…And Oceans – Cosmic World Mother

Retour presque inespéré de ce groupe culte de l’underground nordique, avec son cinquième album Cosmic World Mother, après une longue absence. Le black metal symphonique des Finlandais …And Oceans est toujours aussi intense mais a cependant un peu perdu ses influences industrielles et son aspect mystérieux, caractéristiques qui en faisaient toute son originalité.

On ne les attendait pas, ou plus. Dix-sept ans sans donner de nouvelles, ou peu si l’on s’en tient à une reformation pour donner quelques concerts en 2017 et publier, en édition limitée, un EP sobrement intitulé …And Oceans deux ans plus tard. Et d’un coup, surprise : un nouvel album de ces Finlandais plutôt originaux est désormais disponible.

...And Oceans, ce nom renvoie à la fin de la décennie quatre-vingt-dix, lorsque que le black metal nordique commençait à chercher d’autres moyens pour exprimer son noble et ténébreux art. L’époque où le mystère venait de l’underground, en sortait peu et où l’on devait se baser sur la musique, uniquement. Le temps où l’on ne trouvait pas de photos de séance de gym ou de barbecue de membres de groupes « evil » sur les réseaux sociaux*, cassant en conséquence un peu la magie.

…And Oceans sortait du lot, déjà par ce nom loin des consonances « trve ».

Et puis le combo finlandais proposait, en plus d’un black metal symphonique de très bonne facture nimbé d’influences industrielles, un univers étrange et ésotérique. Le côté indus lui va s’affirmer complètement lorsque le groupe va opter pour le patronyme Havoc Unit avant d’entamer un silence radio en 2008. Jusqu’à ce printemps 2020 qui voit donc la sortie de Cosmic World Mother à la très réussie et énigmatique (comme l’est le titre) pochette réalisée par Adrien Bousson, graphiste attitré de Season Of Mist. Le côté mystérieux de …And Oceans est toujours là donc, en revanche nous pouvons déjà constater l’absence de titres de chansons dans d’autres langues comme le français par exemple, autre fantaisie autrefois revendiquée par le groupe.

La musique est-elle à la hauteur de cette réussite graphique ? Oui et non.

On ne sait pas si cela est à l’origine de l’orientation stylistique choisie sur Cosmic World Mother mais  le line up a changé juste avant l’enregistrement de ce nouvel album. En effet, le groupe, mené par le guitariste Timo Kontio, a accueilli en ses rangs un nouveau batteur et un nouveau claviériste mais s’est aussi, surtout, séparé de son emblématique vocaliste Kenny alias K-2T4-S remplacé, avantageusement, par l’actuel frontman de Finntroll, Mathias Lillmåns.  Ce dernier s’est aussi chargé d’écrire les paroles de cette nouvelle offrande qui évoquent une vague thématique métaphysique autour de la survie de l’esprit, en tant qu’énergie, après la mort. Ce qui a au moins le mérite de changer de l’éternelle dévotion au grand bouc ou des exposés sur l’espèce protégée du troll des montagnes.

En tout cas en 2020, …And Oceans joue un black metal connoté très années quatre-vingt-dix mais cependant sans le petit grain de folie qui caractérisait jadis les Finlandais. Tout est parfaitement produit et cet album dans le genre est tout à fait recommandable. Mais le problème est que l’on n’échappe pas à une certaine sensation de linéarité à l’écoute de ces onze nouveaux titres.

Il y a quelques réminiscences industrielles ou electro comme lors du break de « Cosmic World Mother » ou dans l’intro cosmique de « The Flickering Lights » mais pour le reste nous restons dans un black symphonique des plus classiques. L’autre reproche que nous pouvons faire à Cosmic World Mother est que le clavier, jadis véritable marque de fabrique du groupe, est moins présent dans le mix, à la faveur des guitares, tout au plus entendons-nous parfois quelques nappes spatiales brèves.

Mais les blackeux adeptes de riffs Panzer et de tempi menés pied au plancher vont se régaler à l’écoute de « The Dissolution of Mind and Matter » et « Apokatastasis » au chant haineux comme un bon vieux Marduk, de « Vigilance and Atrophy » et « Oscillator Epitaph », épiques comme du Emperor, ou les assez « dimmu borgien » « As the After Becomes the Before » et « Helminthiasis ».

Le meilleur morceau de l’album cependant reste « Five of Swords », véritable réussite de black metal qui en plus comporte un refrain qui reste en tête. « Cosmic World Mother » et « One of Light, One of Soil » sont aussi de bons morceaux dans le genre tandis que « In Abhorrence Upon Meadows » est un interlude au piano bienvenu permettant de respirer au milieu de ce déluge de blast beats. Il faut finalement attendre la dernière piste de l’album pour que le tempo ralentisse un peu avec « The Flickering Lights » qui en plus dégage une certaine mélancolie.

Un retour mitigé donc pour le combo finlandais si l’on se réfère à ses premières sorties. En effet, Cosmic World Mother est un honnête album de black metal mais, sans pour autant parler de naufrage dans un océan de médiocrité, il demeure juste un disque correct de …And Oceans.

Liste des titres :

1. « The Dissolution of Mind and Matter »
2. « Vigilance and Atrophy »
3. « Five of Swords »
4. « As the After Becomes the Before »
5. « Cosmic World Mother »
6. « Helminthiasis »
7. « Oscillator Epitaph »
8. « In Abhorrence Upon Meadows »
9. « Apokatastasis »
10. « One of Light, One of Soil »
11. « The Flickering Lights »

*Coucou Nergal

Disponible depuis le 8 mai 2020 sur Season Of Mist

NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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