Motocultor 2019 - Dimanche 18 août
L'improbable retour en enfance ...
Après une nuit de tempête, Saint Nolff se réveille sous les rayons tant attendus du soleil breton, de quoi se requinquer pour attaquer la dernière journée de festival. Au programme aujourd'hui, de l'éclectisme encore et toujours, et surtout LA curiosité du festival, à savoir la présence d'Henri Dès, star des tout-petits, en terre metal. Ambiance régressive et fréquentation record, qui nous prouve que les festivaliers metalleux ont pleinement assumé leur statut de "Grands Gamins" !
Third Meridian
12h30 – Massey Ferguscène
Les intempéries ne sont plus qu'un mauvais souvenir, le soleil brille sur Saint Nolff et nous voici très tôt ce midi sous le chapiteau de la Massey, pour découvrir Third Meridian, groupe local se réclamant d'un cinematic post-rock, énigmatique sur le papier mais assez clair et lisible sur scène : un grand écran derrière la batterie diffuse des images de courts métrages illustrant les morceaux tantôt planants, tantôt puissants, en mode instrumental, proposé par les cinq musiciens.
Le concept est très plaisant, chaque morceau étant accompagné d'une ambiance visuelle particulière, mais bien loin d'être froid ou impersonnel. Le post rock atmo de Third Meridian sait interpeller et emmener le public dans un état de contemplation intense, en immersion avec les images malgré le soleil méridien (!) au zénith.
Le concept est attrayant et fort accessible, et on retiendra quelques jolis moments comme l'étrange film “Moonlight Drive”, le riff entêtant d'”Oktober”, ou le bourdonnement sludge électro de l'ultime morceau, “Dark Side”. Le combo vannetais, souriant et expressif, remercie avec humilité le public du Motocultor pour son engagement. Il faut dire que le chapiteau est bien rempli malgré l'horaire précoce, et rien d'étonnant à cela : le mix est très bon, la puissance des guitares incontestable, et les compositions de Third Meridian suffisamment variées et solides pour faire de ces quarante minutes un moment de découverte intense.
Get The Shot
Dave Mustage - 13 h 20
Quoi de mieux pour s'ambiancer un maximum que du hardcore ? C'est ainsi qu'on retrouve les Canadiens de Get The Shot sur la grande scène du Dave Mustage qui est déjà blindé en attendant le groupe à la réputation grandissante, annonçant d'ores et déjà une prestation énergique et une ambiance de folie pour ce début d'après-midi.
Avant le début du concert retentit l'hymne "For Whom the Bell Tolls" de Metallica avec la foule qui chante en choeur pour se mettre en condition avant le show. La jeune formation fait son entrée en envoyant un titre ravageur, avec son frontman Jean-Philippe Lagacé qui réclame dès le départ un circle pit, exécuté par la foule en transe. On verra même des festivaliers se positionner sur les barres qui maintiennent le chapiteau, tout en headbangant au rythme de chacun des titres, plus puissant les uns que les autres.
Le leader est très proche du public, s'exprimant en français québécois quasiment entre chaque morceau, et surtout en s'invitant dans la fosse avec son micro, en slamant même à quelques reprises.
Nous aurons aussi le droit à un discours anti-extrême droite qui verra l'intégralité du public pointer leur majeur, avant que le groupe entame leurs compositions aux sonorités à la fois thrash metal et bien évidemment hardcore, convaincant un public venu en masse pour ce show des plus puissants. Une vraie performance de la part de Get the Shot qui n'a pas fini de faire parler d'eux !
Vampillia
14h05 – Massey Ferguscène
Sur les visages, la curiosité ou l'incrédulité se lisent à l'arrivée sur scène de la demi-douzaine de musiciens qui composent le combo japonais Vampillia. Placés en arc de cercle, une pianiste, une violoniste, deux guitaristes, un bassiste et un batteur se lancent dans une intro folk pour l'arrivée du chanteur, Mongo, qui descend d'un des piliers métalliques du chapiteau ! Ce dernier entame, pieds nus, une danse étrange et entre, déjà, dans l'état second de transe qu'il ne lâchera pas de tout le set. C'est parti pour presque une heure de claque monumentale à la nippone, et on est mis dans le bain très rapidement avec des enchaînements de passage extrêmement violents marqués par le cri guttural du vocaliste, et des moments d'une douceur inattendue.
