Motocultor 2019 - vendredi 16 août
Véritable début des hostilités après une première journée thématique et plutôt calme.
La météo est tout à fait appréciable en ce début de seconde journée du Motocultor, cru 2019. Il fait bon en début d'après-midi, le temps parfait pour apprécier tous les concerts sans suffoquer sous le soleil de plomb par trente degrés. Y compris et notamment les concerts en extérieur sur la Supositor Stage, qui se révèle enfin au public après avoir été fermée la veille. Les festivaliers peuvent redécouvrir sa pente en fosse, qui a tendance à se révéler légèrement casse-gueule lors des gros mouvements de foule. Malheureusement, on va voir que la météo ne restera clairement pas idéale jusqu'au bout, et le soleil chatoyant va se muer en une averse impitoyable pour le public, pour les bénévoles et pour les artistes. Prélude à un samedi encore plus humide.
Oak’s Crown
Massey Ferguscène - 13h30
Mars Red Sky démarrait la journée sous la Dave Mustage avec son stoner psychédélique, Oak's Crown continue de plus belle en donnant dans les riffs lourds et puissants, avec ce qu’il faut de basses extra fortes et assommantes. Ça bourdonne sous la Massey Ferguscène en ce vendredi début d’après-midi ! Le "Power Trio" local, vannetais d'origine (littéralement à quelques bornes du festival) assène à la foule ses riffs surpuissants qui ne manquent pas de groove. Pi Hey (le guitariste-vocaliste) alterne entre chant clair tourmenté, presque noyé dans l'alcool à la Layne Staley, et vociférations lourdes façon Phil Anselmo, parfois accompagné par les hurlements de Fab. Avec les rythmiques lourdes et appuyées, ces vocaux participent à une grosse impression de malaise.
Mais quelques passages plus softs viennent tout de même s'intercaler, l’occasion de placer quelques solos plutôt mélodiques et offrir des instants de “douceur” avant de repartir avec les gros riffs qui tâchent. Du genre de ceux qui déclenchent headbang en règle dans une grande partie de la foule, venue copieusement remplir la tente pour soutenir son poulain et goûter de son stoner infusé de sludge si puissant et efficace.
Au-dessus
Massey Ferguscene - 15h05
Ce début de journée est déjà fort prometteur, et c'est avec Au-Dessus que nous entamons la partie black metal du festival, et c'est peu vous dire que le groupe est prêt à nous délivrer une performance mémorable. Ayant déjà convaincu le public français lors du Fall of Summer ou encore le Hellfest l'an passé, le groupe lituanien marque donc leur première venue au Motocultor sous la Massey Ferguscene, déjà très bien remplie pour ce début de journée.
Le groupe fait son entrée sur une musique très dark et surtout très fort, voyant les membres encapuchés et vêtus de noir, comme s'ils venaient nous délivrer une messe sombre. C'est ainsi que le set débute sur le premier extrait du premier EP "I" , morceau très violent et qui pose l'ambiance rapidement auprès du public. Nous aurons aussi le droit au morceau "III" de ce premier essai, ce titre étant plus abordable mais tout autant malsain, passant parfaitement bien dans la setlist.
Ce qui est frappant avec Au-Dessus, c'est qu'ils arrivent à mettre une atmosphère vraiment gênante et sombre, tout en nous embarquant avec eux dans leur univers des plus inquiétants. De plus, la technicité délivrée par chacun des musiciens est remarquable, et le leader Mantas nous envoûte avec son chant tout au long du set. L'album End of Chapter sera largement défendu lors de leur prestation, avec le puissant "VIII" est ses énormes blast beats ou encore "XI" et "XII : End of Chapter" qui achèvent le concert dignement. On retiendra le son absolument dantesque de ce concert, qui aura permis aux lituaniens de nous envoûter dans une atmosphère vraiment unique sans aucune fausse note.
