Papa Roach – Who Do You Trust


Si Papa Roach s’est fait connaître au début des années 2000 pour ses hymnes neo-metal furieusement efficaces, le groupe a proposé quelques évolutions au cours de sa carrière, s’orientant vers un metal plus mainstream. Pour ce nouvel opus, la formation californienne a, comme nombre de ses congénères, cédé aux sirènes de l’electro et de la popisation. Entre morceaux indigestes et prises de risque réussies, où classer cet album ?

Le neo-metal mène à tout, à condition d’en sortir, semblent aujourd’hui penser tous les groupes qui en  furent ses figures de proue. Du metal classique au dubstep en passant par le stadium rock, ses représentants les plus emblématiques ont tous exploré avec plus ou moins de succès des genres plus ou moins éloignés.

Papa Roach, après plusieurs albums purement neo-metal, s’est orienté vers un metal plus classique, flirtant parfois avec le rock FM, et si le groupe a plutôt bien mené sa barque, il n’a pas évité les coups de mou (F.E.A.R, justement assez mou).

Avec Who Do You Trust, le groupe tente le grand écart entre ses racines neo-metal et un son contemporain à base d’electro, de dubstep et de pop. Le résultat déroutera les fans puristes du groupe : certains morceaux rappellent les expérimentations dubstep de Korn, et évoquent tour à tour Hollywood Undead, Imagine Dragons, et même Muse, sans parler de similitudes avec des artistes pleinement electro. Ce n’est clairement pas sur ce terrain qu’on attendait Papa Roach, même si son précédent opus, Crooked Teeth, avait déjà des relents electro plus ou moins assumés.
 


Clairement, le groupe se renouvelle, impossible de l’accuser de ne pas prendre de risque et de rester sur ses acquis, mais le foisonnement d’influences fait craindre un manque de cohérence et surtout un manque d’identité pour ce disque.

Et en effet, toutes les tentatives ne se soldent pas par une réussite. "Come Around" est par exemple une ballade sur laquelle il n’y a strictement rien à dire, agréable à écouter, mais trop formatée dans le but de plaire au plus grand nombre pour avoir une quelconque identité. "Maniac", un cran au-dessus, souffre aussi d’un manque global de consistance, et sur plusieurs morceaux, on se demande comment le batteur Tony Palermo a bien pu occuper son temps libre en studio – en jouant aux cartes avec le bassiste Tobin Esperance, peut-être.

Mais le point d’orgue de l’inconsistance est atteint avec "Problems". Ce titre est hilarant du début à la fin,  alors qu’il n’a manifestement pas du tout été conçu dans ce but. Rien ne va dans ce morceau, qui remporterait sans discussion un Grammy si la cérémonie récompensait les ballades les plus mièvres de tous les temps. Le début avec un clavier et des arpèges de guitare est un cliché en lui-même, les « Ouhouhou » des chœurs donnent l’impression d’une parodie, le vocoder mal utilisé ne fait rien pour arranger les choses, et pour couronner le tout, les paroles du refrain sont sidérantes. « I got, I got problems »… Oui Jacoby, tout le monde a des problèmes, heureusement qu’on n’en fait pas une chanson à chaque fois, surtout de ce niveau-là…
 


Cette chanson est cependant le seul accident industriel de Who Do You Trust. Le reste des morceaux est globalement bon, même sans être révolutionnaire. La ballade "Not the Only One" est trop radio friendly mais possède un son qui la rend relativement intéressante, que ce soit dans le traitement de la voix de Jacoby Shadix, ou dans les guitares de Jerry Horton qui ne sont jamais loin. "Feel Like Home" est un cliché de chanson de rock californienne jusqu’au bout du break, mais reste jouissive pour les amateurs du genre.
 


Et surtout, le groupe réussit quelques bombes qui devraient réconcilier les anciens et les modernes. Le diptyque d’ouverture, "The Ending" et "Renegade Music", est une vraie déflagration, où le groupe assume sa puissance et mixe sans complexe le meilleur de son héritage, le chant scandé de Jacoby Shadix, les guitares agressives, le son puissant, avec des éléments plus contemporains, notamment dans la production ou la large couche d’electro qui accentue admirablement le son massif des morceaux. "Who Do You Trust" est dans la même veine, Papa Roach innove tout en gardant ses racines, Jacoby Shadix alterne chant presque rapé et chant mélodique, la production sonne très actuelle mais les guitares sont réellement mises en avant.
 


Vers la fin, "Top of the World" emmène le groupe dans une direction inédite, le titre nage en plein dans l’electro et affiche une mélodie très orientalisante avec des passages rapés, il semble que Korn ait copulé avec Imagine Dragons, Kasabian et Muse. Shadix a d’ailleurs des intonations à la Dan Reynolds, vocaliste d’Imagine Dragons, sur toutes ses fins de phrase du pré-refrain. Ce morceau est totalement improbable venant de Papa Roach, le mélange pourrait être infâme, et pourtant, il fonctionne magnifiquement. Et comme le groupe a envie de jouer, il enchaîne avec "I Suffer well !!", bombe punk d’1’21 explosive, mais en décalage avec les autres chansons.

Malgré quelques faiblesses, l’album se révèle au final plutôt réussi. En voulant contenter à la fois les headbangueurs demandeurs de titres furieux pour poutrer en pogo et les auditeurs moyens de radio, il souffre d’un léger manque de cohérence, mais son côté foisonnant est aussi ce qui le rend si intéressant. Un album protéiforme au possible, donc, mais n’est-ce pas une continuité logique pour un groupe de neo-metal, genre qui n’a jamais eu peur de marier les contraires ?

Tracklist
   papa roach, who do you trust, nouvel album, neo metal, electro, dubstep, mélanges improbables
The Ending  3:29 
Renegade Music  3:23 
Not The Only One  3:25 
Who Do You Trust  3:16 
Elevate  3:11 
Come Around  3:30 
Feel Like Home  3:11 
Problems  3:03 
Top Of The World  3:53 
I Suffer Well!!  1:21 
Maniac  3:20 
Better Than Life

Sortie le 18 janvier chez Eleven Seven Music

Plus d'infos sur le groupe

NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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