Vampillia souffle le chaud et le froid, en réussissant à rendre magiques les moments de discordance visuelle ou auditive. Dans le même morceau, les musiciens s'agitent, comme agités de soubresauts, on entend une minute planante et éthérée qui se mue en passage post black ultra violent, avant de replonger dans les méandres d'un pont funky voire disco... on est dans l'avant-garde la plus expérimentale possible, mais sans pour autant se retrouver perdus. Le public, enthousiaste, semble fasciné par la personnalité complètement folle de Mongo qui saute, grimace, slamme et hurle en passant du growl le plus grave aux screams suraigus des oiseaux.
La curieuse alchimie de ces influences si variées, entre violence et douceur, atteint son paroxysme quand on aperçoit sur scène un musicien supplémentaire dans le demi-cercle : l'arrivée de Neige d'Alcest n'est pas annoncée (reconnaissons là l'humilité du personnage) mais son chant inspiré va faire des merveilles, associé aux cris de Mongo et à la belle ligne vocale de la violoniste / choriste. Pour les quelques titres que Neige partage avec Vampillia, ce sont encore des moments de folie furieuse et des moments de toute beauté qui se succèdent ou se superposent, portés par des riffs énormes et une musique à la fois viscérale et hypnotique. Plus qu'un concert, c'est une expérience que le public de la Massey vient de vivre, teintée d'agression, d'étrangeté, de lourdeur, de bruit, de légèreté et de musicalité.
Voivod
16h35 - Dave Mustage
Au beau milieu de l’après-midi, c’est avec plaisir qu’on retrouve Voivod. Le groupe à la carrière presque aussi longue que Metallica a bien ses fans loyaux et fidèles en France et jouit d’une réputation méritée dans le milieu thrash (on pourrait dire techno thrash), mais pour autant, il est difficile de nier que Voivod, ça ne rassemble quand-même pas vraiment les foules. La tente de la Dave Mustage n’est pas remplie, et surtout le groupe doit se contenter d’un petit set de 35 minutes. De quoi aller à l’essentiel ? La réponse est oui.
Snake et Away, accompagnés de Chewy et Rocky investissent la scène, sobrement habillée du logo du groupe en lettres mécaniques et des deux crânes technologiques, toujours liés à l’image du combo québécois, et lancent rapidement avec “Post Society”, le premier extrait de l’EP du même nom sorti il y a trois ans. Le mix du son est correct, la basse est bien ronde et les guitares ressortent bien, garantissant des bon soli précis. La rythmique rapide du titre fait tout pour chauffer la foule, qui reste encore assez amorphe en ce début de set. Qu’à cela ne tienne, les gars enchaînent avec un vieux titre bien speed, “Psychic Vacuum”, de la période Dimension Hatröss. Snake sautille sur scène et les quatre compères se font bien plaisir.
La setlist jouée ce soir alterne, à l’instar des deux premiers morceaux, entre des titres récents de Post Society ou The Wake (“Obsolete Beings” ou encore le super efficace “Iconspiracy”) et des vieux classiques (“Overreaction” et le petit rock ”The Prow”, comme le présente Snake). Au fur et à mesure que la setlist avance, la foule finit par se réveiller et pas mal de départs en slam ont lieu, jusqu’au final sur l’ultra classique et tellement efficace “Voivod”, que Snake dédie à Piggy. C’est la fête sur scène : Snake vient se caler entre Rocky et Chewy prendre la pose pour le dernier solo, puis s’assied en bord de scène alors que la foule s’époumone une dernière fois sur le refrain. “VOIVOD !” C’est fini, c’était court mais bien agréable et surtout très efficace, avec un bon choix de titres sans pour autant oublier les albums les plus récents.
Henri Dès & Ze Grands Gamins
18h25 - Dave Mustage
Le Motocultor a toujours son lot de surprises et apprécie inviter chaque année un groupe à contre-courant de la programmation habituel du festival. Et pour l’édition 2019, nous avions eu la très grande surprise de voir sur l’affiche l’artiste qui a bercé l’enfance de nombreuses personnes, j’ai nommé le seul et unique Henri Dès ! Et oui, le chanteur suisse, âgé de 78 ans, a formé avec son fils Pierrick le groupe Henri Dès & Ze Grands Gamins afin d’interpréter les morceaux de sa discographie, dans un registre punk beaucoup plus bourrin !