Setlist :
I
VII
III
X
VIII
XI
XII : End Of Chapter
Iron Reagan
Supositor Stage - 16h40
L'après-midi se poursuit tout en finesse à la bien nommée Supositor Stage avec les thrasheurs chevelus d'Iron Reagan qui reviennent en France après plusieurs années d'absence. Le set, survolté et fiévreux, s'ouvre sur l'élégant « Eat, Shit and Live », théâtre du circle pit probablement le plus rapide du festival (après vingt secondes de concert, record à battre). Le crossover thrash du groupe américain fait mouche, porté par l'énergie et le charisme du frontman Tony Foresta (qui officie aussi dans Municipal Waste, tout comme le guitariste Landphil Hall). Les quatre hommes semblent apprécier les retrouvailles avec le public français et enchaînent les titres courts, ultra rapides, et redoutables à grands coups de mouvements de cheveux et de bonds énergiques.
Le public en redemande, les pogos s'enchaînent, et nombreux sont ceux qui reprennent en choeur le refrain de « Fuck The Neighbors » ou la très bonne reprise de Cannibal Corpse « A Skull Full Of Maggots ». Le tempo, déjà très rapide au début du concert, s'accélère encore et toute la barrière bouge, les slams se succèdent à un rythme intense. L'apparente allure détendue d'Iron Reagan ne doit pas faire oublier à quel point leur thrash est rapide mais surtout technique, comme on peut l'entendre grâce au son plutôt bien mixé : les soli de guitare mais aussi de basse (avec Rob Skotis, impeccable) sont impressionnants, Ryan Parrish est solide derrière les fûts, les ruptures de rythmes sur des titres comme « Bleed The Fifth » donnent à l'ensemble un aspect fiévreux.
Fin de set pour le sympathique combo avec une belle pique de Tony à Donald Trump, « this motherfucker », pour annoncer, en assumant la transition, l'énorme titre « Miserable Failure » qui crée dans le pit l'ultime bagarre de ce set ravageur.
Death Angel
Dave Mustage - 17h35
Place au thrash metal en ce vendredi avec une valeur sûre du genre, j'ai nommé Death Angel. Cette première date au festival nolfféen marque l'avant-dernier concert du combo californien avant la fin de leur tournée estivale, qui les a aussi vu passer par le Hellfest deux mois auparavant Le groupe vient nous présenter son dernier excellent opus, Humanicide, qui est truffé de pépites thrash et qui est d'une efficacité tranchante.
La prestation de Death Angel ne démérite pas de leur réputation : les musiciens débutent le show par le puissant "Thrown to the Wolves" qui met de suite le public en folie. Le refrain de ce morceau étant chanté en choeur par la foule, on est de suite porté par l'Ange de la Mort, et ce n'est que le début. Le combo pioche des morceaux de chacun de leurs récents albums, avec "The Moth" de l'excellent The Evil Divide ou encore le titre éponyme "The Dreams Calls For Blood" qui est d'une grande efficacité en live.
Nous aurons le droit à deux extraits du dernier album Humanicide en fin de set, avec le morceau "The Pack" qui est précédé par l'introduction légendaire du morceau "The Ultra-Violence" qui fait son effet pour les fans de la première heure. Le concert s'achève ainsi sur le single qui donne son nom au dernier opus, "Humanicide" qui voit la foule se défouler plus que jamais, Death Angel les ayant convaincu du début à la fin de leur show. Grand moment et énorme prestation de la part des Californiens, toujours au top, malgré un set beaucoup trop court !
setlist :
Thrown to the Wolves
Claws in So Deep
Voracious Souls
The Moth
The Dream Calls for Blood
The Ultra-Violence / The Pack
Humanicide
Tribulation
Supositor Stage - 18h25
La rédaction est de retour sur la scène du Supositor Stage afin d'assister au concert d'un des groupes à qui tout sourit en ce moment : Tribulation. En effet, les Suédois sont en bonne ascension actuellement, après la sortie de leur très bon album Down Below sorti l'an passé. De plus, le groupe accompagnera leurs compères Ghost durant sa tournée européenne The Ultimate Tour Named Death, de quoi les réjouir et conquérir de nouveaux fans.
