Alors que Cosmicism, le nouvel album de The Great Old Ones est prévu pour le 25 octobre, nous avons posé quelques questions à Benjamin Guerry, fondateur et leader de la formation pour en savoir un peu plus sur le successeur de EOD : A Tale Of Dark Legacy. Au menu, travail de composition, nouveau line-up et bien entendu le Maître de Providence, HP Lovecraft. Entretien avec un Grand Ancien.
Bonjour Benjamin et merci de nous accorder cet entretien pour La Grosse Radio. Nous sommes ici pour parler de Cosmicism, votre nouvel album. Après le succès reçu par EOD : A Tale of Dark Legacy, appréhendais-tu la composition et la sortie de ce nouvel album ?
Bonjour à toi. Il y a toujours une sorte d’appréhension avant de démarrer la composition d’un nouvel album. Nous avons toujours eu à cœur de ne pas proposer le même album deux fois, d’essayer de nouvelles choses. Et démarrer d’une page blanche n’est jamais simple, il y a souvent des doutes. Mais une fois cette phase passée, tout s’enchaine, les nouveaux morceaux prennent forme, et les émotions sont là. Nous sommes très satisfaits de Cosmicism, et très excités à l’idée qu’il sera bientôt intégralement dévoilé. Il sera, je l’espère, une nouvelle étape pour TGOO.
Jeff Grimal était à tes côtés pratiquement dès le début et a quitté TGOO peu de temps après la sortie de l’album précédent. Penses-tu que ce départ et l’arrivée des nouveaux membres ait façonné d’une autre façon la sonorité du groupe sur Cosmicism ?
Sur la composition elle-même cela n’a pas eu d’impact, puisque j’ai toujours composé la majorité de la musique. Ce fut tout de même un sacré changement, mais cela a plutôt amené du positif, et pour tout le monde je pense. Les nouveaux membres ont amené leur sensibilité et leur technique musicale avec eux, en plus de leur envie, et cela a forcément eu un impact sur le rendu final de Cosmicism. On a pu tester beaucoup de choses, sans se mettre de barrière. Et cela se ressent sur l’album.
De même, Benoit Claus (Gorod) a également rejoint le groupe il y a un an. Son style de jeu chez Gorod étant très différent, très technique mais également joyeux et groovy, as-tu eu besoin de le « museler » pour qu’il s’adapte aussi bien à TGOO ?
Le « museler » n’est pas vraiment le bon terme ! Il a bien sûr fallu un certain temps d’adaptation, que ce soit en terme de jeu que de son. Mais il est tellement doué et de bonne volonté que le résultat ne pouvait être qu’excellent. Il a proposé plein de choses très intéressantes pour arranger les parties de basse que j’avais composées, ce qui n’est pas étonnant vu son niveau technique impressionnant. Nous nous sommes apportés beaucoup de choses.
"The Omnicient" et "Nyarlathotep" ont été les deux premiers extraits à être dévoilés. Pourquoi ce choix ? Le premier titre est d’ailleurs l’un des plus long. Vous n’avez pas eu peur que les gens n’écoutent pas le morceau en entier sur les plateformes de streaming étant donné le « mode de consommation » de musique actuel ?
Nous sommes fiers de tous les morceaux de l’album, donc ils étaient difficiles d’en choisir un au détriment d’un autre. Mais ces deux morceaux nous semblaient être bien représentatifs de ce qui se passe dans le disque. On y retrouve la lourdeur, les sentiments épiques, la mélancolie, ainsi que les ambiances qui ont toujours caractérisé les morceaux de TGOO. Nous pourrions ne choisir que les morceaux les plus courts et prendre moins de risque vis-à-vis de l’attention de l’auditeur, mais cela ne nous correspondrait pas.
L’album sortira dans une digibox deluxe chez Season of Mist, avec une statuette et un titre bonus. Peux tu nous parler de ce choix ? Peux tu nous en dire plus sur le titre bonus également ?
Il a toujours été important pour nous de proposer des objets intéressants et qualitatifs. Et comme pour la musique, nous voulons éviter de nous répéter. Il nous est donc venu l’idée de cette statuette, qui met de plus en valeur l’aspect plus mystérieux de cet album quant à son concept, vu qu’il ne suit pas une seule histoire mais plusieurs, dont le fil rouge est la philosophie du cosmicisme. Cette statuette permet à l’album d’être comme un objet occulte, source de révélations et de savoirs. Le bonus track quant à lui est un morceau inspiré du Poème de Lovecraft « To A Dreamer ». Il est vraiment à part du concept, et se suffit entièrement à lui-même. Pour cette chanson, je n’ai pas écrit les textes mais repris directement les mots de l’auteur et poète. Le texte est court mais possède une force onirique et sombre qui m’a touché.
Jeff a également réalisé la pochette de l’album. Vu qu’il connait très bien le groupe pour en avoir fait partie, lui as-tu laissé carte blanche ou donné des instructions pour la réalisation de l’artwork ?