Cet événement des plus atypiques se déroule sur la grande scène du Dave Mustage, le chapiteau étant rempli de très nombreux curieux souhaitant découvrir les chansons de leur jeunesse sous un angle plus énervé. La foule crie “Henri !” lorsque celui-ci se dévoile avec son fils à la batterie et un guitariste avec un double neck, avec un manche de guitare et un autre de basse, plutôt inattendu ! De plus, ce dernier est habillé de manière bien original, avec une espèce de perruque rouge à la Marge Simpson et une jupe en toile cirée, plutôt rigolo ! D'entrée de jeu, on sait que l’esprit bon enfant va être de la partie durant tout le concert d’Henri Dès & Ze Grands Gamins, qui ne pouvaient pas mieux porter leur nom !
Le public est complètement fou à l’écoute des morceaux du chanteur, les titres étant très rapides et s'enchaînant directement, avec Henri Dès qui assure le show avec sa guitare, un grand sourire aux lèvres, et surtout un air très surpris tant la foule montre un engouement énorme pour ses chansons. En effet, les paroles de chacun des titres sont scandés en choeurs et résonnent dans l’intégralité du chapiteau, du pur bonheur et quelle ambiance de folie ! Ca slam de partout, les circle pit sont absolument énormes… du jamais vu ! D’ailleurs, grand respect pour les vigiles postés au devant de la scène qui ont assuré la sécurité comme jamais et récupéré chacun des slammers à un rythme effréné, tout ça en chantant à tue-tête avec le public !
Vous l’aurez bien compris, cette dernière journée en compagnie d’Henri Dès est un régal pour les festivaliers, qui sont à fond durant tout le concert, avec notamment “La Petite Charlotte” et son fameux “pan pan pan qui est là ?” que l’intégralité du public chante, avec une accélération très sympathique pour achever le morceau. On retrouvera de nombreuses mises en place durant tout le concert, avec par exemple le maître de cérémonie qui s’empare d’une caisse claire et s’avance au devant de la scène, ou encore son fils Pierrick qui s’empare de percussions et vient rejoindre son papa pour en jouer.
Les interactions avec le public sont aussi extras, avec le batteur qui balance des blagues à tout va, digne du nom d’origine du groupe qui était Explosion de Caca, et oui ! Mais aussi Henri Dès qui, lui, est au premier degré et interprète ses morceaux avec amour et conviction, tout en prenant un énorme plaisir face à tous les festivaliers. C’est ainsi que ce concert s’achève, après une heure de joie et de musique, où la Dave Mustage aura été un réel champ de bataille, qui pourtant est en total contradiction avec le genre musical de Henri Dès ! Le doyen se retire avec un big smile, signant une réussite totale pour une première dans un festival du genre. Il est fort à parier que d’autres festivals metal feront appel à Henri Dès pour leur prochaine édition, on parie sur une apparition au Hellfest en 2020 ? Nous en tout cas, on approuve DI-RECT !
Ihsahn
19h20 - Massey Ferguscène
Ce n’est pas une suprise, Ihsahn est attendu de pied ferme en ce début de soirée pour le dernier jour du Motocultor. Le frontman charismatique d’Emperor, dont la carrière solo est déjà volumineuse depuis un moment est de retour, justement sans Emperor, pour défendre ses albums personnels. À commencer par Ámr, le dernier effort studio sorti en mai l’année dernière. Pas de superflu, les musiciens arrivent sur scène, la foule accueille Ihsahn avec force, et ça commence sur “Lend Me The Eyes Of Millennia”, ouverture du dernier album. Le synthétiseur est omniprésent dès l’intro, et si la voix torturée d’Ihsahn arrive vite, le rythme n’est pas vraiment là : c’est un pari un peu osé pour une setlist de festival, et la foule semble avoir du mal à se laisser emporter par la musique. Quand le groupe enchaîne sur “Arcana Imperii” et ses riffs répétés, presque prog, on s’attend à ce que la sauce monte enfin dans la foule.
Mais toujours rien. Côté foule, ni les moments rythmés, ni les refrains mélancoliques (“It is far too late…”) ne semblent vraiment trouver écho dans le public. Dommage, car Ihsahn et ses musiciens fournissent une bonne prestation, que quelques désagréments (dont une corde cassée pour la guitare de Einar) ne sauraient ternir. Encore un troisième titre d’Ámr en ce début de set avec le “Sámr” et les “Emptiness !” puissants de son refrain. Les choeurs fonctionnent vraiment bien et ressortent du mix grâce à un réglage son nickel. Arktis est également à la fête aujourd’hui avec d’abord “My heart Is From The North” puis “Mass Darkness”.
