Le légendaire chanteur de Twisted Sister n'est pas du genre à chômer : entre radio, littérature et cinéma... on retrouve Dee Snider avec son projet solo, comportant déjà deux albums studio au compteur en l'espace de deux ans, rien que ça ! C'est donc en 2020 qu'il a décidé de sortir un premier album live, qui nous permettra de se réconcilier avec les planches le temps du DVD et d'apprécier tous les différents lieux du globe visités par la bande à Snider. YOU CAN'T STOP ROCK N' ROLL !!
Comment s’est déroulé cette dernière tournée ? En gardes-tu de bons souvenirs ?
J’ai des souvenirs incroyables de cette tournée ! Je suis vraiment heureux que tout ait été enregistré car, depuis que j’ai sorti For the Love of Metal en 2018, j’ai enfin pu proposer de nouveaux morceaux afin de réunir le public d’aujourd’hui. Et puis voir ta musique s’inscrire dans les charts américains après de nombreuses années de carrière, c’est une énorme récompense et j’en suis vraiment fier. De plus, l’opportunité de tourner dans le monde et voir le public chanter les nouvelles chansons c’est juste magnifique, surtout pour un artiste comme moi qui s’est fait connaître dans les années 80. Car, en général, le public attend qu’on joue les morceaux classiques de l’époque, et uniquement cela. Mais ce n’a pas été le cas avec moi et la foule voulait entendre mes derniers morceaux, j'en suis plus que ravi.
For the Love of Metal Live comporte des extraits de différents live que tu as donnés autour du globe, et nous met aussi en totale immersion durant cette expérience, peux-tu nous en dire plus ?
En effet, il ne s’agit pas uniquement d’un seul concert complet filmé, comme cela a pu l’être avec Twisted Sister, je pense au Live at Wacken, Live at the Hammersmith, … Il s’agit ici de plusieurs concerts filmés durant la tournée, et on a sélectionné les meilleures prises pour montrer à quel point le metal est universel ainsi que ma musique. C’est pour ça que, sur chacun des morceaux, on passe d’un pays à l’autre, du jour à la nuit, de la pluie au soleil… L’idée est vraiment de montrer que de l’Amérique du Sud jusqu’à l’Europe, nous sommes tous connectés par cette passion du metal qui nous habite.
Le dernier single que tu as sorti pour ce nouvel album, “Prove Me Wrong”, est un texte autobiographique qui incite à prouver aux gens qui ne croient pas en toi qu’ils ont tort. C’est un message qu’on retrouve aussi chez Twisted Sister et qui te semble vraiment cher ?
Tout à fait, j’ai plusieurs messages à faire passer à travers ce morceau à vrai dire. Le premier, c’est de me présenter auprès du public tel que je suis aujourd’hui : voici le nouveau Dee Snider. Il ne s’agit pas d’un morceau oublié du dernier album mais réellement d’une composition créée par moi-même ainsi que par mon guitariste Charlie Bellmore. Lorsque nous l’avons enregistrée, nous voulions vraiment nous inscrire dans une autre démarche, avec une nouvelle attitude, énergie… afin de prouver au public que Dee Snider part sur une autre direction musicale et qu’il doit à s’attendre à tout cela pour le futur de mon groupe. C’est ce que je suis devenu aujourd’hui. Concernant les paroles, on est sur la même veine que “We’re Not Gonna Take It” évidemment : lève-toi, bas-toi et emmerde ces gens qui te disent que tu ne peux pas y arriver. Nous sommes dans un monde où les gens disent très facilement “non” alors qu’ils pensent “oui”. C’est toujours le même problème et cela n’a pas changé malheureusement. Je vais prendre pour exemple mon nouveau roman; j’ai déjà écrit de nombreux scénarios, biographies… j’ai donc pensé qu’il était temps que je m’attaque à cela ! J’ai donc écrit quelques chapitres et j’ai demandé à un libraire de les lire et de me donner son avis dessus. Il m’a répondu plus tard en disant “Dee, continue à chanter et n’essaie pas d’écrire de livres, vraiment”. Je me suis dit “what the fuck ?” [rires] ! Mais cela m’a inspiré, quand quelqu’un me dit “non”, je réponds automatiquement “fuck you” ! Et j’ai quand même écrit mon roman, et je pense qu’il est bon parce que j’y ai cru du début à la fin malgré l’avis négatif que l’on m’a donné. J’ai donc travaillé très dur pour l’écriture de ce roman, et c’est comme ça que j’envisage mes projets, sans permettre à qui que ce soit de me mettre des bâtons dans les roues. C'est de ça dont parle “Prove Me Wrong” : ne jamais céder aux avis négatifs et travailler dur pour prouver qu’ils avaient tort de te juger ainsi.
