Chaulnes Metalfest 2019 (20.04.2019)

L’édition 2019 du festival picard a été un succès aussi bien pour ce qui concerne la fréquentation que l’organisation. Oubliés les soucis des années précédentes, ADX, Misanthrope, Benighted et d’autres groupes ont mis le feu aux planches dans une ambiance festive et familiale, marque de fabrique du Chaulnes Metalfest.

Fidèle à Pâques comme les cloches et le lapin le sont pour les chocolats, le Chaulnes Metalfest tenait en ce samedi 20 avril sa dix-septième édition. Soulignons déjà que pour cette cuvée 2019, l’organisation a fait venir des groupes qui se sont quasiment déjà tous produits sur la scène du centre socioculturel lors d’éditions précédentes.

Ce qui aurait pu éventuellement causer préjudice à la réussite du festival, ne serait-ce que pour son affluence, a au contraire fidélisé un public qui semble aimer le côté convivial et familial (souligné par tous les groupes lors de leurs prestations) de l’événement. Ainsi le hardcore metal de Morpain, le death grind de Putrid Offal, le heavy metal de GanG et ADX ainsi que le metal extrême avant-gardiste de Misanthrope ont clairement rempli leur fonction : faire passer un bien agréable moment de partage de frissons métalliques. Et c’est Benighted qui a clôturé avec maestria cette nouvelle édition.

Cette année a aussi été l’occasion de participer à deux concours : tout d’abord celui mis en place en partenariat avec La Grosse Radio Metal pour gagner deux entrées pour le festival et un autre proposé par l’organisateur permettant de remporter une guitare (le tirage au sort s’est fait juste avant le concert de Benighted). Autre petite, mais pas des moindres, nouveauté pour l’édition 2019 : un jeu de lumières riche et très bien exploité qui a donné un réel plus aux concerts.

Morpain
 

C’est au combo ch’ti Morpain que revient la tâche d’ouvrir les hostilités sans intro et autres artifices. Actifs depuis 2001 et ayant sorti leur dernier album Fueled By Anger en 2017, le groupe de Hénin-Beaumont distille un metal hardcore hautement énergique fait de breakdowns dévastateurs parfois proche du deathcore. Les deux vocalistes, Greg et Gio, invitent le public, encore timide en affluence au début du concert, à se rapprocher tandis que les titres s’enchainent sans répit et que le guitariste du combo, Viv, descend de scène pour inviter au défoulement.

Des efforts qui paient car dès le troisième morceau un pogo (constitué entre autres de quelques gilets jaune chevelus que nous croiserons tout au long de la soirée) éclate et tout le monde se laisse prendre par le set. Quelques circle pits se constituent au fur et à mesure du concert et il faut avouer que le répertoire de Morpain, dont nous retiendrons déjà le fédérateur (et pro-vegan ?) « We Are Animals », et sa présence scénique jouent beaucoup en sa faveur.

Il est souvent difficile pour les groupes d’ouvrir un festival mais Morpain a parfaitement rempli cette mission, et gagné quelques nouveaux fans auxquels il est donné rendez-vous au stand merchandising du groupe d’où l’on peut repartir avec un sticker gracieusement offert.

Setlist

« Death’s Passenger »
« This Demon »
« Misery Hatred Sadness »
« We Are Animals »
« These Dark Days »
« Work or Die »
« Friendship For Life »
« My Old Friend »
« Earth Will Not Regret Us »
 


Putrid Offal
 


Alors que le « Ring of Fire » de Johnny Cash et autres chansons country retentissent dans la sono durant le changement de plateau, nous pouvons distinguer déjà des poches de perfusion accrochées au pied du micro. Indice qui laisse entendre que l’univers du groupe suivant va être plutôt sanglant. En effet Putrid Offal, un des plus anciens représentants du gore/grind metal, le combo existant depuis 1991, prend la scène d’assaut pour trois quarts d’heure de death/grind old school et bien gras. Les musiciens sont habillés en chirurgiens bouchers que l’on croirait échappés d’une VHS d’horreur poussiéreuse et gesticulent parfois en faisant des grimaces de sadiques. 

 

On pense parfois à Carcass, référence classique, mais il faut cependant avouer que le tout est bien exécuté. Les metalheads réservent un bon accueil au groupe mais semblent en revanche assommés par la brutalité de la musique. Peut-être s’agit-il aussi de la chaleur assez étouffante régnant dans la salle en ce début de soirée qui décourage toute envie de se défouler autant que sur Morpain ?

