"Don’t bore us get to the chorus"
Accept est la tête d’affiche du festival 70000 Tons of Metal 2019. Le groupe a donné son premier concert le premier jour et clôture le festival sur la Pool Deck, la grande scène extérieure. Nous avons rencontré Wolf Hoffmann, fondateur et guitariste du groupe et évoqué avec lui les récents changements et les projets en cours.
Accept est la tête d’affiche du 70000 Tons cette année. Comment s’est passé le premier concert hier ?
C’était absolument fantastique. Les réactions du public étaient vraiment géniales. Après le concert, tous les fans venaient me voir en me disant que ça avait été un super concert. J’ai adoré, sincèrement. Je ne pouvais pas espérer plus que ça.
C’est la première fois qu’Accept participe aux 70000 Tons of Metal. Pourquoi cela a-t-il pris autant de temps ?
Il y a un début à tout non ? Ça n’a jamais collé jusque-là coté timing. Le festival se passe toujours en janvier et très souvent, à cette période, on est en tournée comme ces deux dernières années par exemple. On a été invités ici de très nombreuses fois mais on n’a jamais pu y répondre favorablement. Cette fois, on y est et on est très contents de le faire. Regarde, il fait beau, tout est beau et sympa. C’est cool.
Peut-être aussi est-ce le moment de retrouver d’autres groupes ?
Pas tant que ça. J’ai un coté hermite en fait. En général, je ne vais pas trop à la rencontre des autres artistes, j’ai tendance à rester dans mon coin et là malgré le fait que ce soit une croisière spéciale, ça ne change pas tellement les choses. Ou bien si ? Peut-être un peu …
Le public est toujours très excité dans les concerts d’Accept. Est-ce vous qui communiquez cela ou est-ce dû à la musique ?
Probablement une combinaison des deux. Je dirais que c’est quelque chose qu’on met dans la musique et que si le résultat était mauvais, le public ne serait pas au rendez-vous. En même temps, je pense qu’un concept se doit d’être un peu une expérience de la vie, pas seulement quelques représentations autour d’un album. Le public veut voir quelque chose se passer sur scène. Ils veulent un divertissement, une communication entre l’artiste et le public. C’est flagrant quand le public part en délire, on s’éclate avec eux. C’est un échange. Si l’audience restait calme et mitigée, évidement on ne s’amuserait pas non plus. De même, si nous, ne nous éclatons pas, le public le ressent. On agit l’un sur l’autre.
Je pose cette question parce que vous semblez heureux de jouer à chaque fois …
Si on ne s’amuse pas, il ne faut pas le faire. Je n’ai jamais compris cela. Je vois de temps en temps des groupes sur scène qui jouent en regardant leurs chaussures avec une apparence misérable. Je me demande à quoi ça sert de jouer si on n’y prend pas de plaisir. C’est quand même pour cela qu’on voyage, qu’on fait des milliers de kilomètres. C’est pour cela qu’on passe un temps incalculable à préparer ces moments et à le faire, pour être sur scène.
Vous avez fait le Hellfest en 2018 pour la deuxième fois. Pourquoi pas plus souvent ? Aimes-tu faire les festivals ?
Le public n’aime pas voir le même groupe trop souvent. Tous les deux ans je dirais, ça va. Un festival c’est une expérience complètement différente d’un concert parce que c’est un peu plus désorganisé. Désorganisé n’est pas le bon mot, je veux dire qu’il n’y a pas autant de préparation, tu ne fais pas la balance toi-même. Ce n’est pas ton show. Même pour les lumières et toute la production, tout le monde a le même traitement. C’est un peu « au suivant … au suivant ». Oui c’est très différent mais si tu le prends comme ça, c’est très agréable. Je me souviens, au début des années 80, les premiers festivals qu’on a fait, c’était un peu chaotique parce qu’on n’était pas habitués et qu’on ne savait alors en retirer le bon côté. Aujourd’hui on a fait tellement de festivals qu’on voit ça autrement et qu’on l’apprécie réellement.
Mais les setlists sont plus courtes…
Oui et on garde à l’esprit, au moment de définir la liste des morceaux, que certains fonctionnent mieux que d’autres. Au fil du temps, on a l’expérience de cela et on sait ce que le public aime en festival. C’est une atmosphère de fête, ils n’ont pas envie qu’on les ennuie avec des ballades et des solos interminables. C’est un peu "Don't bore us get to the chorus" ("Ne nous ennuie pas, envoie le refrain") tu vois, envoyez le prochain morceau svp et que ça envoie. C’est un peu risqué car les publics sont différents d’un pays à l’autre mais en général cela fonctionne.
Justement, as-tu constaté des différences selon le public ?
Ah absolument, je veux dire, non pas des différences énormes. Le public metal comme tu peux le voir ici à bord, provient de soixante-dix nations différentes et ils ont l’air à peu près les mêmes partout mais il y a des différences régionales : par exemple, quand on va en Amérique du sud, les fans sont complètement fous et ce sont de super audiences alors que d’autres sont plus réservés et pourtant ils apprécient le concert, simplement à leur manière.