Comment s’est déroulé la collaboration avec tes musiciens pour la conception de l’album For the Love of Metal ainsi que la mise en place de la tournée ?
Pour l’album, les frères Bellmore [Charlie à la guitare et Nick à la batterie, ndlr] sont vraiment les principaux acteurs et modèles de For the Love of Metal. On s’est entouré de différents musiciens, Nick progressant déjà avec Toxic Holocaust, mais aussi Mark Morton (Lamb of God) et beaucoup d’autres qui ont tous contribué à la réussite de l'album. Au départ, les musiciens qui constituaient le groupe étaient plus une sorte de "sideband". Mais, après avoir travaillé pendant deux ans tous ensemble, on s'est réuni et on s'est imposé comme un vrai groupe live. Ma femme qui me suis depuis presque 40 ans et qui a pu voir une grande partie de mes concerts a vu le line-up actuel et m'a dit "wah Dee, tes lives continuent à botter des fesses !" [rires]. Je l'ai répété aux musiciens et ils se sont sentis comme de réelles rock stars à ce moment là ! Même si le plus important pour tout le monde c'est simplement de proposer de belles prestations, en étant tous unis. On a enregistré "Prove Me Wrong" tous ensemble en tant que groupe, puis j'essaie toujours de les mettre en lumière, comme sur le DVD où l'on a de nombreux plans sur eux, car je veux que le public sache qui ils sont, ce qu'ils jouent et se rendent compte à quel point ils sont indispensables. Chacun d'entre eux projette une énergie dont j'ai besoin pour livrer la meilleure prestation possible, et je peux dire que je suis très satisfait de leur travail au sein de mon projet solo. Même pour les anciens morceaux de Twisted Sister, ils apportent vraiment une nouvelle patte que j'apprécie beaucoup et qui me permet de ne pas me reposer sur mes lauriers.
En effet, vous reprenez quelques morceaux de Twisted Sister en live; prends-tu toujours autant de plaisir à les interpréter, 35 ans après les avoir écrits ?
C'est toujours aussi plaisant oui, car ce sont les morceaux qui me réunissent avec le public depuis toutes ces années. Pour certains, ils sonnent comme des hymnes, et je serai éternellement lié à ces chansons. Il est de mon devoir de les jouer. Après, je séléctionne les morceaux les plus metal comme "Under the Blade", "The Fire Still Burns"... car ils collent à mon projet solo et aux musiciens qui m'accompagnent.
Au fur et à mesure de la progression de ta carrière solo, penses-tu proposer moins de morceaux de Twisted Sister dans tes setlists pour plus mettre en avant tes compositions les plus récentes ?
[rires] C'est le rêve pour chaque artiste solo de pouvoir jouer la musique qu'il joue au moment présent. Je pense à Robert Plant qui a eu de nombreux projets solos qui sont tous tombés dans l'oubli, car son groupe Led Zeppelin est tellement gros qu'il fait de l'ombre à tout ce qu'il entreprendra par la suite. Le seul monument du rock qui a réussi à se faire un nom en tant qu'artiste solo est Ozzy Osbourne. Il a réussi à éclipser son ancien projet et c'est une énorme réussite. Bien évidemment, au début il jouait des morceaux de Black Sabbath en plus de ses compositions, mais maintenant il est le seul à pouvoir jouer pendant deux heures du Ozzy sans aucun problème... et s'il veut reprendre des classiques comme "Paranoid", c'est lui qui choisit ! Cela n'affectera pas les fans, aucunement. Pour ma part, je pense aux personnes qui achètent leur ticket pour voir Dee Snider, et même si je suis très fier de mes compositions, il est inenvisageable que je me produise sans jouer "We're Not Gonna Take It" ! Ca serait un affront, même si ça me plairait énormément, vis-à-vis du public cela m'est impossible.
