L’actu est chaude pour Bury Tomorrow. Les Anglais ont sorti un nouvel album réalisant un démarrage record dans les charts Anglais et Allemands et préparent une tournée monstre pour la fin d’année. Il y a un mois, le groupe inaugurait également la scène Warbird du Download Festival France, l’occasion d’aller discuter quelques minutes avec le frontman Daniel Winter-Bates.
Salut Dan, merci de nous accorder quelques minutes. Vous venez de terminer votre set sur la Warbird, quelles sont tes impressions à chaud ?
C’était notre première fois au Download Paris et c’était cool. On était vraiment à la bourre pour arriver, on a raté notre ferry et on est arrivés sur le site environ 15 minutes avant de monter sur scène, donc c’était un peu stressant. En dehors de ça, le set était bon, les gens ont eu l’air de s’amuser et nous aussi. Tu me parlais de l’herbe haute avant de commencer l’interview, c’est vrai que c’était assez spécial. Depuis la scène on se serait cru dans Jurassic Park (rires).
Vous aurez le temps de voir d’autres groupes aujourd’hui ?
Oui, on a un peu de temps aujourd’hui pour rester sur le festival on ne part qu’à minuit en direction de l’Allemagne pour jouer à Francfort. On va pouvoir voir Ozzy, Converge, Underoath et c’est appréciable, on adore ces groupes et ils sont très bons dans ce qu’ils font.
Vous avez joué de nombreuses fois au Download original en Angleterre. Qu’est-ce que ça fait de voir ce festival s’exporter vers d’autres pays ?
C’est sympa de garder la même marque et la même vibe, tu peux voir des groupes très similaires sans avoir besoin d’aller en Angleterre. Chez nous, ce festival est un évènement énorme et c’est super de voir le metal mis en avant à une aussi grande échelle dans d’autres pays. Et j’ai aussi croisé pas mal d’Anglais qui ont voyagé jusqu’ici pour tester la version française. C’est un peu moins cher et ça fait des vacances sympas chez vous avec du beau temps. Il me semble que le festival dure aussi un jour de plus ici qu’en Angleterre, c’est aussi un avantage.
Ces dates en festival sont l’occasion pour vous de jouer les deux nouveaux singles (« Black Flame » et « Knife Of Gold ») pour la première fois. Comment le public réagit à ces nouveaux titres ?
Les retours sont très bon pour l’instant, je pense qu’on a bien fait de sortir deux chansons très différentes en premier. « Black Flame » est la chanson titre, c’est un hymne avec un refrain percutant et on l’a écrit dans le but de remplir de grosses salles. C’est cool car les gens semblent aussi s’approprier le message derrière la chanson. Pour « Knife of Gold » on s’est focalisé sur le live, c’est une chanson faite pour déclencher des moshpits et des circle pits. Les gens connaissent déjà les paroles et on ne peut vraiment pas demander plus, l’album n’est même pas encore sorti donc c’est assez fou.
A propos du nouvel album dont la sortie est prévue le 13 juillet, on sent un léger retour vers le son de Union of Crowns, votre deuxième album mixé avec vos travaux plus récents. C’est dans cette direction que vous vouliez aller ?
Ce qu’on voulait surtout c’est améliorer la production. Il y a beaucoup d’éléments nouveaux sur cet album et on voulait explorer de nouvelles sonorités, notamment électroniques pour passer un palier. Il y a du coup peut-être des choses qu’on ne pourra pas faire en live mais l’idée était là. Je pense que l’ensemble sonne plus massif et épique que ce qu’on a fait par le passé.
Je pense que tu as raison dans ton analyse, on veut écrire pour les gens qui aiment le Bury Tomorrow de Portraits et Union, en oubliant pas ceux qui nous ont découvert avec Runes ou Earthbound. On sait d’où on vient et on sait aussi où on veut aller. L’important pour nous c’est de ne faire aucun compromis sur la lourdeur de nos morceaux. On ne veut pas devenir plus soft et aller vers quelque chose de plus accessible mais en même temps on essaye d’écrire des chansons pour remplir des salles immenses et être en tête d’affiche de gros festivals. Ce n’est pas un équilibre facile à trouver mais c’est celui qu’on cherche sur ce nouvel album en particulier.
Les grandes salles, c’est donc la prochaine étape pour Bury Tomorrow.
Dans l’idéal. Dans les faits, on est conscients d’avoir beaucoup de chance de faire ce qu’on fait et d’avoir sorti cinq albums donc tant que l’on peut continuer notre carrière d’une manière ou d’une autre, on sera content. On joue devant beaucoup de monde en Allemagne et en Angleterre et c’est déjà une énorme satisfaction. Pour la suite on ne se pose pas de limite et on attend de voir la réaction des autres pays.
Vous avez d’ailleurs annoncé une tournée qui passera par Paris en décembre. Comment tu vis notoriété en France, peut-être un peu moins forte que dans les pays voisins ?