Pourtant, le chanteur des Putrid,Franck, ne manque pas de solliciter l’assistance à « foutre le putain de bordel » mais n’obtient en réponse qu’un timide circle pit. Plus étrange : certaines personnes dans le public s’étonnent de la courte durée des titres joués au milieu du set, s’attendant peut-être à du metal progressif plutôt qu’à du grindcore… Putrid Offal a cependant délivré une bonne prestation dont nous retiendrons comme touche d’humour un « Gurgling Prey » dédié aux filles.

Setlist :

« Livor Mortis »
« Premature Necropsy »
« Purulent Cold »
« Mortuary Garlands »
« Organic Excavation »
« Let There Be Rot »
« Didactic Exploration »
« Necrotic Mutilation »
« Repulsive Corpse »
« From Plasma to Embalming »
« Gurgling Prey »
« Symptom »
« Rotted Flesh »
« Pallor Mortis
« Suffering »

 

GanG
 

Changement de registre avec un metal plus traditionnel avec l’arrivée de GanG qui prend le relais de Putrid Offal. Actifs depuis 1990, le combo de Fismes n’est pas non plus un débutant et a du métier, il se produit à Chaulnes dans le cadre de son All For One Tour censé promouvoir le dernier album du même nom sorti en 2018.

C’est donc un set basé essentiellement sur des titres de ce disque que le groupe donne. Il faut saluer déjà le professionnalisme de ces véritables routards du heavy metal qui ne manquent pas de fun. Le groupe est visiblement attendu par ses fans (des quinquagénaires pour la plupart mais aussi des plus jeunes) qui dès le premier titre lui réservent un très bon accueil, ce qui fait naitre quelques sourires de la part des musiciens. Il faut avouer que si le heavy old school, avec des parties de twin guitars soignées, de GanG ne réinvente rien, il reste agréable à apprécier sur les planches.

Tout est carré et bien interprété, le guitariste Biggy a des faux airs de Paul Quinn (Saxon) avec son foulard noué autour de la tête et le frontman Bill ne manque pas de voix, de charisme et d’humour, se mettant rapidement le public dans la poche avec ses interventions entre chaque morceau.

Ainsi, le chanteur n’hésite pas à saluer chaque groupe présent à l’affiche et à les vanner, gentiment. Nous retiendrons particulièrement son évocation de Fack, guitariste picard de Benighted « connu alors qu’il était tout petit » sous les rires complices de l’assistance.

Autre grand instant de décalage : l’annonce de la reprise du « Don’t Be Cruel » de Elvis Presley avant que le groupe n’interprète finalement « Doctor Doctor » de UFO. Le public tape dans les mains pendant « Save Me » tandis que « Follow The Sign » avec sa basse bien mise en avant sonne comme un agréable hommage au « Heaven And Hell » de Black Sabbath.

GanG quitte la scène en obtenant le premier rappel (non joué) de la soirée, preuve que tout le monde a passé un très bon moment en sa compagnie.

Setlist :

« Warchild »
«The Devil In Me »
« Another Tomorrow »
« Lord Tell me »
« Save Me »
« The Almighty »
« Follow The Sign »
« Doctor Doctor » (UFO)
« The King Became a God »
« All the Fool Around »

 

ADX
 

Lors du changement de plateau nous pouvons admirer un ensemble de batterie assez impressionnant, celui de Didier « Dog » Bouchard, batteur de ADX. La légende du speed/heavy metal français est de retour à Chaulnes et le concert qu’elle s’apprête à donner est quelque peu particulier. En effet il s’agit du premier set avec le nouveau guitariste Neo, de la chaine You Tube NeoGeoFanatic, remplaçant récent du démissionnaire, et membre formateur, Pascal Betov. Il est donc possible que l’Acier DouX ait ressenti une certaine pression avant de monter sur scène.

Une chose est déjà remarquée : il y a beaucoup de monde qui attend le groupe dans la salle alors que ce dernier est encore en train de se préparer. Phil Grélaud profite des réglages de son micro pour saluer le public et faire un peu le pitre avec lui et ainsi mettre de l’ambiance. Puis, les lumières s’éteignent avant que ne retentisse une intro sur bandes, faisant monter la pression. ADX attaque son concert sur une version dynamique de « Mémoire de l’éternel » sous les hourras d’un public de fans.