Pour ce qui est de leur prestation durant le Motocultor, le set de Tribulation démarre sur "La Vie en Rose" d'Edith Piaf qui résonne sur toute la scène extérieure et qui fait vraiment son effet auprès du public, très présent devant le Supositor Stage. Le groupe fait ainsi son entrée sur "Melancholia" qui, comme toujours, introduit parfaitement le combo, tous vêtus de noir et au style androgyne avec leur maquillage très sombre, mais qui colle tellement à leur univers.
On est porté par l'atmosphère ainsi créée par le groupe, dans un délire à fois death, black metal voire même gothique par moment. L'étendue de ses différents styles est représentée dans leur dernier album, et celui-ci sera majoritairement interprété ce soir avec le très mélodique "The Mothergood of God" ou encore "The World" sur lequel le public se déchaîne. Le set s'achève sur "Lacrimosa", sur lequel Tribulation met une ambiance de folie après nous avoir offert une prestation parfaite, sans aucune fausse note, et qui nous donne une folle envie de (ré)écouter leur dernier opus avant leur retour en France en fin d'année.
setlist:
Melancholia
The Lament
The Motherhood of God
Cries From the Underworld
The World
Strange Gateways Beckon
Lacrimosa
Ange
Massey Ferguscène - 18h25
Les années passent, et Ange est toujours présent dans le paysage musical français. De l’eau a coulé sous les ponts depuis les débuts de la formation de rock progressif du pays de Belfort, c’est le moins que l’on puisse dire : en janvier prochain, le groupe célèbrera ses 50 ans de carrière, rien que ça. Alors du line-up original, il ne reste aujourd’hui plus que l’irremplaçable chanteur, parolier et poète un peu fou à la fois, Christian Décamps. Et depuis déjà plus de 20 ans, c’est son propre fils Tristan qui a repris la place de claviériste, laissée vacante par son oncle Francis parti s’exprimer dans Gens De La Lune. Une affaire de famille ? Assurément, et une de celles dont on apprécie toujours autant d’aller prendre des nouvelles !
En fond de scène, le soleil souriant du dernier album, Heureux, dont le premier titre est issu, "L’autre est plus précieux que le temps”. Tristan, positionné de profil à la droite de la scène sur un petit piédestal, se donne déjà à fond pendant un long solo, tourné vers ses partenaires de musique. Thierry à la basse et Benoît à la batterie restent assez discrets, un peu en retrait derrière les messieurs Décamps : fils, et surtout père. Ce dernier, après avoir (fort bien) tenu plusieurs rôles dont celui de Merlin pour le set d’Excalibur la veille, est ici habillé plus sobrement tout en noir avec son grand chapeau, parti pour interpréter ses textes. "Interpréter", sans exagération, est indéniablement le terme approprié, tant Christian semble habité par les paroles, dansant par ci, mimant le personnage de l'intrigue par là. Voire quittant même la scène pour revenir avec une chouette en peluche qu'il caresse pour le second titre, “Aujourd’hui c’est la fête chez l’apprenti-sorcier". Sacré personnage, on ne s’ennuie pas !
Avant de revenir aux classiques, Ange joue encore un dernier titre de Heureux, le long et progressif "Jour de chance pour un poète en mal de rimes", qui est décidément aussi bon en live qu’en studio et voit Christian passer au synthétiseur pour des échanges avec Tristan. À la fin de ce troisième morceau, on se dit que le groupe va bien devoir tailler dans les classiques pour tenir la durée du set (50 minutes, c’est assez peu quand on joue du prog) : exit “Godevin le Vilain”, “Sur la Trace Des Fées” ou “Ballade Pour une Orgie”. À l’exception de l’immanquable “Ode à Emile”, le set fait la part belle au fleuve “Quasimodo” et sa deuxième ligne de chant assurée par Tristan, quand “Les Lorgnons” et “Vu d’un Chien” se chargent de représenter les années 80 du groupe, avec la basse slap qui claque bien comme il faut. Et toujours cet acteur de Christian Décamps, qui tel le chien aboie sur scène puis mord son os.