L’idée, c’était de présenter Black Flame dans le plus de pays possible et on est content d’avoir réussi à caler une date en France même si on aurait aimé en faire plus. La France est un marché compliqué pour pas mal de groupes de metal mais marché compliqué ne veut pas dire marché impossible. Ça veut simplement dire qu’on doit continuer à essayer de venir jouer, faire des interviews et nous faire connaitre le plus possible ici. On a déjà eu d’excellents concerts en France, j’en garde encore de grands souvenirs. On joue souvent sur des bateaux, à Lyon ou à Paris par exemple. L’underground metalcore se porte très bien en France, je pense que la prochaine étape pour le style c’est de passer un palier et de d’être capable de remplir des salles plus grandes. Architects et Parkway Drive l’ont déjà fait et on espère être les suivants. Ça prend du temps et de la persévérance mais notre présence à des festivals comme aujourd’hui ou le Hellfest peut faire beaucoup.
Tu en parlais, des groupes de metalcore comme Architects arrivent désormais à remplir des salles de 10 000 personnes en Angleterre, prouvant la popularité du style. Ça peut jouer en votre faveur.
C’est clair. Tu sais on est un groupe de metalcore depuis dix ans, c’est notre genre et on ne l’a jamais changé. Depuis quelques temps, Architects et Parkway ont vraiment explosé, ils ouvrent la voie et c’est une époque incroyable à vivre. Si des gens découvrent Architects par hasard, ils peuvent très vite tomber sur nous. Je dirais qu’on offre un côté plus mélodique au metalcore donc c’est une alternative qui peut marcher.
En parallèle tu as créé ta propre marque de vêtements, Viper Brand. En tant qu’artiste, c’est important pour toi de pouvoir faire ça à côté de la musique ?
J’ai toujours eu des liens avec l’industrie de la mode, j’ai été modèle par le passé et c’est une satisfaction pour moi de bien m’habiller et de produire des vêtements que les gens aimeront. J’ai toujours voulu avoir ma propre marque plutôt que de porter le merch de mon propre groupe car je trouve ça bizarre. C’est quelque chose dans lequel j’ai investi énormément d’effort et de temps avec mon frère et c’est évidemment toujours relié étroitement à Bury. Mais c’est assez sympa d’avoir une petite séparation entre les deux.
Une de tes particularités c’est ta croisade contre les pass VIP que certains groupes mettent en place. A la fin de chaque concert tu descends systématiquement discuter avec les premiers rangs par exemple. Pourquoi un engagement aussi fort ?
Concrètement, je n’ai aucune opposition au fait que les gens payent pour ces pass. Les fans souhaitent rencontrer les artistes qu’ils admirent et c’est tout à fait compréhensible. Par contre, je déteste que ce soit l’occasion pour l’industrie musicale de prendre les fans pour des vaches à lait et les exploiter. Ce n’est pas comme ça que je vois mon métier. Je peux te dire que l’endroit où on est assis en ce moment en backstage est dix fois moins excitant que le site du festival où tu peux te rendre compte de ce que les fans vivent vraiment. Il y a toujours quelque chose à découvrir que ce soit une salle, un festival, une ville et tu ne peux pas en profiter si tu t’assois backstage et que tu restes sur ton téléphone en pensant que tu es meilleur que tout le monde.
L’idée que quelqu’un puisse payer pour avoir une photo avec moi est tout simplement insupportable. Je suis reconnaissant que les gens prennent le temps d’écouter ce que je fais et me reconnaissent dans la rue par exemple. Je sais bien que ce que dis ne changera rien, les groupes continueront de le faire pour toujours mais s’ils continuent alors je continuerai à utiliser l’espace qui m’est donné pour dire que ce n’est pas normal.
C’est un phénomène assez récent au final.
C’est vrai et c’est vraiment très bizarre. Je pense que les groupes réalisent qu’ils peuvent se faire énormément d’argent grâce à ça. Sois sûr qu’il n’y a qu’une seule motivation derrière tout ça, c’est bien l’argent.
Et je vais te dire une chose, si il y a bien un endroit où ce genre de pratique est abusive c’est dans le hardcore et le metal. Je passe sur l’éthique propre au style qui serait déjà une raison suffisante mais l’argent que les groupes gagnent en vente de merch est bien plus élevé que dans les autres styles. Il y a une culture de porter le tshirt de son groupe préféré. Tu n’as pas besoin d’argent supplémentaire. Si tu ne peux pas survivre dans un groupe de metal sans faire de VIP alors tu n’es pas fait pour ça. Voir des groupes moins gros que nous le faire, ça me fait un choc à chaque fois.
Merci pour tes réponses Dan. Pour conclure, est-ce que tu peux nous dire pourquoi les gens devraient absolument écouter votre nouvel album ?
Je pense que les français en particulier devraient écouter notre nouvel album (rires). On doit pousser le metalcore en France, il y a le potentiel pour que ce pays devienne un gros marché. Supportez les groupes locaux qui jouent ce style et on verra jusqu’où tout ça peut nous mener.
Photographies : © Lukas Guidet 2018
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