Grosse soirée à La Laiterie ce mardi 19 juin avec deux salles pleines, partagées entre le puissant core de Stick To Your Guns et le black ambiant de Wolves In The Throne Room. Difficile de choisir entre ces deux pointures, mais c’est Wolves In The Throne Room qui ont retenu notre attention de par la rareté de leurs passages en France, on se devait donc d’être de la partie ! Et les Olympiens ne sont pas venus transcender le Club seuls puisqu’à leurs côtés se sont dressés les deux membres qui constituent le duo de néo-folk Vradiazei.
Vradiazei
Les murs du Club tremblent déjà sous la musique d’Anti Flag lorsque le duo féminin grimpe sur scène, mais malgré l’ambiance très remuée de la Grande Salle, Vradiazei parvient à instaurer une atmosphère planante dans le petit Club de La Laiterie. Et dans une proximité à l’allure de showcase, le duo verse les flots d’une musique très émotionnelle frisant le néo-folk scandinave. Une guitare et un violon suffisent à bâtir sur des bases très solides un son complet oscillant entre dynamisme et minimalisme.
Dans un certain entrain, le groupe montre que de seulement deux instruments peut émaner un gigantisme qui n’est pas sans rappeler les grandes forêts nordiques. Celles-ci se dépeignent d’ailleurs assez aisément dans l’imaginaire de l’auditoire qui semble bercé par les accords précieux de Vradiazei dès les premiers instants du concert.
À chaque morceau son identité, à chaque morceau son ambiance, et Vradiazei n’hésite pas à passer par tous les antipodes pour assurer un concert riche en influences et en ambiances. D’une musique généreuse parsemée de voix polyphoniques et d’harmonies planantes, on passe à une mélodie plus traditionnelle et entrainante.
Cette oscillation reste toutefois cohérente et permet au public d'assister à un concert dynamique sans s'endormir (sauf pour les trois du fond qui s’échauffaient déjà à l’idée de ne pas pouvoir mosher). Peu à peu s’installe une certaine intimité entre les deux musiciennes et les personnes constituant la fosse, et ce sans qu’elles ne décrochent un mot. Seules retentissent les notes d’une musique aussi solennelle que singulière. L'ovation du public s'accentue, tout comme l'intensité du show, une intensité non pas marquée par la puissance de la musique, mais par l'âme pesante qui s'en dégage, tirant parfois une transcendance dans la dissonance, car certaines mélodies restent très proches du trve black.
Le tout reste absolument magnifique, et on ne pouvait rêver mieux comme première partie, si bien que le concert de Wolves In The Throne Room en paraitrait presque moins bon.
Wolves In The Throne Room
Les shows de WITTR relèvent plus d'une expérience musicale collective que d'un véritable concert. Encens, ambiance lumineuse chaleureuse et bande-son atmosphérique, tout est là pour faire prendre à la salle une allure de thérapie collective. Bien sûr, il n’en est rien, on parle tout de même d’un groupe de black, ambiant certes, mais de black quand même.
Après environ dix minutes de bande-son et des cris énervés émanant de l’arrière de la salle sans doute motivés par l’écrasante chaleur, les membres de Wolves In The Throne Room montent sur scène et entament leur set par un “Thuja Magus Imperium” des plus magistraux. Le ton dramatique du morceau vient flanquer une claque à la salle et installe d’emblée une ambiance riche en émotions. Son thème presque cosmique tourne dans la salle accompagné d’une double pédale réglée comme une horloge, jusqu’à ce que les blast beats cessent et donnent au public un moment de répit avant la transe provoquée par l’arrivée d’un chant déchiré.
Puis vient la cassure, le vide intersidéral. La bande-son du début reprend afin de laisser le temps aux musiciens de souffler avant de lancer la très accessible “Born From The Serpent’s Eye". Les notes si reconnaissables du début du morceau résonnent dans le public qui manifeste un fort engouement juste avant de commencer à bouger sérieusement au rythme des blasts beats.
Comme pour Vradiazei, l'écrasante dissonance du trio de guitares se transforme en un atout majeur, passeur d'un bon nombre d'émotions et d'images dans les esprits qui, au bout du deuxième morceau, ne semblent déjà plus indemnes. Un seul problème est à signaler : les pauses entre les morceaux et la même bande son consitituée de raisonnances graves et de bruits de mouvements aquatiques. Ces pauses cassent totalement le rythme et le dynamisme du concert qui retombe à chaque fin de morceau. Le public peine à rester attentif alors qu'un interlude de presque deux minutes (autant dire une éternité), se manifeste à chaque fois que les guitares cessent de jouer. L'intensité s'évapore à chaque fois, et c'est extrêmement dommage car il est très rare d'assister à un tel condensé de puissance et d'émotions.
Oui, les morceaux son très longs (aussi longs que leur titres) et oui, les musiciens doivent aussi pouvoir se reposer, mais la répétitivité de l'action et de la bande son provoquent à force une certaine lassitude. La lassitude reste pardonnée durant les morceaux qui s'avèrent tous aussi transcendants qu'en studio, voire plus en live, mais elle est présente et empêche de faire de ce concert un moment grandiose et mémorable. Le show souffre très clairement de ces coupures, et c'en est presque triste car Wolves In The Throne Room a une réelle expérience à proposer, une expérience qui plairait autant aux néophytes qu'aux habitués du genre.
C'est donc un bilan à demi-teinte qui se dresse de cette deuxième partie. D'un côté, l'originalité, l'intensité et l'ambiance font du concert de Wolves In The Trone Room une magnifique expérience, presque épuisante, mais galvanisante, et d'un autre, le concert est tributaire d'un mauvais choix, sans doute nécessaire au bon déroulement de l'ensemble. Vradiazei nous restera plus en mémoire que Wolves In The Throne Room, bien que ces derniers aient proposé un set unique en son genre !
Setlist:
1. Thuja Magus Imperium
2. Born From The Serpent's Eye
3. Angrboda
4. Fires Roar In The Palace of The Moon
5. Prayer of Transformation
6. I Will Lay Down My Bones Among The Rocks And Roots
Un grand merci à La Laiterie pour cette soirée !
Photos: © Valentin Laurent (Hysteria) 2018.
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