Pour la sortie de son premier album Shelter from the storm, Nadia McAnuff a accordé une interview exclusive à La Grosse Radio. L'occasion d'en apprendre un peu plus sur l'artiste et son premier album. La traduction a été assurée par Gab, le guitariste de The Ligerians.
Un voyage musical de la Soul au Reggae Roots
Lauraggaroots : On va commencer par faire un petit tour sur ta carrière pour te présenter à nos lecteurs qui te découvriraient peut-être. Parle moi de toi, tes débuts, tes inspirations ? J'ai pu lire que tu étais une grande fan de Nina Simone et que tu étais passé par plusieurs styles musicaux, tu peux m'en dire un peu plus ?
Nadia McAnuff : Je suis Nadia McAnuff. En fait, c'est difficile de dire combien d'influences, j'ai, car j'écoute énormément de choses. Du reggae évidemment, du funk de la soul.
Gab, guitariste The Ligerians : Ses grandes influences dans le reggae, c'est évidemment son père parce qu'elle l'a entendu et écouté. C'est évidemment Marley, parce que c'est la légende. Et Peter Tosh. Tout ce qui est la période reggae roots, c'est-à-dire les années 70.
Trouver sa voie au-delà de l'héritage familial
McAnuff est un nom qui résonne depuis longtemps dans reggae music. D'abord avec ton père, le grand Winston et par Matthew, ton frère, une étoile filante. Est-il difficile dans ce cas là de se faire un prénom ?
Nadia McAnuff : Ce n'est pas mon nom qui a fait que je suis dans la musique, parce que j'ai joué avec un groupe qui s'appelle Agape Featuring Nadia Haris aux États-Unis. Avec un producteur qui s'appelle Eric Paredes, quand j'étais à Miami. J'ai toujours fait de la musique quand j'étais en Jamaïque plus jeune. Mais ce n'est pas mon nom, si tu veux, qui a fait que j'ai joué et fait d'autres choses ou que ma carrière musicale a commencé.
C'est sûr qu'avec les autres choses que j'ai faites ensuite, et notamment l'album avec The Ligerians. C'était plus évident de s'appeler McAnuff lié évidemment au reggae roots à ces racines, cette musique qui fait partie de moi. Mais ça ne change pas grand-chose, McAnuff, parce qu'on ne va pas me servir sur un plateau d'argent tous les plateaux et toutes les ouvertures sur les concerts et autres productions. J'ai prouvé par moi-même avant de m'appeler McAnuff que je suis dans la musique et que je fais des choses. Je n'ai pas utilisé mon nom comme une clé pour passer des étapes.
Ton père t'a encouragé dans cette voie là ? Et si oui, il t'a donné quels conseils pour ta carrière ?
Nadia McAnuff : J'ai été éduquée par ma mère et avant que je commence la musique professionnelle, mon père n'était pas vraiment à mes côtés. Ça a été une construction sur le long terme. J'ai eu des correspondances avec lui, mais ce n'est pas lui qui m'a poussé à faire de la musique. Il ne m'a pas ouvert des portes.
Entre inspiration divine et équilibre vocal
Comment t'es venue l'inspiration de tes chansons ? Est-ce que tu travailles ta voix, pour pouvoir gagner en médium et en grave ?
Nadia McAnuff : Il y a deux manières d'être inspirée sur l'album Sheter From the Storm. J'ai des conversations avec Dieu. C'est une forme de méditation que j'entretiens avec ma croyance. C'est de l'ordre des intuitions. Et surtout, quand on a enregistré l'album, c'était à Tours, là où les Ligerians sont basés. Et j'allais souvent au bord de la Loire.
C'est un mélange de réflexion que j'avais et une espèce d'apaisement que j'ai pu trouver ici et là dans la région où l'on était et que j'avais à ce moment-là. Oui, effectivement, je travaille, je fais des exercices vocaux tous les jours.
Un déséquilibre dans l'industrie musicale, pas seulement dans le Reggae
La Jamaïque compte de plus en plus de talents féminins : Naomi Cowan, Sevana, Jaz Elise, Lila Iké, Koffee mais les sorties d'albums se font malheureusement plus rares. Penses tu que le monde du Reggae reste encore trop masculinisé ?
Nadia McAnuff : il pourrait y avoir plus d'artistes féminines, évidemment, il y a une domination masculine dans le reggae et en Jamaïque, mais en fait, c'est dans tous les genres musicaux. Dans l'industrie musicale en général, il devrait y avoir plus d'équilibre. Il y a un déséquilibre qui a été créé. Pour l'instant, il y a une représentation masculine sans doute trop forte. Mais je n'ai pas de solution.
Une rencontre virtuelle devenue réalité avec The Ligerians
Comment s'est passée ton arrivée sur le label Soul Nurse Records et ta rencontre avec The Ligerians ?
Nadia McAnuff : Le premier contact que j'ai eu avec le groupe, c'était pendant le COVID via Internet et les réseaux sociaux. On a fait un EP comme ça à distance, l'EP Nadia McAnuff & The Ligerians qui est sorti. La première fois que j'ai rencontré The Ligerians en vrai, c'était sur le premier tour qu'on a organisé, c'était à l'hiver ou fin de l'automne 2022. C'était notre première rencontre et c'est à ce moment-là qu'on a commencé à travailler sur les morceaux de l'album. C'était une connexion qui s'est faite via un cadre de travail entre le studio et la scène.
