En amont du festival Echos et Merveilles qui se tient du 26 au 28 avril 2019 à proximité de Toulouse, l’association du même nom décide de faire revenir à Paris l’une des têtes d’affiche de l’édition précédente. Faun revient donc triomphant à Paris, à l’Elysée Montmartre, un an après sa venue applaudie lors du Cernunnos Pagan Fest 2018.
Guilhelm Desq
C’est dans un Elysée Montmartre rempli, mais loin d’être plein que démarre à 20h le premier artiste du soir. Guilhelm Desq, c’est son nom, s’affiche alors dans un minimalisme envoûtant. Une vielle à roue, une grosse caisse et un séquenceur, l’homme monte seul sur scène et livre une parfaite prestation d’homme-orchestre. Le temps s’arrête pendant trente minutes durant lesquelles une atmosphère envoûtante, entre musique de film et hymne médiéval, séduit le public de l’Elysée Montmartre.
La musique de l’artiste est extrêmement visuelle et, du fait qu’il soit seul sur scène, on est pris dans un torrent d’images qui se dessine au fur et à mesure des compositions. Une belle découverte pour une grande partie du public, qui se précipitera d’ailleurs acheter son album Visions au stand de merchandising à la fin du concert.
The Neko Light Orchestra
Un petit changement de plateau et ce sont maintenant les neuf musiciens de The Neko Light Orchestra qui font leur apparition sur scène avec un set véritablement osé. En effet, pour la soirée, le groupe a décidé de rendre hommage à deux grandes sagas tant littéraires que visuelles avec des reprises des plus grands thèmes du Seigneur Des Anneaux et de Game of Thrones.
Et le terme osé n’est pas de trop. Car on parle de compositions créées pour des orchestres aux dizaines de musiciens. Et le résultat est loin d’être désagréable, même si, léger bémol, sur les partitions les plus douces d’Howard Shore, on perd les nombreuses nuances que met le compositeur dans ses thèmes. Rien de dramatique et qui fasse sortir du concert, mais malheureusement, cela est inhérent à ce type de reprise. Par contre, sur les thèmes les plus puissants du Seigneur des anneaux, les guitares électriques s’illustrent. Notamment sur un "Dark Mordor Theme" où les tambours et la batterie dominent la scène et où le coté épique est justement retranscrit. Et où, avant de jouer le morceau, les deux guitaristes concourent dans un fou rire à celui qui boira sa bière la plus vite.
Après avoir fait le tour de la trilogie de l’anneau, c’est le thème de Game of Thrones qui rugit de puissance dans la salle pour une deuxième moitié de concert rendant hommage aux partitions de Ramin Djawadi. Le choix des chansons est beaucoup plus facile. Ainsi le thème de la série sera joué, mais aussi "The Rains of Castamere", portée par la sublime interprétation tout en nuances et en émotions de la chanteuse Norieh.
Une fois le tour de Westeros effectué vient l’heure du rappel, choisi par le public, et c’est donc le thème de Gollum qui sera interprété sous les applaudissements nourris d’un public réceptif à cette excellente prestation. Malheureusement, une heure, c’est très court pour ce type d’événement et on a hâte de revoir ce type de set en tête d’affiche pour plonger plus en profondeurs dans ces magnifiques partitions.
Faun
Place maintenant à la tête d’affiche. Une grande partie du public est venu pour entendre Faun, et ne sera, comme d’habitude, pas déçue. Le groupe allemand est l’une de ces têtes d’affiche que l’on voit apparaître un peu partout dans chaque festival un peu pagan, et pourtant, aucune lassitude à les voir, tant le professionnalisme du groupe transforme chacune de ses venues en instant magique.
Alors que le dernier album sorti, Midgard, fête ses trois ans, la troupe menée par Oliver Sa Tyr a logiquement choisi une setlist en forme de véritable best-of, couvrant sa vingtaine d’année de carrière.
L’ambiance dans la salle est magnifique. Quelque soit l’âge des personnes, qu’on ait l’habitude de les voir ou non dans des festivals plutôt metal, tout le monde est subjugué par les Allemands. Des femmes paraissent en transe et dansent passionnément sur le rythme des musiques. D’autres soulèvent leur corne à boire sans raison en criant très fort, mais sur tous les visages se lit un sourire heureux.
La musique et la communication de Faun avec le public rendent celui-ci heureux. Ce genre de petits instants magiques que nous souhaiterions infinis. Les voix de Fiona Rüggeberg et Laura Fella se croisent et s’entremêlent avec maestria à celle d’Oliver Sa Tyr, rendant la performance du soir hypnotique.
Que ce soit "Odin", écrite avec Einar Selvik, "The Hymn To Pan", "Egil Saga" ou encore le classique "Rhiannon", la richesse des arrangements et des compositions laisse pantois. Autant en CD on peut parfois critiquer certains choix de Faun, autant leur musique est véritablement faite pour s’exprimer sur scène, où explose alors un maelstrom d’émotions.
Faun est souvent critiqué en tant que porte d’entrée des mouvements folks et pagan par certains Jean-Michel Trvepagan. Il n’empêche que rares sont les groupes, encore plus dans ce style, à proposer une telle variété d’arrangements et d’utilisation de leurs instruments. La manière de composer et de raconter une histoire est certes bien différente du mouvement neofolk qui touche de plus en plus de metalleux… Mais elle a cette faculté de toucher, de donner envie de s’intéresser au passé, un public large comme nous le voyons ce soir. Le groupe captive, et ce mélange d’instruments traditionnels et contemporains arrive à créer une osmose totale entre le public et le groupe.
Plus d’une heure trente de concert, un public ultra réceptif à sa musique et le groupe s’arrête avec le sourire jusqu’aux oreilles après un long rappel. Et où il alors est de bon ton de se dire après une telle soirée que le nom de l’organisateur, Echos et Merveilles, n’est pas usurpé. Et l'on ne peut que vous conseiller, si vous avez l'occasion, d'aller au festival dont l'une des têtes d'affiches cette année n'est autre que Wardruna.
Photographies : © Arnaud Dionisio 2019
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