Ces derniers reprennent en chœur le refrain de « Déesse du crime » avant que Phil déclare vouloir rendre hommage « à une grande dame qui a brûlé en début de semaine dernière » pour annoncer le classique « Notre Dame de Paris ». Le frontman présente aussi le line up actuel d’ADX avant « Red Cap », rappelant que c’est le premier concert du groupe avec Neo. A propos du nouveau guitariste, nous pouvons affirmer que celui-ci s’en est très bien sorti sans tomber dans la démonstration abusive du shredder de base et s’est mis les fans dans la poche.

Toujours aussi taquin le chanteur lance un « Nous étions passés chez vous la semaine dernière non ? Enfin il y a quelques temps… » avant une version très heavy de « L’Etranger » (introduite par le début de « King of Pain ») qui fait naitre des slams, du stage diving et des pogos. Le public est ensuite invité à reprendre le refrain de « Division Blindée » avant qu’ADX ne conclut sa prestation par un « Caligula » (fortement réclamé) survolté qui verra Nicklaus Bergen descendre dans la salle pour se faire porter sur scène ensuite par les fans.

Tout se termine par un selfie en famille avant que le groupe quitte les planches triomphalement alors qu’un rappel est réclamé en vain. Ce concert d’ADX a été la preuve que c’est souvent dans les plus vieux alliages que l’on tire le meilleur metal.

Setlist :

« Mémoire de l’éternel »
« La complainte du demeter »
« Déesse du crime »
« Notre Dame de Paris »
« Red Cap »
 Intro « King Of Pain »/ « L’Etranger »
« Suprématie »
« Division blindée »
« Caligula »
 

Misanthrope 
 

Autre institution du metal hexagonal, mais dans un registre plus extrême, groupe aussi aimé que détesté, Misanthrope s’apprête ensuite à prendre la relève d’ADX. Nous pouvons constater alors que les musiciens s’installent que la batterie de Gaël Féret est aussi impressionnante que celle de Dog. Autre chose étonnante : le décor de scène est très sobre, ne dévoilant même pas un backdrop.

Misanthrope va aussi donner un concert particulier au Chaulnes Metalfest, en effet le groupe célèbre ses trente ans d’existence, prétexte à quelques dates pour jouer un best of de son répertoire.

Le quatuor attaque sa rétrospective par un extrait de son très bon dernier album ΑXΩ Alpha X Omega: Le magistère de l'abnégation, en l’occurrence « La fabrique du fataliste ». S.A.S De L’Argilière, lunettes noires et pantalon en cuir, est en voix et les musiciens sont en place, le tout promet un bon set.
« Bonsoir à tous nos frères de Picardie ! Nous sommes Misanthrope ! » lance la réincarnation d’Alceste avant que le groupe n’attaque « Névrose ».

Le public, un poil moins nombreux que pour ADX, accueille cependant chaleureusement le groupe et applaudit lorsque le chanteur annonce, enthousiaste, que lui et les autres membres voulaient revenir à Chaulnes depuis 2011 et que pour son trentième anniversaire le groupe jouera un extrait de chaque disque paru depuis ses débuts. L’assistance d’ailleurs n’hésite pas à entamer un « Happy Birthday » de circonstance qui ravira le combo qui profitera aussi de l’occasion pour tourner une petite vidéo.

Pour le reste nous pouvons nous délecter de quelques raretés comme le très death floridien (influence Nocturnus) « Hater of Mankind » ou les ambiances doomesques et médiévales du doublé « Maudit sois-tu soleil!/ Aquarium ». Certains titres d’ailleurs, comme « Passion millionnaire », n’ont jamais été interprétés sur scène avant comme le précise le frontman. Un S.A.S par ailleurs qui se montre parfois très théâtral sur « La marche des cornus », charismatique ou lançant un « C’est vous les misanthropes immortels ! » aux fans en guise d’hommage.

Ce concert est avant tout un cadeau (et une torture pour ceux qui n’apprécient pas le groupe) pour les amateurs de Misanthrope et entendre des chansons telles que « Le Roman Noir » (connu aussi sous le titre «Schattengesang » ) ou « 1666... Theatre Bizarre » en live reste un vrai plaisir, sans oublier que la virtuosité des musiciens est impressionnante.

