Batman Death Metal et la Grosse Radio c'est une grande histoire d'amour. On vous avait déjà fait gagner un tome en décembre, on vous fait gagner le tome 1 de cette réédition particulière et voilà donc une chronique d'un nouveau genre pour un site de musique : une chronique littéraire. DC Comics a décidé de rééditer tous les tomes principaux de l'arc narratif Batman Death Metal en mettant à l'honneur un groupe par tome avec une couverture exclusive, une préface et une interview d'un membre du groupe et une biographie. Ce mois-ci c'est donc Megadeth qui est à l'honneur. Ce numéro vaut-il le détour ?
Intéressons-nous d'abord au contenu intérieur. La préface de Dave Mustaine est sympathique, l'interview et la biographie n'apporteront pas grand chose aux fans du groupe mais pourront permettre aux néophytes du metal de découvrir Megadeth. C'est bien une édition hybride finalement qu'on a entre les mains qui tente d'attirer les fans de comics vers le metal et les fans de metal vers les comics. Malheureusement l'histoire en elle-même va sûrement rebuter le lecteur qui découvre ce monde pour la première fois.
Il faut replacer l'arc narratif de Batman Death Metal qui prend sa source en 2012 lorsque Scott Snyder, le principal scénariste, démarre son "run" (engagement) avec DC Comics. Il va créer beaucoup d'histoires et Death Metal en est la conclusion. Prendre donc cet univers en route demande pas mal d'adaptation : en effet Scott Snyder s'est fait plaisir et a construit un monde qui fait référence à énormément d'histoires de Batman tout en créant quelque chose d'assez fantastique. A la lecture de ce tome 1, il faut digérer les multivers, les différents chevaliers noirs, tous les héros et les différents cross-overs (quand plusieurs héros se retrouvent au sein d'une même aventure), les différentes incarnations de certains héros (Wally West pour Flash) et même un cross-over entre deux maisons d'éditions (Vertigo et DC Comics puisque le comic book Watchmen a été inclus dans l'aventure). Ouf ! C'est complexe et contrairement aux "gros" tomes d'Urban Comics qui regroupent des aventures, il n'y a pas de "précédemment dans" ni de notes d'explications sur les héros. Le néophyte pourra être perdu lors de la première lecture alors que le spécialiste connnaitra déjà l'histoire puisqu'il aura déjà lu l'intégralité de Batman Death Metal lors de sa première sortie en 2020.
Autre point qui pourrait faire hésiter le fan de metal : le prix. 10 euros pour un comic book de 48 pages déjà édité alors que pour 8 euros de plus on peut avoir le comic book qui regroupe en 200 pages une bonne partie des histoires, ça fait un peu mal. D'autant plus que si on compare avec Watchmen qui avait fait l'objet d'une réédition au prix de 4,9 euros le tome, on peut hésiter. Néanmoins, il ne faut pas oublier que la série Batman Death Metal est toute récente et que pour ce prix là, on a une couverture inédite (et belle) mais également interview, préface et biographie. Il faut donc considérer cet objet comme une édition collector d'un CD avec une pochette différente et des contenus bonus. Sur l'intégralité de la série, les fans privilégieront le tome avec leur groupe préféré et les collectionneurs mettront 70 euros en tout pour avoir l'intégralité des aventures.
C'est quand même un comic book de qualité avec couverture rigide et l'objet en lui même claque, notamment avec cet artwork Megadeth sublimement mis en image par Juanjo Guarnido, qui a notamment bossé sur Blacksad ou chez Disney et que les fans de metal ont déjà cotoyé puisqu'il a notamment travaillé avec Freak Kitchen pour le clip de "Freak of the Week". On imagine bien ce tome dans une vitrine avec si possible la signature des différents membres de Megadeth (qui sait, le jour où on pourrait retourner en concert et claquer son PEL pour un pass Meet and Greet).
Quel est donc l'intérêt, surtout à ce prix ? Nous avons déjà évoqué le côté collector non négligeable mais il faut aussi parler de cet univers extrêmement intriguant et attrayant pour les fans de metal que nous sommes : sombre et graphiquement sublime, Greg Capullo le dessinateur s'est vraiment éclaté sur le design des personnages et artistiquement ça en jette, avec des "traceurs visuels" qui nous parlent de suite. On a constamment l'impression que nos héros évoluent dans les pochettes d'albums des plus sombres groupes de black et de death. Passé le choc narratif, on relit l'histoire pour mieux comprendre et pour mieux apprécier l'oeuvre. Il faudra bien sûr aller fouiller du côté des autres publications pour comprendre l'origine de tout cet univers noir. Et c'est ce que nous vous conseillons : n'hésitez pas à investir dans d'autres oeuvres de Scott Snyder publiées chez Urban Comics (et au rapport qualité prix bien meilleur) comme La Cour des Hiboux et Batman Metal (en trois tomes). Vous comprendrez alors l'univers bourré de références de Scott Snyder qui, comme un autre Snyder très populaire en ce moment (allez voir Justice League en VOD), rend hommage à ce Batman qu'il aime tant même si parfois cela vire au blockbuster un peu fouilli.
DC Comics, en s'ancrant encore plus dans l'univers metal, prend un pari osé qui pourra rebuter certains et qui semblera inutile à d'autres. Il faut vraiment persévérer et considérer cet ouvrage comme une porte d'entrée, brutale certes, vers le monde des comic books ou alors le moyen d'agrémenter sa collection avec un ouvrage sublime qui en appelle d'autres.
Pour les fans de Ghost, le tome 2 sort fin avril puis ensuite, chaque mois ce sera au tour de Lacuna Coil, Opeth, Sepultura, Dream Theater et enfin le maître des ténèbres Ozzy Osbourne.
Disponible depuis le 26 mars 2021 aux éditions Urban Comics, au prix de 10 euros.