Entretien avec Tomawok pour la sortie de Road To Wisdom

Sortant tout droit d'une répét' dans le cadre d'une résidence à La Tannerie de Bourg-en-Bresse, Tomawok nous a accordé quelques instants afin de deviser à propos de son futur album. Celui-ci sortira le 13 mai prochain, il se nomme Road To Wisdom et l'intéressé nous en dévoile les différents contours.

Bonjour Tomawok, merci d'avoir accepté de répondre à nos questions. Road To Wisdom, autrement dit le chemin vers la sagesse. Tu deviens plus sage avec l'âge ?

(rires) C'est l'histoire de ma vie en fait (rires) ! Mais oui, il y a un peu de cela en effet.

Qu'as-tu voulu y exprimer ?

Mes ressentis, tout simplement. Après, il faut dire que ça a évolué dans les thèmes par rapport aux précédents albums, mais c'est toujours du Tomawok ! Mais j'ai surtout beaucoup travaillé la musique, chose que je faisais moins auparavant. En effet, je m'adressais à différents producteurs et je choisissais les riddims qui me plaisaient, à part peut-être un ou deux "sur mesure". Là, c'est différent, puisque tout a été produit justement "sur mesure". Et concernant les thèmes, c'est toujours ce que j'exprime dans mes albums : la joie, le partage, la musique, la bienveillance, etc...

"je me suis concentré sur des messages sociétaux"

La grosse nouveauté est donc avant tout musicale ?

Tout à fait ! Et j'ai aussi évolué concernant les ganja tunes, avant j'en faisais énormément.

On en retrouve là aussi...

Oui bien évidemment. Et je fais toujours quelques petites allusions dans d'autres morceaux, mais c'est moins axé là-dessus. Là je me suis concentré sur des messages sociétaux.

Comme l'écologie ?

Oui voilà. Ce qu'on boit, ce qu'on mange, ce qu'on vit tout simplement.

Tu parlais d'évolution musicale. Le groupe avec lequel tu répétais à l'instant a-t-il participé à la composition ?

Non. Les riddims ont été produits par D&H, un duo basé à Rennes. Ensuite, les musiciens du One Shot Band ont rajouté des guitares, des cuivres, percus, etc, mais ils n'ont pas composé les riddims. Eux ils m'accompagnent depuis des années pour jouer mes morceaux sur scène.

Crédit photo : LiviPix

"je voulais des morceaux en différentes langues pour mes tournées à l'étranger afin d'avoir quelque chose à transmettre au public dans d'autres pays"

Il y a toujours un éclectisme musical dans cet album, mais aussi linguistique. Tu chantes en français, anglais et espagnol. C'est quelque chose de naturel pour toi ?

En fait, je tourne beaucoup à l'étranger depuis quelques années et je parle donc anglais et le patois jamaïcain. Et sinon, j'avais déjà fait des morceaux en espagnol dans mes projets précédents, mais ça date un peu. Je voulais donc un titre uniquement en espagnol et un autre uniquement en anglais/patois jamaïcain pour cet album. Finalement, je suis super content de cela. C'est ce que je voulais pour mes tournées à l'étranger afin d'avoir quelque chose à transmettre au public dans d'autres pays.

Tu as justement des dates de prévues dans des pays hispanophones ?

Pour l'instant nan. Mais j'ai fait une tournée au Mexique juste avant le covid et apparemment ils veulent me booker à nouveau. Mais sinon, je joue beaucoup en Espagne depuis pas mal de temps, il est donc très probable que j'y retourne. Je vais aussi en Asie régulièrement et ils kiffent même s'ils ne comprennent rien aux paroles (rires). A part les "bilibeng beng" et "bidibam bam" (rires).

As-tu fait quelques sessions en Jamaïque pour cet album ?

Oui. Juste avant le covid (j'ai eu la chance de faire plein de choses avant le covid), je suis parti trois mois en Jamaïque et j'ai enregistré deux featurings pour l'album.

"le confinement m'a permis d'écrire pour d'autres projets ou labels en France ou à l'étranger, chose pour laquelle je n'ai pas spécialement le temps d'habitude"

A propos du covid, les différentes restrictions ont-elles impacté le processus de création de l'album ?