L'alchimie musicale de The Ligerians : une collaboration créative
Comment vous fonctionnez avec le groupe ? Est-ce que c'est le groupe qui propose les sons, les rythmes et les arrangements autour des paroles ? Ou l'inverse ? Ou est-ce un consensus ? La qualité instrumentale est tellement exceptionnelle, en parfaite adéquation avec les paroles et le rythme choisi.
Gab guitariste The Ligerians : il y a eu plein de solutions différentes selon les morceaux. Nous, avec The Ligerians, on a une production qui est assez riche. Du coup, on a pu lui proposer des Riddims. Pour certains morceaux, ça s'est passé comme ça. C'est-à-dire, on lui a proposé des choses et elle a écrit dessus. Vu qu'on a eu le temps de répéter, de se poser en studio, il y a des choses qu'on a faites vraiment ensemble, sur le moment où on jouait. On lui proposait des choses, elle proposait aussi de son côté des mélodies. Il y a un ou deux morceaux, elle avait vraiment une chanson qui était déjà là et on a écrit la musique dessus. Donc, si tu veux, il y a eu dans tous les sens possibles et imaginables, mélodie, texte, musique d'abord. Il y a eu vraiment tous les sens.
L'essence de Shelter From the Storm
On va parler un peu de l'album maintenant Shelter From the storm, de quoi ça parle ? Tu peux nous le présenter ?
Nadia McAnuff : C'est un message des messagers. Vu qu'on en a parlé beaucoup, c'est dur de décrire l'album. Si je présente l'album comme ça. C'est une compilation de tout notre travail sur une période donnée. Ce sont beaucoup d'introspections. Ce que j'ai voulu proposer et ça rejoint le titre Shelter from the storm, c'est une espèce de questionnement. Un questionnement à terme sur ma place, ce que je fais, ce qui m'agresse, ce qui me rend bien, ce qui me fait du bien. Tous ces questionnements, en fait, c'est ce que j'ai proposé dans mes textes. En vient le titre de l'album qui veut dire littéralement un abri de la tempête. Ça peut être interprété de manière très littérale, mais c'est aussi quelque chose qui nous rassure, qui nous fait du bien dans les périodes où ça va mal, dans les périodes où on est agressé… En fait, il y a le côté métaphorique et le côté littéral.
Trouver l'abri dans la tempête
Le titre de l'album Shelter from the store (à l'abri de la tempête) qu'est ce qui représente la tempête pour toi ? Et l'abri ?
Nadia McAnuff : La tempête pour moi, ce sont les hauts et les bas qu'on peut avoir dans l'existence et l'abri, c'est la foi qu'on a. C'est une espèce de persévérance qui fait qu'on sait qu'au fond de nous ça va aller. Il faut juste trouver un moyen d'être à l'abri.
On peut voir sur ton EP : Nadia McAnuff & The Ligerians que les titres "Waiting Room" & "So Jah Seh" y sont présents. Pourquoi avoir choisi de les reprendre sur ton album ? Est-ce qu'ils ont une signification particulière pour toi ?
Gab guitariste The Ligerians : Par rapport à tout ce qui se disait dans les autres morceaux, c'était important pour nous de les remettre. De mettre ceux-là en avant, sachant qu'on avait mis d'autres morceaux de l'EP en avant par ailleurs en tant que single. Et en plus, ça s'intégrait dans notre suite de morceaux. Les thématiques et la musique pour nous devaient être intégrées dans cette liste.
Nadia McAnuff et YLSam unissent leurs voix
J'aimerais revenir sur le dernier morceau "Yes We" en combinaison avec ton fils. Le morceau sort un peu de la norme comparé aux autres morceaux de ton album. Et on peut dire que c'est très réussi ! Pourquoi ce choix artistique et comment t'es venu l'idée de partager un morceau avec lui ?
Nadia McAnuff : C'est très important pour moi, ça représente beaucoup de faire un morceau avec mon fils. C'est un rappeur, YLSam qui est basé à Philadelphie. Pour moi, poser sur cette instru plus hip-hop, faire un truc avec lui paraissait évident. Et en plus, il y a le côté maternel avec le texte qui est à propos de comment je me suis sentie une fois en France par rapport à des regards, des sensations un peu malaisantes que j'ai eues. Il y a le côté maternel qui est revenu en disant qu'il faut protéger nos enfants. Du coup, c'était normal qu'avec mon fils, ce soit là-dessus et sur cette thématique.
La communication et la paix, clés d'une unité durable
Nadia McAnuff : La communication et la paix, c'est la chose qui apaisera les hommes en ce moment. C'est ce que je dis dans l'album aussi. La communication, c'est la chose la plus importante pour atteindre la Paix. Une certaine unité entre les gens, pour que les gens s'entendent et arrivent à vivre enfin ensemble, surtout en ces temps.
Vous pouvez retrouver la chronique de l'album – Shelter From The Storm. et l'album en vente sur la Fnac.