Au sein de la prolifique scène brutal death technique moderne, Abysmal Dawn n'a jamais eu le niveau de reconnaissance des locomotives telles que Psycroptic, The Faceless, Obscura ou encore Spawn of Possession. Il faut dire que malgré les nombreuses qualités d'un Leveling the Plane of Existence (2011), son album le plus plébiscité, rien ne le démarquait des nombreuses formations du style, contrairement à un Severed Savior par exemple, qui incorporait des touches flamenco à son death technique. Les incessants changements de line up autour de Charles Elliott (chant, guitare) n'ont certainement pas aidé non plus, et c'est avec Phylogenesis que les Américains comptent remettre les pendules à l'heure.
Longtemps figure de proue du label Relapse, les Américains ont signé chez Season of Mist pour ce nouvel album. De quoi imaginer un changement stylistique ? Que nenni. Dans un premier temps, la pochette une fois de plus réalisée par Pär Olofsson (responsable des artworks du combo depuis le premier album From Ashes) nous plonge dans l'univers familier du groupe. De plus, dès les premières notes de "Mundane Existence", l'amateur de brutal death technique se retrouve en terrain connu. Batterie hyper rapide et aux sonorités relativement artificielles, chant brutal et profond et riffs sweepés, Abysmal Dawn applique à la perfection les codes du genre.
Certains titres sortent même du lot et atteignent le niveau d'excellence des compositions de Leveling the Plane of Existence ("The Path of the Totalitarian", "Hedonistic"). "Hedonistic" ou "The Lament Configuration" (placée en conclusion) proposent même un riffing plus groovy et des sonorités plus lourdes (sur le couplet du premier et à 3:05 pour le second) et qui semblent - du moins en apparence - moins mettre à rude épreuve les doigts d'Elliott et de Vito Petroni (guitare). Dans le même état d'esprit, les riffs syncopés du couplet de "Coerced Evolution" apportent un peu de fraicheur à l'ensemble.
Mais rapidement, ce que l'on reprochait depuis longtemps au combo refait surface : le groupe manque de variation (surtout dans le chant de Charles Elliott qui ne s'éloigne jamais de son growl monocorde) et si ses compositions sont bien exécutées, le combo manque encore de personnalité pour être le nouveau Necrophagist ou le nouveau Dying Fetus. C'est notamment flagrant sur des compositions comme "A Speck in the Fabric of Eternity", "Soul-Sick Nation" ou "True to the Blind". L'ensemble est parfaitement exécuté et tout à fait efficace, mais sonne comme un combo de plus de death technique. Avec près de dix-sept ans d'existence, on aurait souhaité un univers plus affirmé de la part du quatuor. La production monolithique est également à l'image des précédents albums d'Abysmal Dawn, avec toutefois une belle rondeur accordée à la basse d'Eliseo Garcia (notamment sur l'introduction de "Coerced Evolution").
S'il y a toutefois un registre dans lequel le groupe excelle, c'est l'exercice de la cover. On se rappelle de "Night's Blood" de Dissection sur Obsolescence, cette fois-ci, c'est l'incontournable Chuck Schuldiner qui est à l'honneur, avec la reprise réussie de "Flattening of Emotions" de Death. Plus lourde que l'originale (car accordée un demi-ton plus bas), elle est également agrémentée d'un chant plus varié de la part de Charles Elliott (ne singeant pas non plus Chuck) et d'une belle introduction tribale de James Coppolino (batterie) qui fait honneur au jeu de feu Sean Reinert.
Pour son cinquième album, Abysmal Dawn ne s'éloigne guère de son genre de prédilection. Et si le groupe propose un death technique de bonne facture et un album relativement solide, ce ne sont malheureusement pas ces huit nouvelles compositions qui lui permettront de sortir du lot des très nombreuses formations que compte ce genre musical. Nul doute qu'en live, le quatuor continuera néanmoins à glaner des fans, l'efficacité du combo n'étant plus à prouver sur scène.
Tracklist :
Mundane Existence
The Path of The Totalitarian
Hedonistic
A Speck in the Fabric of Eternity
Coerced Evolution
True to the Blind
Soul-sick Nation
The Lament Configuration
Flattening of Emotions (Death cover)
Sortie prévue le 17 avril chez Season of Mist
Photographies : © Rodrigo Fredes