L'album était déjà écrit quand le confinement est arrivé et j'ai pu justement bien préparer l'enregistrement en studio. D'habitude, on enregistre tout le temps entre deux dates et donc là, ça a pu se faire après deux mois de néant. J'ai donc pu me concentrer sur plein de détails (intro, voix,...) que je ne préparais pas forcément avant.

Et sinon le confinement m'a permis d'écrire pour d'autres projets ou labels en France ou à l'étranger, chose pour laquelle je n'ai pas spécialement le temps d'habitude. J'ai travaillé avec des Argentins qui font du roots ou des Thaïlandais qui font du ragga. Du coup, j'ai fait des choses un peu partout.
J'ai pas mal cuisiné aussi pendant le confinement.

D'ailleurs, on te voit souvent manger dans tes clips...

Oui j'aime beaucoup ça (rires).

Justement, peux-tu nous parler du clip d'"Angers City" ?

C'est venu tout naturellement en fait. C'est ma ville, j'y suis né, j'y ai grandi. J'y fais du vélo, du canoë, je vais au marché, je connais la ville et ses alentours par cœur. C'est tout simplement un hommage et il était temps que je le fasse.

Es-tu en contact avec les Zenzile qui sont d'Angers également ?

Carrément ! D'ailleurs, l'ancien guitariste Scott était avec nous en résidence ici hier. Sinon, le clavier et le batteur habitent chacun à côté de chez moi.

Il faut faire un morceau ensemble alors !

On en a déjà parlé de faire un titre ! Ça finira bien par arriver un jour. On pensera à La Grosse Radio (rires) !

"l'album avec Nadem et Keefaz sera disponible l'hiver prochain"

As-tu travaillé avec Irie Ites pour cet album ?

Tout à fait ! Mais on a également développé un autre projet en parallèle consécutif au confinement avec Nadem, qui est du Mans, et Keefaz d'Alençon. On avait déjà en tête de faire un live avec des riddims d'Irie Ites. Mais finalement, vu qu'on avait du temps, on a décidé de se poser pour produire quelques morceaux et c'est carrément devenu un album ! Il sera disponible l'hiver prochain. Deux singles sont déjà sortis et le reste arrivera à la rentrée.

Crédit photo : LiviPix

"on a fait quelques belles dates avec Mesh M18 et notre groupe de grime, dont la première partie de Dizzee Rascal au Cabaret Sauvage"

Abordons les featurings maintenant. Peux-tu nous parler plus précisément de ta relation avec Mesh M18 ?

Ça fait 25 ans qu'il déchire tout ! Il a commencé par rapper sur Paris dans le XVIIIème, d'où le nom Mesh M18 : M pour Montmartre et 18 pour le XVIIIème arrondissement. Je te passe l'info, c'est cadeau (rires). On a fini par se rencontrer à Toulouse en 2007 alors que je faisais un concert avec mon groupe de l'époque, Zetlaskars. Mesh M18 m'a dit qu'avec mon flow rapide, je pouvais poser sur du grime. On a donc monté un groupe de grime peu de temps après à Paris.

Bon, ce n'est toujours pas connu le grime, mais à l'époque ça l'était encore moins (rires). Le grime, c'est entre le rap, le dancehall et l'electro et donc quand j'entends le trap ou la drill aujourd'hui, c'est un peu le même genre de délire. Et à l'époque, en France, c'était pire qu'une niche, on était que quelques-uns à en faire, dont Big Red et deux ou trois autres dont j'ai oublié les noms.

On a fait quelques belles dates avec ce groupe, dont la première partie de Dizzee Rascal au Cabaret Sauvage. On a joué également à Barcelone ou au Chabada à Angers. Mais il est vrai que c'était quand même difficilement programmable. On a tout de même continué jusqu'en 2012, après je me suis plus investi dans mon projet solo.

Il y avait aussi Titine Boy dans le groupe. On était donc trois chanteurs principaux et d'autres qui venaient occasionnellement. On avait également des danseurs, c'était toute une ambiance avec une belle déco. C'était vraiment cool !

"il y a quand même des choses qui se préparent avec Eek-A-Mouse. Restez connectés !"

Et pour cet album, comment s'est déroulée la collaboration ?

