Darktribe – Mysticeti Victoria

Le power metal, genre surchargé, blablabla … vous connaissez la suite. Mentir sur l'état actuel du genre sera difficile, le constat est assez facile à dresser. Difficile pour une jeune formation de sortir du lot, et, pourtant, des groupes talentueux, qu'est-ce qu'il y en a ! Entre les plus grands, et les plus petits, on retrouve des potentiels incroyables des quatre coins du monde. Et pourquoi pas en France après tout, hein ? Si l'hexagone a quelques fiertés nationales comme Heavenly, le pays n'est pas non plus au même rang que l'Italie quant aux nombres de sorties power qui apparaissent chaque année. Et ces nouveaux potentiels, pourrions-nous les trouver à Nice ? Si à Marseille, Galderia commence déjà à se faire un petit nom et que dans la première ville sus-nommée, Kerion suit le même chemin, Darktribe aimerait également se faire sa place au soleil, sous un autre que celui de sa ville natale. Et le label allemand Massacre Records devrait aider, pour commencer, à jouir d'une petite promotion supplémentaire pour la sortie de leur premier brûlot, nommé Mysticeti Victoria. Bon, pas bon, nouvel espoir ?

Difficile de l'évaluer aux premières écoutes, car l'opus demande un certain temps avant d'être assimilé, les compositions tirant très rarement (voir jamais à part l'intro et l'interlude) en-dessous des 5 minutes. Mais ce qui est sûr, c'est que notre formation du sud, elle, souhaite rassurer le plus possible les amateurs du genre, restant dans une musique qui ne dépassera pas les chemins bien tracés, balisés, les voies faciles donc. Peu de renouvellement, aucune originalité même, et parfois, une personnalité qui semble être légèrement en berne. Cependant, le groupe se rattrape sur sa maîtrise instrumentale qui, elle, est belle et bien présente. Ainsi, Darktribe compense en partie ses défauts d'ambition par une technique plutôt au point, les solos prouvant que notre quatuor n'est pas composé de manchots !

Des titres comme « Taiji » commencent les hostilités sous les meilleures augures : une rythmique agréable et solide, un ensemble cohérent et dynamique qui, en dépit de quelques longueurs, tient très bien la route, nous laissant en compagnie d'une formation rodée. Les espoirs sont donc permis une fois cette première piste passée. Et ceux-ci continuent avec « Roma XXI », possédant des qualités non-négligeables (le travail du clavier notamment, ainsi qu'une refrain accrocheur). Bref, tout semble démarrer sur les chapeaux de roue, et avec un symbole « qualité » gravé sur la tête du compositeur. Les morceaux, par ailleurs, alternent souvent entre quelques sonorités traditionnelles du power italien, et des tendances bien plus heavy. La recette est donc dosée entre une certaine retenue, histoire de calmer les ardeurs, pour mieux prendre le taureau par les cornes en assénant des coups puissants, grâce à une guitare qui se veut, et est définitivement le point fort de Mysticeti Victoria. Celle-ci est loin d'être redondante, offrant des parties mélodiques bien ficelées et agencées, même si manquant parfois d'audace. Quant à l'apparition des solos, ceux-ci sont trop prévisibles : il devient, au fur et à mesure, facile de savoir quand ceux-ci vont intervenir, ce qui n'enlève rien à leur qualité intrinsèque.

Pourtant, le brûlot est parfois plombé par un point noir assez fâcheux, surtout dans le power metal : le chant d'Anthony Agnello. Soyons honnête et mettons directement les points sur les i, le jeune homme est loin d'être mauvais. Le potentiel est là, et si des progrès restent à faire, on sent que les capacités ne demandent qu'à être exploitées, le timbre du frontman était intéressant dans les notes plus graves. Mais dès qu'il s'agit de monter davantage, là, ça casse plus que ça ne passe. Le début de « Roma XXI » est l'une de ces preuves flagrantes. La bonne volonté est là, mais la technique ne suit pas toujours. Le chanteur s'essaye aussi, avec plus ou moins de succès, à la modulation, et avec plus de travail et d'acharnement, nul doute que le résultat sera bien plus convaincant ! Mais certaines erreurs sont presque impardonnables : la ballade « Lightening Guide » est purement et simplement insupportable. Outre un titre bateau, plat, sans relief ni vie, les ''yeah yeah yeah'' d'Anthony sont de trop, et sa performance sur ce morceau loin d'être plaisante.