Quand les guitares dissonantes annoncent “Frozen Lakes On Mars”, on se dit que ça y est, la foule va enfin se réveiller. Mais quand démarrent les riffs acérés si propices au mosh, on ne constate pas plus de réaction dans le public qui reste malheureusement amorphe, insensible aux rythmiques. Dans d’autres conditions, en salle, on avait vu une foule en folie sur ce titre taillé pour le live. Même constat sur “A Grave Inversed”. Peut-être qu’après les ambiances calmes d’Ámr les festivaliers n’étaient pas prêts ? En tout cas, il manque un élément ce soir pour avoir un show parfait d’Ihsahn. On recommande vivement d’aller à un des concerts en salle, le public n’est vraiment pas le même.
Setlist Ihsahn :
- Lend Me The Eyes Of Millennia
- Arcana Imperii
- Sámr
- My Heart is from the north
- Mass Darkness
- Frozen Lakes On Mars
- A Grave Inversed
- Until I Too Dissolve
- Wake
Aborted
19h20 - Supositor Stage
Virage musical complet après le show d'Henri Dès avec la formation belge Aborted, progressant dans un style brutal death metal dont il en est l’un des principaux représentants en Europe. Le groupe vient nous présenter son très bon dernier album TerrorVision sorti l'an passé, la scène étant entièrement décorée aux couleurs de ce dernier opus, présageant une prestation tout autant riche et bien violente comme il se doit.
Ainsi retentit l'introduction de leur dernière galette, en enchaînant sur le terrifiant titre éponyme aux riffs ravageurs, le groupe étant à fond et nous délivrant un début de concert des plus prometteurs. Le son est très violent, ainsi que l'ambiance dans la foule, ce dernier entamant des circle pit autour de la régie de la Supositor Stage et devenant totalement possédé par la musique délivrée par la formation belge. Son leader Sven de Caluwé donne tout sur scène et interagit beaucoup avec le public, celui-ci s'exprimant parfaitement dans la langue de Molière.
Le groupe ne fait pas dans la démesure et enchaîne les titres de leurs anciens opus, avec notamment "Retrogore" qui voit la fosse se défouler plus que jamais, ou encore "Hecatombe" d'une rapidité et d'une violence, tout en restant très groovy. C'est ainsi que le concert s'achève, avec le groupe qui nous annonce qu'ils seront de retour en France en octobre, et avec le duo gagnant "Threading on Vermillion Deception" et "The Saw and the Carnage Done", le public en folie pour une prestation des plus notables. On a déjà hâte de les retrouver en salle pour remettre le couvert !
Setlist Aborted :
- Lasciate ogne speranza
- TerrorVision
- Deep Red
- Necrotic Manifesto
- Hecatomb
- Cadaverous Banquet
- Retrogore
- Vespertine Decay
- The Holocaust Incarnate
- Coffin Upon Coffin
- A Whore D’oeuvre Macabre
- Sanguine Verses (…Of Extirpation)
- Threading on Vermillion Deception
- The Saw and the Carnage Done
Avatar
Dave Mustage - 20h20
On ne pouvait rater le phénomène suédois Avatar, qui rafle absolument tout sur son passage actuellement et qui vient assiéger la Dave Mustage en ce dernier jour de festival ! On les retrouve de nouveau en France après une tournée européenne en début d'année et une première partie un mois auparavant auprès de Slipknot aux Arènes de Nîmes, rien que ça ! Les Suédois apprécient la France et ne cachent pas leur joie durant l’intégralité de leur prestation, d'autant plus qu'il s'agit de la dernière date de leur tournée européenne Avatar Country.
Le groupe compte bien mettre l'ambiance pour cette date, et c'est donc avec "Hail the Apocalypse" qu'ils entament leur set, qui conquis la foule instantanément ! Les titres s'enchaînent, avec le très bon "Statue of the King", extrait du dernier album, ainsi que "Paint Me Red où le maître de cérémonie Johannes Eckerström demande si le public est prêt à saigner pour lui. Vient ensuite l'introduction en arpèges de "Bloody Angel" qui voit l'intégralité de la Dave Mustage chanter en choeurs en en tapant des mains, tout comme pour l'excellent "The Eagle Has Landed" où la foule secoue des mains de gauche à droite, pour une ambiance tout à fait excellent pour cette dernière.