Depuis que Twisted Sister s’est arrêté, tu n’arrêtes pas de proposer de nouveaux contenus et tu t’impliques beaucoup dans de nombreux projets. C’est une réelle cure de jouvence pour toi j’imagine ?
J'ai toujours eu de nombreuses occupations à coté de Twisted Sister, entre la radio, les films, des publicités, plateaux télé... Je devais commencer à tourner mon premier film en mai. Malheureusement cela n'a pas pu se faire avec le covid... Je recherche toujours à faire de nouvelles choses, car le neuf m'enthousiasme : se donner un challenge à créer de nouveaux sons m'emballe complètement. Bien sur, on ne peut pas être toujours être plein de succès, mais peu importe, je le fais pour moi-même afin de me donner de nouveaux défis dans la vie, me créer des propres obstacles que j'ai envie de surmonter. Comme la comédie musicale que j'ai montée à Broadway en 2012 par exemple [Dee Dos Broadway, ndlr].
On peut donc dire "You can't stop rock n' roll" ?
[rires] Oui absolument, je dis même qu'on ne peut arrêter le rock n' roll, et Dee Snider non plus ! C'est mon état d'esprit c'est certain.
Tu as enchaîné les sorties avec We are the Ones en 2016 et For the Love of Metal en 2018. Envisages-tu la sortie d’un successeur à For the Love of Metal prochainement ?
Je ne sais pas quand encore... et pour le moment ce n'est pas du tout la priorité pour moi. En effet, on commence à voir quelques embryons de morceaux avec les Bellmore, mais c'est tout. Nous songerons à passer en studio quand on se sentira prêts, mais pour le moment il est encore trop tôt. Je suis actuellement en train de travailler sur deux scénarios pour un second film, et cela me prend déjà beaucoup de temps. Avec l'écriture, la réalisation, la post-production... De plus, cela me demande énormément de concentration, donc je ne me vois pas envisager un autre projet parallèle en même temps, cela affecterait mon projet cinématographique indéniablement. D'après moi, j'envisagerais l'enregistrement d'un nouvel album qu'après fin 2021. J'appellerai les gars, et dès qu’ils seront prêts à enregistrer, on remettra le couvert ! De plus, je préfère prendre mon temps et proposer quelque chose de très bon que de me précipiter. Puis les fans qui ont aimé For the Love of Metal vont attendre le prochain album avec encore plus d'impatience que si on sortait un album tous les deux ans.
Il faut reconnaître que tu as été presque visionnaire en ne programmant aucune date en 2020 ! C’est donc pour revenir encore plus fort en 2021 ?
C'est vrai qu'on me prend pour un prophète à ce niveau-là ! Car c'est vrai qu'il est fou de ne programmer aucune date durant toute une année pour un artiste. Mais je tenais absolument à ce que l'année 2020 soit une année sabbatique en terme de concerts, on m'a vraiment pris pour pour un fou ! [rires] Mais j'avais besoin de temps pour écrire les scénarios de mes films; j'ai donc suggéré de sortir l'album live pour 2020, et c'est tout. Il s'avère que tous les shows ont malheureusement été annulés cette année, mais pour le coup cela n'a pas du tout affecté mon agenda !
Serait-ce possible que Twisted Sister fasse un coup de théâtre et se reforme pour quelques concerts événementiels, un peu comme Mötley Crüe l’a fait récemment ?
C'est intéressant... [il réfléchit] J'adore mes amis de Twisted Sister et j'aimerais beaucoup jouer avec eux, cela n'est pas le soucis. Mais actuellement, cela n'est pas du tout ma vision de ce que je souhaite faire dans le domaine musical. Avec le succès de For the Love of Metal, il est plus intéressant pour moi de partir dans cette direction d'artiste solo. Mais j'ai écrit une chanson qui s'appelle "Never Say Never", donc je ne peux pas te dire que nous le ferons, mais peut-être que cela se réalisera ! Pour l'instant, ce n'est pas du tout envisagé, seul l'avenir détient la réponse !
Interview réalisée le 28/07/2020.