L'enregistrement live, une étape obligatoire pour les grands ? Peut-être, peut-être pas … qui sait, après tout, ce moment n'est jamais facile. Et dans le metal symphonique, quelques uns ont tenté l'expérience. Celui qui, dans mon souvenir, est le plus marquant, reste bien évidemment le Black Symphony des néerlandais de Within Temptation. La formation avait mis les petits plats dans les grands pour satisfaire son auditoire, et démontrer une fois de plus leur excellente réputation scénique. Mais leurs concurrents directs, Nightwish, ont aussi fait leur preuve avec End of an Era, jugé emblématique bien que plus controversé sur la qualité. Au cœur de ce live, une actrice principale : la chanteuse, désormais ex-chanteuse, Tarja Turunen, qui n'est pas abattue et a décidé de se lancer en solo. Et le live, les planches, le feu des projecteurs, elle aussi, elle souhaite y avoir droit. 2012 sera l'année où ça lui sera permis avec un Act I à la couverture magnifique (bien sûr, cet aspect-là est subjectif, mais le besoin de le préciser me démangeait). Mais un CD live de la diva finlandaise, qu'est-ce que ça donne ? Cette figure de proue du genre met les petits plats dans les grands, et c'est parti pour un double CD et 24 morceaux, pour plus de 2 heures de concert.
Remarque : cette chronique ne traite pas du DVD, uniquement du double CD.
Les titres repris par la jolie Tarja sont, en très grande partie, ceux qui proviennent de sa carrière solo. Ainsi, sur l'ensemble des deux disques, ses deux opus à elle, qui portent son nom sur le haut de l'affiche et rien que le sien, sont mis en valeur, et particulièrement le dernier en date : What Lies Beneath, qui avait globalement donné une certaine satisfaction à sa fan-base, en allant piocher dans un répertoire généralement bien plus metal, énergique et puissant que sur le pénible My Winter Storm. Force est de constater que tout cela se ressent lors d'Act I, car le son, lui, place la rythmique en position de force, tout autant que le chant. Et heureusement, car cet aspect technique aide à donner une dynamique à ce live, et une qualité sonore qui n'a rien à envier à d'autres. Ainsi, voilà déjà quelques très bons points qui aident, non seulement, à profiter pleinement du plaisir d'entendre la diva chanter, mais aussi de rentrer dans l'atmosphère créée du début à la fin.
Car dans un CD live, ce que l'on est en droit d'attendre, c'est aussi une ambiance propice, qui montrerait la communion entre l'artiste et son public. Et là, c'est plutôt bien joué également, même si on aurait apprécié un peu plus d'enthousiasme de la part de la foule de temps en temps, et peut-être une communication plus éloquente de la part de Tarja. On remarque aussi que le public est soudainement bien plus actif lorsque la miss fait des reprises, qu'elles soient de Gary Moore, Whitesnake mais, surtout, de Nightwish. Un désaveux envers les propres compositions de la ravissante finlandaise ? Peut-être … Quoiqu'il en soit, il est intéressant de faire ce constat. Mais également de pouvoir entendre une réelle complicité entre le public et Tarja sur certaines parties du live. « Nemo » est le plus bel exemple, où la chanteuse laisse ses fans chanter une partie de la piste, éclipsant un peu la frontwoman, mais pour le meilleur. Car cela aide à entrer dans l'ambiance, et entre les cris ou les applaudissements (ce dont le public ne se privera pas sur « Anteroom of Death » ou « The Phantom of the Opera »), la demoiselle ne peut nier déchaîner l'enthousiasme la plupart du temps.