Nous assistons à un très un bon show, tous les musiciens étant au top de leur forme, headbangant sur les rythmes effrénés de chacun de leur morceau, et le public en phase avec eux, un régal ! Vient l'introduction "Glory To Our King" où le guitariste Jonas Jarlsby se voit couronné avant d'entamer " The King Welcomes You to Avatar Country" pour une ambiance de folie, avec Johannes qui s'empare du second guitariste Tim Öhrström et le dépose au devant de la scène avant que ce dernier entame un solo à la wah époustouflant.
La fin du concert approche, le groupe nous annonce que l'ère Avatar Country s'achève ici, et qu'ils seront de retour en Europe prochainement avec de nouveaux morceaux, on a déjà hâte ! Et ce sont sur ces bonnes paroles qu'Avatar nous délivre "Smells Like a Freakshow" pour une ultime bataille dans la fosse, avant que le groupe se retire, nous ayant mis des étoiles pleins les yeux en cette fin de festival.
Setlist Avatar :
- Hail the Apocalypse
- A Statue of the King
- Paint Me Red
- Bloody Angel
- The Eagle Has Landed
- Get in Line
- Let It Burn
- Glory To Our King
- The King Welcomes You to Avatar Country
- Smells Like a Freakshow
Sacred Reich
Supositor Stage - 21h20
En ce dimanche soir, les gars de Sacred Reich sont les derniers représentants du thrash à fouler les scènes du Motocultor. Évidemment ça se passe à la Supositor Stage, et ce devrait être une des dernières occasions d’assister à des mosh pit et autres mouvements de foule bien énergiques (sans voler la vedette à Napalm Death, clôturant réellement la Supositor Stage et qui devrait à n’en pas douter largement remuer les festivaliers une dernière fois). Le groupe a beaucoup d’ancienneté et une bonne réputation, pourtant dès le premier contact avec le dessin caricatural des quatres membres sur la grosse caisse de Dave McClain, de retour aux fûts, on sait que Phil Rind et sa bande sont d’abord là pour se faire plaisir. Ça tombe bien, nous aussi, et on ne va pas être déçu.
Les Américains entament directement avec le lourd et brutal “The American Way”. D’emblée, le riff répétitif et implacable pousse au headbang, malgré le tempo pas tellement speed. Dans la fosse, la tension entre les festivaliers est déjà franchement palpable, la poudrière est prête à exploser. Les guitares de Wiley Arnett et Joey Radziwill, le jeune nouveau guitariste qui remplace Jason (tellement jeune qu’il était encore dans les bourses de son père pour Heal, le dernier album du groupe sorti en... 1996) sont franchement très bien mixées, et le groupe profite largement des conditions météo optimales de cette dernière journée, sans que des cumulonimbus ne viennent menacer la pérennité du concert en balançant quelques averses.
Et puis tout s’accélère, la bande lance les riffs du brûlot thrash “Death Squad”, avec ses riffs d’abord lents et sa grosse accélération, à la manière d’Exodus ou Sodom. Ça y est, les festivaliers se déchaînent, partout dans la fosse les mosh pit se forment et les slammeurs affluent vers la scène. Aucun doute n’est possible, le public attendait sa dose de Sacred Reich ce soir, et Phil le ressent bien : il n’arrête pas de nous remercier. Après avoir annoncé le nouvel album, Awakening (sorti tout juste une semaine après le festival), le groupe nous en sert le titre éponyme, qui tournait déjà depuis un moment. Et force est de constater que même plutôt mou en studio, il passe super bien en live. On a hâte du coup de découvrir les autres.
D’Awakening, Sacred Reich va jouer au final trois autres titres : “Salvation” et son riff “machine à tuer” façon Accept, le plus speed “Divide And Conquer” et surtout le monstrueux “Manifest Reality”, classique et ultra efficace. Et toujours, cette efficacité du groupe dans l’alternance entre les passages bien lourds en mid-tempo avec des gros riffs qui assassinent et les accélérations à l’ancienne bien chiadées, ponctuées par des soli bien envolés. C’est une recette qu’on connaît déjà par coeur évidemment, mais Sacred Reich est irréprochable dans son exécution, avec en prime une setlist de qualité, avec notamment “Free” et “Who’s To Blame”, et ponctuée par le classique “Surf Nicaragua” après la présentation de toute l’équipe. Un dernier mosh géant, et c’en est terminé. Vivement la date à l’Empreinte pour remettre ça !
