Le fossoyeur enfonce le clou !
Encore eux ? Et oui, les allemands de Grave Digger sont increvables, et pour cause ! On avait déjà parlé d'eux il y a quelques semaines au détoir d'un EP intitulé Home at Last, mais quoi de plus normal au fond puisque ce mini-disque annonçait un album complet, paru ce vendredi 31 août chez Napalm Records. Clash of the Gods, tel est son titre, pour un résultat plus ou moins conceptuel sur la mythologie grecque (et l'Odyssée d'Homère en tête). De quoi raviver les férus d'histoire et de metal, nous allons être ici plutôt servis.
Les maîtres du heavy power allemand old school nous avaient laissé en 2010 avec un opus très centré sur l'Ecosse, on change donc complètement d'ambiance en renforçant le côté sombre et épique, lourd et puissant, exit au passage les cornemuses ou autres influences plus festives. Au final, seule l'introduction intitulée "Charon (Fährmann des Todes)" se pare d'une touche quelque peu médiévale ou folk, à distance cependant, un léger accordéon accompagnant une sorte de plainte narrative effectuée en allemand par le duo Chris Boltendahl/Michael Rhein, autrement dit voici le chanteur d'In Extremo venu effectuer un guest pour le moins inattendu. Après telle entrée en matière, on pourrait croire que Grave Digger s'apprête à nous surprendre comme jamais, et pourtant...
Alors certes les ambiances sont poussées vers une obscurité planante sur quelques morceaux de bravoures pour le moins profonds ("Medusa" ou "Call of the Sirens" en tête), mais cela reste du metal teuton pur jus avec même une sorte de retour aux sources vers un heavy über alles des familles. Bien évidemment, les influences du combo se situant entre Accept et Judas Priest, il ne fallait pas non plus s'attendre à une approche des plus singulières, mais là où le combo perd une plus value intéressante par rapport au précédent The Clans Will Rise Again, il gagne en ferveur virulante et en hymnes qui tiennent parfaitement la route. Dans la plus pure tradition Grave Digger, avec aucune prise de tête. Là où on pourrait sentir une évolution, ce serait plus sur l'apport d'un claviériste plus présent que jamais, le "squelette" H.P. Katzenburg diffusant même quelques soli étonnants dont ce très Jon Lord-ien/Jens Johansson-esque aller retour néo-classique sur la très convaincante "God of Terror" qui, outre cet aspect inattendu, nous offre une structure et une mélodie imparables faisant du morceau l'un des moments de choix de l'album. Autre fait intéressant, le guitariste Axel Ritt qui, arrivé en 2009, se lâche enfin totalement et apporte là aussi quelques joutes bien à lui nous rappelant justement le côté freestyle cadré de son autre groupe Domain.
On le sait, Grave Digger aime bien matraquer ses refrains dans la tête de ses fans, parfois peut-être de façon trop directe car répéter les titres sans rien rajouter niveau paroles dans ceux-ci peut parfois prêter à réflexion. Pourtant cela marche plutôt bien sur "Clash of the Gods" et son ambiance grecque au paroxysme via l'utilisation d'un bouzouki traditionnel (que l'on retrouvera également sur le bonus track "Saints of the Broken Souls") ainsi que sur "Call of the Sirens", bien qu'il semble y avoir ici un fort lien de parenté avec la chanson "The Dark of the Sun" présente sur l'album Tunes of War sorti en 1996 (on vous laissera seuls juges, mais cela parait flagrant). Cet effet répétitif semble pourtant convaincant et compréhensif dans l'approche quelque peu dramatique et noire de ces deux compos mythologiques, à ce même niveau citons "Hell Dog" pourtant presque plus "up lifting" avec son refrain faussement enjoué et la magnifique "Medusa". Meilleur morceau de l'album potentiel, très certainement, il serait même très simple de dire que nous sommes... médusés à l'écoute de ce dernier, il faut dire que son thème principal affublé d'un riff dévastatetur déchaînera plus d'une passion pour un climax épique guerrier en son chorus.
S'il reste sur une tonalité très linéaire, l'album se laisse donc écouter d'une traite sans mal, offrant quelques moments forts donc et relativement peu de moments faibles. Le seul titre un peu en dessous serait au final l'unique piste sortant du concept global, le bien nommé "The Death Angel & the Grave Digger" qui aura certainement une importance historique pour le groupe, pour une chanson se rappochant des "Heavy Metal Breakdown" d'antan avec la production actuelle (et sans faille, comme tout au long du disque). Rajoutons à cela la simpliste et très Judas Priest "Warriors Revenge" qui nous offre un heavy des familles associé aux mélodies d'un refrain proche de l'époque The Last Supper ou Rheingold et peut-être ce "Walls of Sorrow" trop cliché bien que très Troyen dans ses paroles bien menées, réhaussé fort heureusement par une mélodie bien sombre après ses couplets d'acier. Loin de dire que ces titres sont décevants, ils ne sont pour autant pas totalement à la hauteur des sus-nommés.
Pour conclure cet album de façon plus atypique, le combo allemand décide d'inclure le single "sing along" "Home at Last" en grand final (video clip ci-dessous), un hymne bien trempé dont nous avions causé lors de la sortie de l'EP et qui ne bouge ici pas d'un poil si ce n'est une introduction quelque peu raccourcie. Du grand art, qui permet de garder un goût très agréable en bouche et nous donner l'envie de relancer une galette solide et sereine pour nos oreilles de metalleux.
Alors oui ce ne sera probablement pas l'album de l'année, mais en aucun cas il ne s'agit d'une baisse de régime. Si le groupe décide de faire dans le classicisme le plus total, il en gagne certainement en profondeur et reste ainsi bluffant d'énergie à l'image de son grisonnant frontman Chris Boltendahl plus en forme que jamais. Car après tout, Grave Digger nous propose des tubes à la pelle, et c'est bien ce que l'on demande surtout dans le heavy moderne. Ainsi, même si rien ne révolutionnera le genre, on se gardera bien d'embêter la mort en personne, sous peine de reposer six pieds sous terre.
Note : 7.5/10