Quelles ont été les réactions à propos de l’album Rise of Chaos ?
Fantastiques ! Franchement très bonnes. Il semble que chacun des albums qu’on a sortis dernièrement a obtenu peu à peu des réactions de plus en plus bonnes. C’est un peu miraculeux pour nous, on se sent très chanceux.
Vous avez annoncé en septembre dernier que vous travaillez sur un nouvel album. Qu’en est-il ?
Pas vraiment, c’est plutôt un gros mensonge car on n’a pas encore commencé mais c’est prévu et on va s’y mettre bientôt. En fait, on avait démarré mais pour être totalement honnête, on n’avance pas beaucoup car on est constamment occupés sur d’autres projets pour le moment et surtout on n’a progressé depuis les changements récents dans le groupe.
A ce propos, est-ce que votre façon de travailler va changer maintenant ? Vas-tu travailler seul ?
Pour être brutalement honnête, je ne le sais pas encore. On va voir cela mais c’est si récent que je ne me suis pas encore adapté à cette nouvelle situation. Probablement, je vais continuer de la même manière qu’auparavant mais il faudra quand même trouver une nouvelle approche : je vais continuer à être le principal compositeur et auteur et il est possible que les autres membres du groupe soient plus impliqués. En fait, je ne mesure pas encore l’impact du départ de Peter sur la musique.
Est-ce qu’une expérience comme celle-ci t’apporte de nouvelles idées ? Tu travailles en tournée ?
Jamais ou alors très rarement. On n’a ni le temps ni la concentration parce qu’il y a constamment quelque chose qui se passe quand on voyage : check-in, concerts, se préparer pour les interviews, tout cela ne permet pas de se concentrer sur l’écriture.
Quelle sorte de message veux-tu transmettre au public ?
Un message, c’est un bien grand mot. On a toujours été un groupe qui essayait dans nos chansons, de parler de sujets comme des événements historiques ou l’actualité ou encore les aspects politiques de la vie de tous les jours. C’est quelque chose qui nous intéresse vraiment mais ça s’arrête là. On essaye le plus possible de se tenir éloignés des clichés totalement stupides. On essaye sérieusement d’écrire des morceaux qui ont un sens pour nous personnellement. Beaucoup de nos titres ont été écrits par ma femme Gaby. Elle a écrit une grande partie de nos textes ou alors elle a eu l’idée du texte et elle continue d’être très impliquée dans l’écriture. Oui, il y a un contenu, j’ai toujours considéré tous ces morceaux qui ne veulent rien dire comme du gâchis et même si on a d’abord la musique, ce contenu apporte un vrai plus à notre musique.
Peter a joué dans Accept durant plus de quarante ans avant de prendre la décision d’arrêter en novembre dernier. Peux-tu nous en parler ?
Je ne peux pas te donner beaucoup plus d’informations que cela : je sais qu’il est parti pour des raisons personnelles et je n’en sais pas plus. C’est triste, très triste après toutes ces années. Je pensais qu’on jouerait ensemble indéfiniment mais l’histoire en voulu autrement.
Les épreuves font partie de la vie de tous les groupes mais quand on vous voit sur scène, comme hier, vous exprimez encore le même plaisir de jouer, c’est une philosophie ?
Oui, parce que ce plaisir-là, on l’a toujours, aussi fort. Quoi qu’il en soit, quand on monte sur scène, on ne pense pas à toutes ces choses. Quand je suis sur scène, je suis dans le présent, je pense seulement à ce qui passe dans l’instant et aux gens qui sont devant moi. C’est un sentiment très spécial, en particulier dans un festival : Il y a là mille personnes qui, à l’instant où tu joues quelque chose, rentre dedans immédiatement, se mettent à chanter cette stupide petite mélodie à laquelle tu as pensé quand tu étais un adolescent, vingt ans avant ou la semaine dernière, peu importe : c’est génial. Je veux dire, que peut-on demander de plus ? Ce frisson, cette émotion-là, il n’y a pas véritablement d’autre situation dans la vie qui te permette de vivre ça.
Qu’est-ce qui compte le plus pour toi ? L’écriture ? Le son ? Les concerts…
Bien sûr, tout est important mais j’ai toujours été un adepte des morceaux. Toutes les tournées, les promotions n’ont aucun sens si l’album n’est pas bon. Si le titre est bon, même le son importe moins, la promotion se fait naturellement car le public va y adhérer. J’ai toujours tout misé sur la composition, alors oui c’est le processus de création qui est le plus important pour moi.
Merci beaucoup de nous avoir accordé cet interview et rendez-vous pour le deuxième concert qui clôture le festival.
Merci pour tes questions, c’était intéressant. A dimanche !
Interview réalisée le 2 Février 2019 par SAMM
Photos : © 2019 SAMM
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