Setlist Sacred Reich :
- The American Way
- Death Squad
- Awakening
- Free
- Salvation
- Who’s To Blame
- Divide and conquer
- Love... Hate
- Manifest Reality
- Surf Nicaragua
Carpenter Brut
Massey Ferguscène - 23h20
Il se fait tard, la fin est proche, et déjà, l'heure est aux remerciements... « Merci la sécu ! » scande la foule, rendant hommage aux professionnels qui ont assuré comme chaque année un boulot exceptionnel à la sécurité. Chapeau, mesdames et messieurs de chez Budo ! Quant à la musique, même si Carpenter Brut ne ferme pas le festival, c'est pour La Grosse Radio l'occasion de remercier et de féliciter l'organisation du Motocultor Festival et surtout l'armée de techniciens pour leur boulot formidable, notamment sur les nombreux concerts que nous avons couverts sous le chapiteau de la Massey Ferguscène. Que ce soit au son ou à la lumière, la qualité était toujours au rendez-vous sous cette tente, la preuve en est ce concert intense, exceptionnel et mémorable de Carpenter Brut.
Des conditions techniques parfaites, donc, pour entrer sans effort dans l'univers synthwave dark et hypnotique de Carpenter Brut, projet français mené par Franck Hueso, qui entre sur scène devant un public déjà bien chauffé par le karaoké géant proposé sur le tube “Africa” de Toto. Accompagné d'Adrien Grousset (Hacride) à la guitare et de Florian Marcadet (Klone, Hacride) à la batterie, le compositeur et tête pensante du projet vient se placer derrière ses platines dans l'obscurité à droite de la scène, présence fantomatique à contrejour qui va occasionnellement s'avancer pour inciter le public à taper des mains ou à crier, même si cela n'est pas vraiment nécessaire ! Les compositions électro entraînantes et puissantes sont mises en valeur par ce savant arrangement de son et de lumière, plongeant le public de la Massey dans un spectacle sensoriel complet.
Visuellement, les extraits de films de John Carpenter et fausses coupures de presse US défilent sur l'écran de fond, déversant images kitsch, visages de tueurs en séries, pom pom girls et autres explosions d'hémoglobine de série B à un rythme effréné. Les jeux de lumière, somptueux, s'harmonisent avec l'ensemble, les silhouettes des musiciens se dessinant dans des halos roses ou vert, ou disparaissant dans une hypnose stroboscopique. Enfin, et c'est là l'essentiel, l'apport des deux musiciens live change vraiment la donne et apporte au son de Carpenter Brut ce qu'il faut de matière organique et de puissance pour rendre l'ensemble vraiment singulier.
Les morceaux s'enchaînent sans que l'on ressente de monotonie, avec des rythmes qui s'accélèrent et une ambiance de folie dans la fosse. Les metalleux dansent, chantent, mais n'oublient pas leur sport favori, le slam, pour autant. Ce set de Carpenter Brut est le théâtre de mouvements inédits, du pogo-disco à l'électro-crowdsurf en passant par le headbang-karaoké, preuve que le mélange fonctionne à merveille pour peu que l'on ait l'esprit ouvert. On retiendra l'efficace “Turbo Killer” ou les évocations humoristiques du film accompagnant “Beware the Beast”, où sont listés les différents comportements pouvant alerter les parents de potentiels satanistes (le logo de Carpenter Brut apparaissant comme un signe occulte caractéristique). “Le Perv” sera une dernière occasion de profiter du son heavy et extrêmement bien mixé de la guitare et de la batterie, puis arrive déjà le moment de l'ultime karaoké avec la reprise du tube de Flashdance, “Maniac”, hurlée à tue-tête par la foule.