Enfin, quand arrive le temps du rappel, après un petit message en hommage à Jacques Brel c’est par la célèbre reprise de “Ces-gens Là” que se termine le concert des vieux briscards. Presque cinquante ans après les débuts du groupe, et pour la toute première fois en festival de metal, Ange a largement su assurer le show et contenter le public. C'était une des plus grosses inconnues de cette édition : on pouvait logiquement se demander si le Motocultor était le bon endroit pour les retrouver en festival, qui plus est le même jour que Magma. Pari réussi, bravo les gars.
setlist :
L’autre est plus précieux que le temps
Aujourd’hui c’est la fête chez l’apprenti-sorcier
Jour de chance pour un poète en mal de rimes
Les lorgnons
Quasimodo
Ode à Emile
Vu d’un chien
Ces Gens-là
Soilwork
Dave Mustage - 19h25
Le combo suédois vient d'enchaîner de nombreuses dates de festivals pendant l'été, après avoir largement tourné en Europe début 2019 avec Amorphis. C'est donc un show rodé et efficace que les patrons du death mélodique vont offrir, marqué cependant par un gros bémol, voire une malédiction tant la chose est fréquente pour eux : le son. On est loin du désastre complet, mais dès l'entame du show, on peut constater avec “Arrival” que le son des guitares et de la batterie est bien trop fort, au détriment des synthés. Le côté mélodique du set perdra en intensité à cause de ce mixage brouillon (qui malheureusement concernera d'autres concerts de la Dave Mustage). Sur “The Living Infinite I” par exemple, tout l'aspect synthwave particulièrement réminiscent de The Night Flight Orchestra (l'autre groupe du chanteur Björn Strid et du guitariste David Andersson) disparaît complètement dans le mix.
Cependant, on est loin du show raté pour Soilwork. Le chant de Björn « Speed » Strid est bien réglé, net et juste, et on peut apprécier réellement en live son coffre et son talent indéniable pour passer (apparemment aisément) du growl death au chant clair dans les refrains accrocheurs, sur des titres comme “The Akuma Afterglow”. Le frontman fait preuve d'un réel charisme, et les musiciens ce soir semblent à l'aise, interagissant volontiers entre eux ou avec le public, qui en redemande. Les titres du dernier album, Verkligheten, sonnent particulièrement bien en live, comme “Full Moon Shoals”, repris par le public, ou l'excellent “Stålfågel” présenté en fin de concert après le classique “Stabbing The Drama”.
Un set en demi-teinte, donc, pour les Suédois. Le son un peu brouillon sur certains titres a pu en décourager certains, mais le concert globalement de qualité et les efforts du combo pour communier avec le public ont porté leurs fruits. La setlist équilibrée entre titres plus anciens et nouveautés, le death mélodique bien exécuté, plein de testostérone, avec des soli à l'ancienne du frenchie Sylvain Coudret et un son rétro sur certains titres, porté par le timbre et la puissance de Speed, ont su ravir le public, si l'on en croit le nombre de refrains entonnés dans la fosse ou l'ampleur des moshpits spontanés.
setlist:
Verkligheten
Arrival
Nerve
Full Moon Shoals
The Living Infinite I
The Akuma Afterglow
Drowning With Silence
The Phantom
The Ride Majestic
Stabbing The Drama
Stålfågel
Hypocrisy
Dave Mustage - 21h20
D’emblée la disposition scénique frappe, en totale symétrie, avec la batterie très surélevée par rapport aux trois guitaristes au premier rang, Peter Tätgtren étant naturellement au centre. Puis "Rock n Roll Train" d'AC/DC est balancé dans dans les enceintes, chauffant une bonne partie du public, avant l'arrivée du groupe qui entame les hostilités avec "Fractured Millennium". Stoïques, les musiciens ne bougent quasiment pas, headbangant en rythme sur le titre implacable. Pour les novices qui découvrent Hypocrisy, le death mélodique du groupe se drape d’une dimension malsaine et oppressante, si bien que certains plans ne jureraient pas au sein d’une formation post ou même black. Super efficace et prenant, avec le groupe qui enchaîne directement sur "Valley Of The Damned" et ses breaks à réveiller les morts. Il y a déjà du répondant dans la foule !