"Hiiii zisis Tarrrja agaiiiin"
Petit défaut tout de même : le choix de certaines pistes. Quelques unes se voient bien plus ennuyeuses que d'autres, et nous font décrocher, là où, pourtant, on accrochait auparavant. « My Little Phoenix » en seconde position est une mauvaise idée, la faute au côté un peu trop mollasson du titre. De même, si certaines ballades sont envoûtantes et permettent de profiter de la jolie voix de Tarja Turunen, d'autres sont longues … très longues, trop longues. « Crimson Deep » ne déchaînera pas les passions, ni « Boy and the Ghost ». Un autre détail nous troublera sur « The Phantom of the Opera » : la voix de l'invité, l'argentin Diego Valdez (Helker). N'évoque-t-il pas souvent quelqu'un ? Si vous pensez bien sûr à Marco Hietala, que ce soit dans le timbre et les intonations, vous n'êtes pas sourds, ni fou. La ressemblance est même troublante. La qualité du chant de Diego n'est pas à remettre en cause, car ce dernier livre une très bonne performance d'ensemble, et accompagne parfaitement Tarja, tout comme Zaher Zorgati de Myrath a su le faire avec brio lors de la dernière tournée de la demoiselle. Mais ce côté racolage des nostalgiques est un peu dommage. Cependant, au rayon des bonnes surprises, on remarquera que Tarja ne va pas trop piocher dans ce qu'elle a pu faire dans son passé chez Nightwish pour faire sa setlist. Si « Nemo » y est très logiquement, ainsi que les reprises déjà faites avec son ancien combo (« Over the Hills and Far Away » et « Where Were You Last Night »), on voit une volonté d'imposer son propre répertoire, et c'est un choix tout à fait louable de la part de la chanteuse.
D'ailleurs, penchons-nous sur Tarja elle-même. Aucun doute sur le fait que sa prestation reste très convaincante. Pour autant, elle non plus ne s'épargne pas des petites faiblesses de temps en temps. Sur « Nemo » ou « The Phantom of the Opera », des imprécisions et légères faussetés troublent l'eau cristalline. Mais on pardonne à la chanteuse. Non seulement car la tenue globale est de qualité, mais aussi pour l'aspect très authentique présent dans ce concert. Là où certain(e)s abusent de retouches pour le CD de concert, la jeune femme suit la ligne d'une Sharon den Adel : montrer ses vraies capacités, qu'importe que la perfection ne soit pas toujours de mise. Et cette attitude est nettement plus appréciable. Car non seulement, on peut profiter sans aucun mal de ce live, mais en plus, elle nous montre qu'elle aussi, à ses quelques défauts. Pas trop non plus, attention. Si c'était un live à la Simone, ce serait plus inquiétant.
Côté musical, il y a bien sûr des moments marquants. La connue de tous « Nemo » fonctionne très bien, mais le morceau le plus attrayant est peut-être « Where Were You Last Night », interprétée magistralement par Tarja, sur une piste accrocheuse à souhait, et tubesque. « Until My Last Breath » constitue un de ces moments de bonheur, car si sur album elle peut paraître fade, elle gagne une seconde vie une fois jouée scéniquement. Et la fin du CD est extrêmement convaincante, « Over the Hills and Far Away » faisant aussi l'unanimité, cette dernière étant interprétée encore régulièrement par Nightwish (et pour le coup, le morceau donne l'avantage à Tarja, là où « Nemo » fait pencher la balance en faveur d'Anette. 50/50 entre ces deux très bonnes chanteuses). « Anteroom of Death » n'est pas la meilleure composition du monde, loin de là. Mais son impact scénique est important, et, placée stratégiquement en ouverture, elle aide la finlandaise à placer le public dans sa poche dès les premiers instants. Un nouveau titre est joué, « Into the Sun », une jolie ballade où la voix de Tarja fait vibrer. Enfin, pour en mentionner un petit dernier, « Little Lies » est plutôt puissante cette fois-ci, la guitare bien placée en avant, aux côtés du chant, laissant paraître une belle énergie.
Act I est ainsi un CD live très plutôt de la part de Tarja Turunen. Les fans peuvent en faire l'acquisition sans aucun problème, ils se régaleront d'entendre cette icône du metal symphonique chanter avec ce talent que l'on connaît, et même avec les quelques petits écarts qui arrivent par-ci, par-là. Mais si la scène reste le terrain de prédilection de la diva finlandaise, on espère du prochain opus des compositions moins simplistes et banales. Et qui sait ce que ça pourrait donner en live … vivement le prochain !
Note finale : 7,5/10