Setlist Carpenter Brut :
- Intro : Africa (Toto)
- Leather Teeth
- Roller Mobster
- Turbo Killer
- Cheerleader Effect
- Disco Zombi Italia
- Beware The Beast
- Le Perv
- Maniac
Bloodbath
Dave Mustage - 00h20
Après quatre jours de festival, les traits sont tirés, beaucoup ont déjà quitté le site, éreintés, et c'est donc une armée clairsemée de courageux noctambules qui s'amasse devant la Dave Mustage. Au programme sous le chapiteau principal en cette heure tardive : ambiance malsaine et growls caverneux, avec un soupçon de maquillage sanglant (beaucoup moins marqué qu'habituellement) et une imagerie morbide. Le combo suédois Bloodbath vient déverser son death metal funèbre en clôture du festival, dans une explosion de noirceur et de malaise du meilleur effet.
Baignés dans un beau jeu de lumières colorées, les cinq musiciens entament le set de façon convaincante avec des titres récents (“Fleishmann”, par exemple, est issu du très bon dernier album The Arrow of Satan is Drawn) qui laissent vite place à des morceaux bien plus anciens, comme “So You Die” (Resurrection Through Carnage, 2002), pour un set balayant parfaitement la longue discographie de Bloodbath, super-groupe qui a réussi à durer et à s'imposer comme référence du genre malgré différents changements de line-up au fil du temps. N'en déplaise aux nostalgiques de Mikael Akerfeldt au chant, c'est une très bonne prestation vocale que livre ce soir Nick Holmes (Paradise Lost), son successeur et vocaliste de Bloodbath depuis cinq ans déjà. Le charismatique Britannique, vêtu d'un costume élégant et grimé en zombie victime d'une blessure à l'arme à feu, est solidement planté sur le devant de la scène, l'attitude solennelle et posée en harmonie avec la lourdeur des borborygmes d'outre-tombe qu'il assène morceau après morceau.
Les guitaristes Anders Blakkheim et Thomas Åkvik assurent aux riffs et aux solos lourds et massifs, soutenus par une ligne de basse impressionnante de Jonas Renske ; les trois hommes jouant également ensemble dans Katatonia. Même si le mix est assez inégal sur les guitares, parfois peu mises en valeur, l'ensemble est rudement efficace, on nage en pleine ambiance malsaine marquée par le growl caverneux de Old Nick, très classe sur le redoutable “Let The Stillborn Come To Me” ou l'excellent “Breeding Death”.
C'est un set convaincant plein de noirceur et de violence que la formation scandinavo-britannique offre ce soir, aussi solide sur les vieux titres que sur les nouveaux. Le public ne s'y trompe pas, et même si on est loin de la foule compacte vue l'après-midi même sous le même chapiteau, les pogos et slams s'enchaînent, les cornes se lèvent bien haut et les têtes bougent à l'unisson dans un geste de communion lugubre.
Alors, oui, on assiste à quelques moments de flottement dans le set. Le batteur, pourtant magistral sur les premiers titres, en arrive à une boulette sur le culte “Cancer of the Soul” que le groupe se voit contraint de recommencer, dans la bonne humeur générale. Il faut dire que l'excellent Martin Axenrot est absent sur cette tournée, occupé avec son autre groupe Opeth, et c'est Waltteri Väyrynen (qui officie avec Nick Holmes dans Paradise Lost, entre autres) qui assure derrière les fûts ce soir... qu'importe, la rythmique est de qualité sur le reste du set, y compris pour l'enchaînement final explosif, du double blast de “Cry My Name” au groove cannibale de “Eaten” : voici l'énorme conclusion de festival, l'occasion pour tous de se casser la voix une dernière fois en hurlant “My one desire, my only wish is to be eateeeen !”.
Setlist Bloodbath
- Fleishmann
- Let The Stillborn Come To Me
- So You Die
- Chainsaw Lullaby
- Brave New Hell
- Breeding Death
- Like Fire
- Cancer Of The Soul
- Warhead Ritual
- Outnumbering the Day
- Wretched
- Cry My Name
- Eaten
Il ne reste plus qu'à remercier une dernière fois la sécu, emportée dans les airs par le public reconnaissant pour un juste retour des choses et un peu d'amusement et voilà, il est l'heure de rentrer, de gratter la boue et sécher les chaussettes, soigner les contusions, et rattraper tout ce sommeil en retard tout en pensant, déjà, peut-être à l'édition prochaine... au revoir et merci, le Motoc, pour ces bons moments !
Rédaction : Romain, Felix et Julie.
Crédits photographies : Tiphaine Zanutto - Thomas Orlanth - Gaël Mathieu - Matthieu Lelievre (Acta Infernalis). Toute reproduction interdite.