Puis Peter prend la parole pour indiquer qu’Hypocrisy est en écriture d'album et nous promet qu’il sortira début 2020 (on l’attend), avant de lancer "End Of Disclosure". Changement d'ambiance : c’est un morceau beaucoup plus mélodique, versant plus dans la mélancolie. Ça manque un peu d’énergie pour maintenir la fosse en état d’alerte maximal, mais le titre reste bon et bien servi par ce mix sonore si propre et parfait sur les guitares, qui rend chaque départ en solo aussi précisément retranscrit. Et vu leur qualité (on n’est pas très loin de l'école Maiden là) c’est vraiment un bon point ! Les vocaux ne jouissent en revanche pas d'un aussi bon traitement et on regrette un niveau sonore un poil trop faible pour le micro de Peter, sur à peu près la première moitié du set.
Si “Eraser” et “The Final Chapter” représentent encore le Hypocrisy lent et mélodique, quelques brûlots pleins d’énergie sont encore au programme : “Adjusting The Sun” et "War-Path" notamment, en guise de derniers shots d'adrénaline avant le retour à l'épique (et aux nappes de claviers qui vont avec) "Fire In The Sky", que Peter, loquace ce soir, annonce en lançant un "Let's put fire in the tent !". En somme, un set super propre et plutôt équilibré entre les bons titres énervés au tempo hyper rapide et les morceaux plus lents et lancinants, terminé par “Roswell 47”. Si on peut regretter qu’il n’y ait pas eu plus de riffs rapides, le contrat est rempli et on a eu droit à un des meilleurs sets de death mélodique du festival.
setlist :
Fractured Millenium
Valley of the Damned
End of Disclosure
Adjusting The Sun
Eraser
War-Path
Fire in the Sky
The Final Chapter
Roswell 47
Magma
Massey Ferguscène - 22h15
À l'instar d'Ange plus tôt sur cette même scène, Magma est un des dinosaures du rock progressif qu’a produit l’Hexagone, un de ces groupes références reconnus dans le monde entier pratiquement depuis ses débuts. Et comme les premiers, leur statut de groupe “légendaire” ne les a pas fait prendre la grosse tête : on retrouve toute la formation sur scène pour effectuer elle-même ses balances, alors que les blast beats d'Hypocrisy assènent encore les esgourdes du peuple disposé sous la tente voisine. Pas de quoi empêcher les fins connaisseurs déjà positionnés devant la Massey Ferguscène de reconnaître un des mouvements de “Theusz Hamtaak”, qui va vraisemblablement être interprété ce soir. Il suffit simplement à Christian Vander de s'asseoir devant sa batterie et de tester ses fûts pour enflammer une large part de la foule. Vivement le début du set !
Lumière bleutée, les musiciens arrivent, et sans plus attendre lancent effectivement "Theusz Hamtaak". Ses chœurs malsains, sa lente montée en puissance, ses accords posés d'orgue, et son thème revenant en s'intensifiant par cycles plongent la tente dans une ambiance de transe. La magie opère, et cette rythmique si distinctive, à la fois précise, subtile et surpuissante que nous sert Christian est un régal ! Ce n’est pas un hasard si ce titre est depuis quelques années régulièrement choisi en introduction des concerts, comme cela avait été le cas en 2016 au Hellfest et il y a deux ans au Fall Of Summer. Si cela paraît évident aujourd’hui de programmer Magma dans un festival de metal, au vu de la réputation que la formation a acquis au sein de ce public, il n’y a pas si longtemps c’était, sinon inimaginable, clairement osé.
