Taake (+ Bolzer + One Tail One Hand + Orkan) à  Petit Bain (11.10.2018)

Il y a parfois des soirs propices à écouter certains styles de musique. Prenez donc ce 11 octobre 2018. Sur les quais François Mitterrand, c’est l’orage qui s’abat. Vent qui souffle fort, ciel gris, trombes de pluie, l’ambiance est noire. Parfaite pour se mettre dans l’ambiance du concert du soir, à savoir Taake, Bölzer, One Tail One Hand et Orkan. Deux ans que les norvégiens n’avaient pas foulé les scènes parisiennes et leur retour se fait dans des conditions idoines.

Le public arrive par petite foule et c’est devant un parterre peu rempli, mais réceptif que se présente Orkan. Les norvégiens jouent d’un black metal sec, froid, avec juste ce qu’il faut d’ambiance. Le tout est porté par un Einar Fjelldal habité au chant, vampirisant la scène d’un charisme macabre mis en valeur par un agréable jeu de lumière.

Ce n’est pas le groupe le plus original du monde, mais leur black metal sans fioriture est une excellente mise en bouche de ce plateau de qualité. A la fin de leur set d’une grosse trentaine de minutes, Hoest viendra pousser lui aussi ses gueulantes sur un des morceaux. Rien d’étonnant à cela quand Gjermund Fredheim, le guitariste de Taake, fait partie d’Orkan. Après une demi heure d’attente, c’est à One Tail One Hand de fouler les planches du Petit Bain.

Et le changement d’ambiance est direct, avec un Black’n’roll expéditif qui va déchaîner une fosse bien plus remplie que pour le concert précédent. Pour leur tournée d’adieu, le groupe va mettre en avant son seul véritable album, l’excellent World Open, World Collide. On est pris dans un tourbillon de notes, sans aucune accalmie.

Que ce soit le chanteur Luctus, le guitariste Asli ou le bassiste Andras, les membres sont déchaînés sur le devant de la scène et transmettent une rage communicative.Le public commence à être chauffé à blanc et ces quarante minutes de set sont passées beaucoup trop vite, surtout pour ce qui était la dernière chance de voir le groupe sur scène.

La chaleur va se transformer en ferveur au moment de l’arrivée de Bölzer. On ne répètera jamais assez à quel point ce groupe est à voir sur scène. A voir est d’ailleurs un bien grand mot tant les deux membres du groupe sont quasi invisibles sur scène. Enveloppé d’un véritable mur de lumière bleuté, on peine à distinguer Okoï au chant. Mais l’intérêt n’est pas là. L’intérêt est mystique, dans cette espèce de transcendance animale que porte le groupe.

Malgré un son vraiment peu agréable (ce qui en soit est l’écueil de cette soirée depuis le set d’Orkan), la mélodie et les changements de ton de Bölzer arrivent à toucher le public. Il est dingue de voir ce que Fabian, à la batterie, et Okoï, du haut de ses dix cordes, arrivent à transmettre. A savoir une musique remplie d’émotions noires, plus violente et tribale que bien de nombreux groupes de la scène black pourtant plus nombreux sur scène.

La setlist fait la part belle à Hero, mais se renouvelle grandement par rapport à leurs précédents passages dans la capitale. Et quand résonnent "Zeus Seducer of Our Hearts" ou encore "Entranced by the Wolfshook", les spectateurs semblent réellement habités. Pas de moshpit, pas de coup, mais une fixation de la scène qui prend fin sur les dernières notes de ''Chlorophyllia'', comme si le public avait été hypnotisé par ce concert.

La salle est pleine, les trois précédents groupes ont placé la salle dans une ambiance parfaite pour accueillir Taake. Hoest a beau avoir perdu ses cheveux, son charisme lui reste inchangé, et dès le début de ''Jernhaand'', on sait que l’on va déguster ce soir. Durant la grosse heure qu’aura le groupe devant lui, tout sera noir, malsain et terriblement violent. La musique de Taake en live a cette faculté à transmettre cette émotion brute, cette violence et une brutalité somme toute unique. On est pris dans les tréfonds de la noirceur, dans ce que doit transporter le black metal musicalement.

Les gars jouent parfaitement leurs chansons, aidé par un son bien plus correct que sur les précédents artistes. Ca virevolte, les notes s'enchaînent, c’est carré, direct, les ambiances et les riffs acérés posent leur empreinte sur le public. On ressentira vraiment les subtilités des compositions, les cassures et changements de ton qui transportent et font toute la puissance de Taake.

Hoest irradie la foule d’un charisme noir, et mine de rien, le fait d’avoir dû se raser la tête lui donne un air encore plus martial et terrifiant. Les membres du groupe qui l’accompagne sur scène paraissent loin tant le chanteur semble prendre possession seul de la scène. On sent néanmoins que chez Taake il n'y a pas de tricherie. Le groupe est entier, et se donne diaboliquement à fond dans sa musique.

Le point de surprise sera que le dernier album, Kong Vinter, est rapidement mis de coté. Les deux premières chansons du set, et basta. Le reste fera la part belle à Noregs Vaapen, dont les chansons provoquent des mouvements de foule impressionnants pour une si petite salle que le Petit Bain. Ca headbangue, le pit est en furie, notamment quand "Myr" et son banjo retentit, en apothéose d’un set qui continuera pourtant avec un rappel de deux morceaux, ce qui est très rare chez Taake. La preuve que, si le public est en feu, le groupe lui est heureux d’être devant une telle ambiance.

Les conditions étaient idéales pour fournir un bon concert. Nous aurons eu bien mieux. Un shot d’adrénaline, de violence et de noirceur qui est de plus en plus rare sur des concerts de cette taille. Les présents auront donc eu de la chance de voir tout cela, quant aux absents, ne ratez pas les prochaines dates de Bölzer ou Taake. C’est un conseil d’ami.

Photos : © 2018 Lionel / Born 666
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