduction a commencé à faire parler de lui. Sortant son premier album, Une Ombre Régit les Ombres, le combo versaillais établissait la base de son univers musical ténébreux. Nous voilà deux ans plus tard et le quatuor vient de sortir un deuxième disque : À l'Heure du Crépuscule. Et s'il peut paraître cliché de parler d’album de la majorité pour décrire une deuxième sortie, disons-le d’emblée, Abduction a grandi !
Le groupe va plus loin dans tous les domaines et n’a pas peur de prendre son temps pour installer des ambiances, comme il le prouve dès le titre d’ouverture "Sous les Cendres et la Pierre", approchant du quart d’heure tout en variant les émotions. Car si (comme tous les morceaux de l’album), les débuts se veulent doux et oniriques tout en dégageant une froideur de pierre grâce à la guitare, une fois que la batterie déchaîne ses blasts, et que le chant typiquement black metal arrive, c’est un sentiment de grandiloquence qui submerge l’auditeur.
Inévitablement, une autre accalmie vient créer une éclaircie avant de mieux revenir à la violence toujours présente en filigrane et qui explose à intervalles réguliers. Voilà qui permet déjà de noter les nombreuses influences d’Abduction ainsi qu’une sorte de ligne directrice qui parcourt toute la musique présente sur cet album sans être redondante pour autant grâce à une remarquable qualité d’écriture.
D’ailleurs, afin d’éviter tout sentiment de lassitude, les Versaillais ont placé un interlude instrumental d’une minute juste après cette entrée monumentale puis enchaînent avec un titre plus concentré, "A l'Heure du Crépuscule" (affichant « seulement » six minutes au compteur) qui reprend les mêmes ingrédients que son grand frère avec toujours autant de classe, la durée permettant presque même d’accentuer le contraste entre accalmies et furies black metal.
Et alors que l’on pense connaître chaque astuce utilisée par Abduction, voilà qu’arrive "La Grande Illusion", épique par moment grâce à des riffs biens sentis et une rythmique presque guerrière. Un morceau un peu plus virulent que le reste du disque, mais la cohésion est toujours de mise juste avant un ultime moment apaisant, "Les Ailes du Temps", qui fait office d’outro de l’album. On ressort de ces 48 minutes de musique avec le sentiment d’avoir voyagé, dans l’espace et dans le temps.
Malgré un choix artistique osé, couplé à une imagerie qui pourrait sembler élitiste aux premiers abords, on se laisse vite emporter dans l’univers d’Abduction et surtout, A l’Heure du Crépuscule nous laisse cet arrière-gout si délicieux de l’album qui va permettre au groupe de s’imposer en confirmant tous les espoirs placés en lui.
Les quatre membres du combo, par la maîtrise de leurs rôles respectifs, produisent une musique dense et riche qui se laisse véritablement apprivoiser au fil des écoutes. Si les puristes du black metal vont certainement être rebutés par les passages pleins de spleen en voix claires, ils auraient bien tort de se priver d’un tel voyage.