Après une dizaine de minutes, alors que Magma s'enfonce dans le troisième mouvement du titre sur les roulements saccadés de Christian, le crachin présent à l'extérieur au début du set s’est transformé en véritable averse. Tout autour de la tente des trombes d’eau s’abattent sur le terrain qui devient vite très boueux (on apprendra d’ailleurs dès la fin du set que la violence des intempéries a malheureusement contraint Gaahls Wyrd à interrompre son set sur la Supositor Stage). L’ambiance tribale et incantatoire que dégage la musique en est grandement renforcée et la tente est pratiquement pleine, même si on ne sait pas combien de personnes y sont venues uniquement pour s’abriter.
Une chose est sûre, ce n’est pas parce que le groupe joue en festival qu’il adopte pour autant une setlist courte et incisive. Sans jamais s’interrompre, Magma enchaîne tranquillement dans un medley sur “Wurdah Ïtah”, puis naturellement clôt la trilogie Theusz Hamtaak avec leur plus grand standard, “Mekanïk Destruktïw Kommandöh” : la seule adaptation à laquelle a consenti le groupe est de raccourcir ses œuvres, afin que la trilogie entière tienne dans le set de 50 minutes, quand il faut à peu près une demi-heure pour chacune des 3 parties. Le tout sans que jamais la fatigue ne semble prendre le dessus sur le jeu de Christian, toujours habité par sa musique comme avant. C’est tout simplement remarquable que du haut de ses 71 ans, il reste encore aujourd’hui une référence absolue.
setlist:
Theusz Hamtaak
Wurdah Ïtah
Mekanïk Destruktïw Kommandöh
Watain
Supositor Stage - 00h20 (en fait, 00h40)
Déjà quinze minutes de retard, les réglages semblent difficiles et la situation s'annonce très tendue à la Supositor en ce soir de grosse pluie. Une question est sur toutes les lèvres : le concert de Watain aura-t-il lieu ? La scène est noyée, le concert précédent (Gaahls Wyrd) a été stoppé avant la fin en raison de gros problèmes électriques causés par la pluie. Les conditions sont dantesques, dans l'obscurité, sous le déluge, avec tout autour de la scène de grands arbres qui s'agitent. L'Enfer à Saint-Nolff... qui se trouve être le cadre idéal pour le concert , ou plutôt le rituel occulte concocté par Watain, groupe phare du black metal suédois. Soudain, les préparatifs sont lancés, avec le rituel de l'allumage des tridents retournés (emblèmes du dernier album Trident Wolf Eclipse) et la scène s'enflamme, un autel plein d'ossements d'animaux étant révélé au milieu de la scène... la messe noire peut commencer.
Lorsque les premières notes de « Underneath the Cenotaph » retentissent, on est rassuré sur la qualité sonore du set : ça joue très fort, très vite, le double blast de Håkan Jonsson, bien visible sur son estrade en hauteur, est magistral mais sans étouffer les guitares de Pelle Forsberg et Set Teitan, et surtout le chant black d'outre tombe du frontman Erik Danielsson est parfaitement audible. On peut se dire que des forces occultes ont réussi à résoudre les problèmes techniques, malgré quelques frayeurs lors du deuxième titre quand quelques grésillements menaçants se font entendre dans les enceintes. De même, voir des techniciens se ruer sur scène pour ajuster des branchements vient légèrement casser l'effet cérémonial cherché par Watain, dont les membres arborent, comme à leur habitude, des maquillages inquiétants que la pluie vient faire dégouliner. Point de sang jeté dans le public ce soir, mais Erik va lancer un trident enflammé sur les premiers rangs à l'occasion du titre ravageur "Nuclear Alchemy", ne faisant heureusement aucun dégât.
Quel magnétisme du frontman, qui semble habité du début à la fin du set, communiquant cependant avec le public entre les titres pour une incitation à la mort collective ou pour évoquer les conditions climatiques, en disant que les cieux sont contre eux, en guise d'introduction bienvenue à "Furor Diabolicus". Sa voix est très bien mixée, avec des effets qui renforcent l'effet malsain et morbide des titres plus violents les uns que les autres. L'instrumental n'est pas de reste, et on est impressionné par la rapidité d'exécution et l'extrême violence du black asséné en contraste avec les intros curieusement mélodiques à la guitare, caractéristiques de la musique des Suédois. On retiendra l'entame grandiloquente de l'excellent "Malfeitor", et la fin de set avec l'enchaînement "Towards the Sanctuary" et "Casus Luciferi" qu'Erik Danielsson interprète un trident enflammé à la main.