Et même si le metal alambiqué, technique et théâtral du groupe n’appelle pas forcément au défouloir physique (il n’y aura que quelques timides pogos) il reste bien agréable à voir sur scène. La célébration s’achève par le dantesque « Bâtisseur de cathédrales » avant que la précieuse misanthropie ne cède la place à la boucherie finale.

Setlist :

« La fabrique du fataliste »
« Névrose »
« Hater of Mankind »
« Humiliations Libertines »
« Le roman noir »
« Maudit sois-tu soleil!/ Aquarium »
« Passion millionnaire »
« La marche des cornus »
« 1666... Theatre Bizarre »
« Bâtisseur de cathédrales »


Benighted
 


Il est parfois amusant de voir les membres d’un groupe aider au montage de la scène, à l’image de Julien Truchan que nous apercevons en train de placer les décors (à l’effigie de leur dernier album Necrobreed sorti en 2017) entre deux tests micro. Cela prouve au moins que malgré la notoriété parfois les musiciens savent faire preuve d’humilité… et de solidarité envers leurs roadies.

Que dire de ce concert de Benighted ? Déjà qu’il fut brutal mais aussi, comme ceux délivrés par les autres groupes, chaleureux. Tout commence par un « Reptilian » (précédé de son intro en forme de comptine malsaine « Hush Little Baby ») qui met dans l’ambiance à coups de blast beats, cris porcins et autres gruiks. On est là pour en prendre plein la figure mais on ne va pas s’en plaindre. « Ça fait putain de huit années qu’on n’est pas venus et à chaque fois c’est le bordel alors on compte sur vous encore ce soir ! » annonce d’entrée Julien à un public qui, malgré la fatigue, ne s’est pas prié pour lui obéir (on a même aperçu le batteur de Sublime Cadaveric Decomposition slammer à plusieurs reprises).

Un « Let the blood fills until my fucking broken teeth ! » hurlé et répété en chœur par l’audience et la folie schizophrène s’installe aussi bien sur scène que dans la salle.

Le frontman toujours aussi peu avare en communication félicite pour les slams, appelle aussi à la vigilance pour ne pas se blesser et réclame une minute de calme (sic) et de violence pour « Necrobreed ». Et lorsqu’il déclare que c’est le moment de se casser la nuque, les cirle pits et stages diving s’enchainent.

Niveau humour le public a droit à une drôle de description de « Slut » (« ça veut dire maman en anglais » nous est-il précisé), un titre qui est aussi prétexte à reprendre le refrain avec les fans tandis que l’accrocheur « Versipelis » est présenté comme un morceau évoquant… des goûters et du chocolat. Soulignons aussi que si la musique de Benighted est brutale, le son n’en reste pas moins clair et permet de distinguer chaque instrument.

Ce concert est aussi prétexte à faire monter sur scène une invitée, en l’occurrence Aurélie, chanteuse du groupe Akiavel qui vient interpréter en duo « Fœtus » avant que le groupe ne conclue son set une première fois avec l’unique extrait de Carnivore Sublime interprété ce soir : le puissant « Experience Your Flesh ».

Tout le monde est ravi et une photo rassemblant public, organisateurs et musiciens est prise. Mais le combo fait un dernier cadeau aux fans qui réclament un rappel, interprétant sa furieuse reprise du « Biotech Is Godzilla » de Sepultura avant un chaleureux « Merci Chaulnes à bientôt ! » lancé par Julien qui en profite aussi pour serrer quelques mains. Benighted a donc clôturé le festival en donnant un concert à la fois brutal et généreux.

Setlist :

« Reptilian »
« Let the Blood Spill Between My Broken Teeth »
« Necrobreed »
« Asylum Cave »
« Martyr »
« Cum with Disgust »
« Teeth and Hatred »
« Collapse »
« Slut »
« Versipellis »
« Fœtus »
« Experience Your Flesh »
« Biotech is Godzilla » (Sepultura)

Le set de Benighted à peine achevé que la conclusion s’impose : cette dix-septième édition du Chaulnes Metalfest a été une franche réussite et s’impose comme étant une des meilleures à s’être déroulée. Les problèmes rencontrés les années précédentes n’ont pas refait surface et tous les groupes se sont donnés pour le public, sans oublier qu’il y en avait pour tous les goûts. Une chose est sûre : rendez-vous est déjà pris l’année prochaine pour la dix-huitième grande fête métallique familiale !

Photos © 2019 Shooting Metalhead
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe

 



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