Ce n'est pas la première fois que je l'invite sur une de mes productions. En effet, quand on avait notre groupe de grime, on continuait à avoir chacun nos projets respectifs qui étaient plus axés ragga/dancehall. Le grime c'était juste une sorte de side project, sachant qu'on n'était pas des grimeurs. On s'invitait également sur des tournées et il est sur mon premier street album, Clashe pas l'apache. On le retrouve aussi sur mon premier album et sur ma mixtape Inna di Tipi. Et là, il est sur Road To Wisdom, ça fait super plaisir, c'est comme si on fêtait nos 15 ans de collaboration. Le morceau est un gros dancehall ambiance 90's et c'est sûrement le meilleur qu'on a pu faire ensemble.

Et Eek-A-Mouse, tu n'as pas voulu travailler avec lui ? Tu lui as justement rendu hommage dans ton Eek-A-Wok.

A vrai dire, j'y ai pensé ! Mais j'avais déjà travaillé les titres sur lesquels j'aurais pu l'inviter. Il aurait donc fallu l'emmener sur d'autres morceaux et au final ça ne s'est pas fait. D'autant plus qu'à cette époque j'étais justement en Jamaïque et je me suis rabattu sur Junior Cat. Il a apporté un autre flow, car je voulais un gros toaster en mode autoroute (rires). Mais il y a quand même des choses qui se préparent avec Eek-A-Mouse. Restez connectés !

Concernant Chezidek et Capleton, la connexion s'est faite via Irie Ites ?

Pour Chezidek, oui. Alors que je rentrais de Jamaïque il y a trois ans, lui il devait partir en tournée avec Irie Ites. On a donc pris le même avion depuis la Jamaïque. Puis, je l'ai emmené à Tours rejoindre les Ligerians pour leur album commun Timeless (la grosse chronique ici). Et je lui ai dit que si jamais il avait trois ou quatre jours off pendant la tournée, il pouvait venir à la maison. On a fait du footing, on a beaucoup cuisiné et de là est venue l'idée de produire un titre ensemble. Et quand je suis retourné en Jamaïque, on s'est revu et on a donc décidé de faire ce morceau en relation avec la nourriture. On a enregistré ça à Saint-Mary au nord de la Jamaïque.

Et pour Capleton, ça s'est passé avec Irie Crew. C'est que des gens Irie (rires). Ils sont de Nancy et ils ont un super contact avec Capleton. Je les connaissais un petit peu et ils m'ont dit de l'appeler de leur part. Avec Ludo, mon selecta de Turbulent Sound, on est allé chez lui et on a enregistré ce morceau de malade !

tomawok, interview

"je me suis entouré de nouvelles personnes depuis le confinement"

Tu as pu jouer en prison dans le cadre de l'action culturelle à la Tannerie de Bourg-en-Bresse ?

Oui et c'est de cette manière que j'ai pu rencontrer Julie, ma nouvelle manageuse. On ne se connaissait que par les réseaux et elle m'a contacté pour faire des ateliers et un concert au centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse. J'ai accepté et on a bossé pendant trois jours avec les détenus. Et le dernier jour ils ont chanté ce qu'ils avaient écrit. Après j'ai fait un show Tomawok où je parlais de weed en plein centre pénitentiaire, les matons dansaient. Le truc improbable (rires). Et de là est donc née la collaboration avec Julie. C'était une super expérience. J'y retourne d'ailleurs en 2023 pour de nouveaux ateliers.

A ce propos, je tiens à souligner que je me suis entouré de nouvelles personnes depuis le confinement. Julie, dont j'ai déjà parlé, en tant que manageuse. Mais j'ai également un tourneur, NMB Booking. On bénéficie également cette année de l'accompagnement artistique de la Tannerie de Bourg-en-Bresse. C'est dans ce cadre qu'on est actuellement en résidence et il y en aura probablement d'autres.

En ce qui concerne le label c'est toujours Tomawok Records ?

Exactement. C'est toujours indépendant et produit par moi-même. C'est Baco qui distribue et Musical Impact qui fait la promo. La pochette et l'artwork ont été réalisés par Franck Blanquin. Quant aux vidéos, elles sont produites par One Shot Production en Sologne. Les clips sont beaucoup plus pros et de meilleure qualité qu'auparavant.

As-tu quelque chose à ajouter ?

L'album sort en digital, CD et vinyle le 13 mai. La release party aura lieu le 14 mai au Trait d'Union à Evron en Mayenne. J'aurais préféré te dire à l'Olympia, mais on attendra pour ça (rires) !



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