Jeff aime bien avoir des indications pour les artworks de groupes. Il m’a donc demandé de lui donner quelques pistes de comment je voyais les choses. Pour commencer, je voulais quelque chose de plus illustratif, et c’est exactement ce vers quoi il se tournait à ce moment-là. Son talent a fait le reste. Cette peinture représente tout à fait l’atmosphère de l’album : une invitation au voyage cosmique, dans des univers inconnus, mystérieux, et infinis.
Vous vous apprêtez à prendre la route pour une grosse série de dates en France en tête d’affiche à partir de la fin octobre. Que doit-on attendre de ces concerts ? Quelque chose de spécial pour fêter les dix ans du groupe ?
Nous avons extrêmement hâte de reprendre la route ! Nous travaillons à fond avec nos ingés son et lumière pour proposer un show très intense. L’accent sera bien sûr mis sur notre nouvel album, que nous interpréterons en intégralité sur la plupart des dates, plus certains de nos anciens morceaux bien sûr.
Concernant les dix ans, en fait je ne considère pas vraiment que c’est le cas car 2009 est l’année pendant laquelle j’ai commencé à composer seul, mais c’est en 2011 que TGOO est véritablement devenu un groupe. Donc on verra plutôt dans deux ans pour fêter cela !
Tu as préfacé il y a quelques mois le livre "Cthulhu Metal" de Sebastien Baert. Vois-tu en cela une reconnaissance de ton travail avec le groupe ? N’as-tu pas peur parfois que votre musique et votre travail soient de façon trop réductrice trop souvent assimilés à Lovecraft ?
Cela m’a fait énormément plaisir, et je suis très reconnaissant envers Sébastien et son éditeur de m’avoir donné l’opportunité d’écrire cette préface. Bien sûr, je vois ça comme une sorte d’accomplissement, surtout que TGOO est présent à plusieurs endroits dans le livre. Nous sommes très liés à Lovecraft, et pour nous comme pour certains auditeurs, notre musique et l’auteur sont indissociables. Cependant, cela reste de la musique, et il est tout à fait possible de l’apprécier sans être un fan du Maitre de Providence. Donc cela ne me fait pas vraiment peur. C’est cet ensemble d’éléments qui nous permet de composer et proposer nos albums, dans lesquels différents niveaux de lecture sont possibles.
On a pu vous voir l’an dernier au Hellfest 2018. C’était votre troisième passage à Clisson. Lorsque cela fait trois fois que tu joues dans le cadre du plus grand festival de metal français, est-ce que appréhendes encore ? Ou tu gardes tes petites habitudes ?
Un peu des deux ! Nous savons chaque fois que nous allons nous sentir bien, que ce soit sur scène ou backstage, et que nous allons être très bien accueillis. Jouer au Hellfest est à chaque passage un moment de pur plaisir. Bien sûr il y a une part d’appréhension. Mais dès l’introduction, quand nous entendons notre public se manifester, montrer qu’il nous soutient, tout disparait. Il ne reste que l’adrénaline et l’extase.
Comme je le mentionnais plus haut, cela fait dix ans que tu as fondé le groupe. Quel moment marquant gardes-tu en tête de cette décennie ? Quel est également ton pire souvenir ?
Quand j’ai commencé à composer seul dans ma chambre, je n’imaginais pas que nous en serions là aujourd’hui. Il s’est passé tellement de choses, il y a eu tellement de changements au niveau du line-up… Notre premier Hellfest a bien sûr été un moment particulier, comme notre passage au Roadburn d’ailleurs. Nous avons senti qu’il se passait quelque chose, et pour l’instant, nous n’avions pas tort car le groupe continue d’évoluer. Ce sont toujours des expériences proches de la transe, même si nous restons concentrés. Donc les souvenirs sont presque irréels en fait ! Concernant le pire souvenir, quelques concerts avec des problèmes techniques, mais rien de très passionnant, désolé ! Ah si, j’ai bien failli perdre toutes mes dents de devant à Edimbourg quand un fan a shooté dans mon pied de micro pile poil quand je chantais. J’ai mis quelques secondes à me rendre compte de ce qu’il s’était passé, mais heureusement plus de peur que de mal !
L’œuvre de Lovecraft est assurément associée à la musique du groupe. Quelle est ta nouvelle préférée de l’auteur ?
C’est une question qu’on me pose souvent, et comme tu te doutes, il m’est très difficile d’y répondre. Citer une seule nouvelle est compliqué. Je pourrais citer « L’Appel de Cthulhu » pour son entité charismatique, « Je suis d’Ailleurs » pour sa portée mélancolique, « le Cauchemar D’Innsmouth » pour son action, ou bien « Azathoth » pour sa beauté poétique. Mais en même temps je pourrais en citer bien d’autres, sans pouvoir les départager !
Merci à toi pour tes réponses et nous te souhaitons une bonne tournée ! Avant de se quitter as-tu un dernier mot pour nos lecteurs ?
Un grand merci pour le soutien ! Nous avons mis beaucoup de nous-même dans Cosmicism, notre nouvel album, et espérons que vous voyagerez autant que nous. Hâte de repartir vous présenter cela sur scène.
Interview réalisée par mail en septembre 2019
Photographies : © Droits réservés TGOO/Season of Mist