Le contexte particulier, l'obscurité et la pluie incessante auront donné une dimension encore plus mystique à ce set démoniaque. La fosse, cependant, est loin d'être remplie. L'heure tardive et le déluge ont eu raison d'environ une moitié de fosse de la Supositor, mais les ouailles amassées devant Watain semblent bien plongées dans une communion complète avec le groupe, dans une sorte de recueillement morbide, comme hypnotisées par l'agression visuelle et musicale qui s'offre à eux, par cette splendide scénographie de feu, de lumières, et d'imagerie morbide. Peu de mouvements, mais des hochements de tête et doigts cornus levés bien haut à la moindre injonction du prêtre Erik qui conclut le set d'un tonitruant "We are Watain, till fucking death !". Tel un prêtre, il reste de longues minutes après le départ du groupe, comme en recueillement devant les ossements de l'autel placé au centre de la scène, en opérant des gestes sacrés bien mystérieux.
setlist:
Underneath the Cenotaph
Nuclear Alchemy
Total Funeral
My Fists Are Him
Furor Diabolicus
Sacred Damnation
Malfeitor
Towards the Sanctuary
Casus Luciferi
Turbonegro
Dave Mustage - 01h20
Ca commence à être la tempête en cette fin de journée de festival ; la pluie tombe et le vent souffle sur le site du Motocultor, mais il reste encore le dernier groupe pour clôturer le vendredi, et il s'agit ni plus ni moins de Turbonegro. Il nous est impossible de rater ce type de concert des plus atypiques et des plus funs ! C'est ainsi que le groupe norvégien signe sa première prestation au festival nolfféen, et va nous délivrer leurs hymnes punk et décadents, en totale adéquation avec le taux d'alcoolémie de certain festivaliers qui se seraient trop gavés de 8.6 durant la journée !
Le show est puissant, avec tous les membres du groupe qui sont très énergiques et vêtus tels les Village People qui sortiraient d'une cure de désintoxication ! On a le droit au duo habituel "Part II: Well Hello" et "Part III: Rock N Roll Machine" en début de set qui donne le ton de suite auprès du public qui danse et se déhanche à travers toute la Dave Mustage. Il n'est pas au bout de sa surprise, Anthony Madsen débutant à chanter le mythique "Bohemian Rhapsody" de Vous-Savez-Qui avec un public en délire qui fredonne cet air légendaire à l'unisson pour un grand moment.
Place aussi à l'excellent "All My Friends Are Dead", qui fait toujours aussi bien son effet, et on sent que les musiciens prennent toujours autant de plaisir à interpréter ces morceaux en transmettant un tourbillon d'énergie auprès de la foule, ce qui est fort plaisant. Encore une belle surprise avec une reprise d'Alice Cooper "School's Out", qui fonctionne à merveille, et une autre plus surprenante avec "Fight For Your Right" des Beastie Boys, mais qui fait tellement du bien ! Cet esprit bon enfant se ressentira tout au long de ce concert complètement déjanté, jusqu'à l'inévitable "I Got Erection" qui voit le public chanter avec les Norvégiens une dernière fois avant que le show ne s'achève, avec un grand sourire aux lèvres de la part de tous les festivaliers.
Ces derniers vont devoir "glisser" dans la boue jusqu'au camping, afin de se remettre de leurs émotions de la journée et reprendre le lendemain avec encore une folle programmation qui les attend !
Écrits : Romain, Julie et Félix
Photos: Thomas et Tiphaine sauf Soilwork, Magma et Watain
Photos Soilwork: Matthieu Lelièvre
Photos Magma : Gaël Mathieu
Photos Watain: Sylvain Fragneau et Gaël Mathieu
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