Avec Unalive (2019), Mister Misery avait dévoilé un metal moderne à l’esthétique travaillée, entre gothique et cabaret funèbre. La jeune formation suédoise poursuit son parcours et sort aujourd'hui son second opus, A Brighter Side Of Death. Sous l’appellation horror metal, les compositions mettent en avant un metalcore très énergique pour servir l’exploration d’univers macabres et gothiques, avec suffisamment d’espièglerie pour un effet des plus divertissants.
Mister Misery embrasse un style très cinématographique, à coup d’ambiances sonores bien trouvées, et d’une narration gothique mais assez décalée, à la Tim Burton. Le titre "Under the Moonlight", par exemple, revisite la chanson enfantine dans un couplet aussi effrayant que rugueux, marqué par une certaine ironie dans le récit d’horreur, qui contraste avec le refrain très catchy au chant clair assez angélique.
L’album propose une relecture de thèmes classiques de films d’horreur ou de romans gothiques. Ainsi, "Mister Hyde" met en scène le dialogue entre l’homme et le monstre dans un titre sombre et puissant tout en schizophrénie, fidèle à la thématique du roman de R.L.Stevenson : cris death et chant clair s’affrontent sur des lignes de guitares très plaisantes, avant un refrain-hymne prêt à être entonné par le public en live.
Le morceau d’ouverture "The Ballad of the Headless Horseman" revisite Sleepy Hollow en adoptant la perspective du cavalier, suppliant Mr Crane (personnage joué par Johnny Depp dans le film) de le délivrer du sort qui l’a condamné à devenir un meurtrier sans pitié. Le résultats est criant d’efficacité, des riffs galopants au refrain plus qu’entraînant, de la mélodie accrocheuse à l’atmosphère emo-gothique bien retranscrite dans le clip. Ce morceau fait également l’objet d’une version orchestrale présentée en bonus dans l’album.
Navigant entre metal mélodique et rock alternatif, Mister Misery propose des compositions modernes se rapprochant du metalcore à l’américaine à la Motionless In White, comme dans le rythmé "Buried". On retrouve des touches clairement indus dans les accords lourds et les touches de synthé angoissantes de "Burn". L’éclectisme est de mise sur cet opus, qui va jusqu’à un passage carrément EBM dans "In Forever", où Alex Nine place pourtant un solo vraiment bien fait, de gros riffs puissants et des couplets riches sur un tempo surprenant. La performance de Rizzy à la batterie est impeccable, l’infatigable combo proposant sur cet album pas moins de douze titres redoutables rythmiquement.
Il règne une belle énergie sur tout l'album, avec une profusion (peut-être excessive) de refrains efficaces, mélodiques, au chant clair, travaillés comme des hymnes qui entrent dans la tête assez très facilement. Chaque titre donne la part belle à la prestation inspirée et puissante du vocaliste Harley Vendetta, aussi à l’aise en chant clair qu’en saturé. Le combo applique néanmoins un peu toujours cette même recette, créant un effet générique, mais impose finalement assez de créativité dans les couplets pour sortir certains morceaux du lot.
Parmi ces morceaux qui se démarquent, citons trois compositions aux titres liés à l’enfer dont l’imagerie colle parfaitement à l’esthétique du groupe. Le tentaculaire et énergique "Through Hell", accrocheur au possible, impressionne par la diversité et la technicité des passages de guitares, par moments teintées d’un filtre un peu rétro. Le combo grimé ne s’est pas contenté de revisiter des récits déjà existants, il a également créé un personnage diabolique et effrayant, héros du titre le plus agressif de l’album, "Clown Prince of Hell". Le tableau de la fête foraine terrifiante est à son comble dans ce morceau au summum du fun, très lourd dans ses instrumentations, avec une dissonance dans les riffs, une énorme rythmique, et un refrain où le chant clair, chose inédite dans l’album, disparaît complètement au profit d'un hurlement sinistre.
Enfin, le riff écrasant de "The Devil In Me" reprend la mélodie de la boîte à musique flippante de son introduction. Ambiance film d’horreur et nouvelle bataille entre chant clair et growl pour ce single tout en groove évoquant une âme possédée, agrémenté d’un clip clin d’oeil à L’Exorciste.
Avec A Brighter Side Of Death, Mister Misery signe un opus plus dense et massif que le précédent. Les Suédois ont gagné en puissance et en profondeur avec des incursions bien lourdes dans des styles heavy, s’autorisant des passages death et quelques incursions bienvenues dans le thrash d’école, en témoignent le début de "We Don’t Belong", ou le riff et l’entame effrénée de "I’ll Never Be Yours". Il y a finalement plus à entendre que des refrains au chant clair, et c’est cette belle technicité à la guitare qui fait la différence ici. Rivalisant de virtuosité pour les riffs, slides et soli, Harley Vendetta et Alex Nine apportent tout son pouvoir mélodique à l’album. Un seul bémol, cet accent sur les guitares se fait parfois au détriment de la basse d’Alister, reléguée au second plan dans le mix.
N’en déplaise aux puristes, le son moderne et terriblement efficace proposé par Mister Misery possède suffisamment d’atouts pour séduire le plus grand nombre. Certains, bien sûr, taxeront le gimmick de facile et racoleur, d’autres pourront trouver le manque de mordant des refrains trop légers, sans vraie originalité, ou reprocheront à The Brighter Side Of Death une longueur excessive. Mais en définitive, si l’intérêt est de divertir, alors il faut se rendre à l’évidence : la promesse est parfaitement tenue. Après plusieurs écoutes, il est difficile de ne pas être happé par les mélodies et l’univers attrayant proposé par le combo suédois. La proposition, malgré la noirceur (toute apparente) de l’esthétique, regorge de fraîcheur, d’ouverture d’esprit et d’énergie, et c’est bien tout ce que l’on pouvait attendre d’un jeune groupe avide de composer en ces temps troublés.
Avec ce second opus plus affirmé, solide techniquement et taillé pour égayer la morosité ambiante, Mister Misery réclame crânement sa place sur la scène alternative moderne. Les fans (et les sceptiques) pourront découvrir le groupe sur scène en ouverture de Beast In Black, pour deux dates françaises prévues – restons optimistes – en décembre 2021.
Tracklist de l'album A Brighter Side Of Death :
01. Ballad Of The Headless Horseman
02. Buried
03. Mister Hyde
04. Burn
05. Devil In Me
06. I’ll Never Be Yours
07. Under The Moonlight
08. In Forever (We All Fall Down)
09. Clown Prince Of Hell
10. We Don’t Belong
11. Home
12. Through Hell
13. Ballad Of The Headless Horseman (Bonus – Version Orchestrale)
Line-up Mister Misery :
Harley Vendetta : chant, guitare
Alex Nine : guitare
Alister : basse
Rizzy : batterie
A Brighter Side Of Death, second album de Mister Misery, sort le 23 avril 2021 via Arising Empire.