Darktribe

Un petit air de Joakim Brodén non ?

Et la voix n'est pas le seul défaut de Darktribe. Les compositions, elles aussi, ont leur mot à dire sur le banc des accusés. Premièrement, leur longueur cache parfois un manque cruel d'inspiration, faisant tourner les titres en rond, pour, finalement, pas grand chose. Plutôt que d'essayer d'imposer un tel cache-misère, pourquoi ne pas se contenter tout bêtement d'aller à l'essentiel ? Des titres à l'instar de « Lost » ou « Beware the God » auraient largement gagné à la fois en efficacité, mais également en intérêt. Ces erreurs de débutant peinent à être compensées par le manque de refrains vraiment mordants, qui élèveraient les pistes à un niveau bien supérieur. Majoritairement, ils restent assez plats, et gagneraient à être bien plus creusés. C'est le cas sur « Beware the God », où l'attente d'un point d'orgue échoue cruellement. On pensera aussi à « Poison of Life », à peine sympathique, mais incohérente. Les influences du groupe sont difficiles à masquer, elles non plus. Le metal italien est la principale inspiration des français, avec de forts relents sur Secret Sphere (certaines structures ou lignes de chant ne mentent pas), ou un petit côté The Dogma. Même l'introduction basse de la prometteuse « Black Meteor » fait furieusement penser à « My Friend of Misery » des américains de Metallica !

En fait, si on se penche bien là-dessus, on remarque un découpage beaucoup trop bancal : de « Taiji » à « Black Meteor », le disque est loin d'être mauvais. Ces trois morceaux sont bons, et de loin les plus inspirés. Puis, ensuite, c'est le ventre mou. L'envie ne semble plus y être. La banalité prend souvent le dessus, et les lignes de chant sont plus insipides. Où sont les bonnes idées ? Où sont les promesses des morceaux du début ? Disparues, envolées. Aspirées au fond de cet océan présent sur l'artwork. Et l'inspiration, d'un coup, revient sur le dernier titre « Life, Love & Death », pièce la plus longue de la galette. Le clavier et la guitare sont très complémentaires, offrant un bon jeu d'ambiances prenantes, et les deux instruments sont tous deux bien aidés par une production de bonne qualité. Et pendant sept minutes, Darktribe parvient à nous tenir en haleine. Voilà qui laisse un goût étrange. La formation réussit à nous offrir un long titre cohérent, mais peine quand ils doivent tourner vers un contenu plus direct. Ce qui est généralement l'inverse. Une certaine curiosité s'installe à la fin de l'écoute.

Mysticeti Victoria est un opus déroutant, et que l'on ne peut qualifier ni de bon, ni de mauvais. Parfois trop banal, avec quelques fulgurances fort plaisantes, mais des défauts encore trop envahissants, et qui seront à corriger, Darktribe annonce cependant un bon potentiel. Il y a matière à faire quelque chose de très bon avec les ingrédients proposés. Ne reste qu'à trouver une formule convenant mieux. Le groupe niçois est sur la bonne voie dans certaines idées, et se fourvoie dans d'autres. A eux, désormais, d'affirmer plus de personnalité, un chant de meilleure tenue et des instants directs plus affirmés. Et les cartes sont entre leurs mains. Reste à jouer les bonnes. Leur second effort sera donc attendu avec une certaine impatience, histoire de voir ce dont ils sont réellement capables. Le quatuor est donc guetté au tournant !

Note finale : 5,5/10

 

NOTE DE L'AUTEUR : 6 / 10



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