En fin d’année dernière sortait discrètement le tout premier album du jeune artiste Raphael. Inconnu aux bataillons sous nos latitudes, Raphael est d’origine Nigéro-Italienne. A l’âge de 16 ans, il fait la rencontre de Botta, son pote bassiste et des 4 autres musiciens Lucio, Giovanni, Alessandro, and Mammolo. A eux 6, ils vont former les Eazy Skankers et écumer la scène reggae italienne pendant plus de 10 ans et réalisant les 1ères parties d’artistes comme Black Uhuru ou Sinhead O'Connor pour ne citer qu’eux.
C’est donc fort de cette expérience que Raphael, devenu entre temps le leader charismatique du groupe (c’est souvent le cas de ceux qui assurent le lead vocal d’un groupe vous me direz) grâce à ses qualités vocales et la qualité de ses lyrics, décide de se lancer à l’aventure, toujours incertaine et pleine d’embuches, de l’album solo.
Entamée en 2012, cette carrière solo a été brillamment lancée par un EP qui s’inutile sobrement My Name Is Raphael. Oui, ça peut paraître simpliste mais se présenter fait partie des prérequis de bases pour entamer une relation constructive. Fort de 8 tracks (c’est pas mal pour un EP quand même ), Raphael annonçait là, son album à venir. C’est donc naturellement en 2013 que sort Mind vs Heart (toujours très simple mais efficace).
Mind vs Heart, se compose de 15 tracks (18 avec les bonus tracks) en anglais façon Jamaïcain-style, vous ne remarquerez à aucun moment que l’homme n’est pas jamaïcain. L’intro est d’une efficacité remarquable où Raphael entonne un très explicite “I am just one, not a perfect man. Me cyaan change the world with my own two hands, but I can sing and tell the people what a gwaan. So sit back, press play and check dis ya one.” à grand renfort de guitare acoustique du plus bel effet, faisant beaucoup penser à Martin Jondo.
Puis on enchaine sur un riddim furieusement roots avec "Laid Back". Superbement produite, cette tune nous met dans l’ambiance tout de suite. Mais malgré sa qualité (on ne peut réellement pas lui reprocher grand-chose) on a une sensation de déjà-vu (proche de ce que pourrait proposer un Jah Sun ou Alborosie par exemple). Pas vraiment de surprise donc.
La même impression se dégage du plus léger "Wine with me", sympathique invitation à la danse. De très bonne facture, mais encore une fois sans réelle surprise. Bon, ça commence un peu moyennement vous vous direz et vous auriez raison, mais ça serait sans compter sur les 12 autres tracks qui suivent.
En effet, l’album démarre sérieusement avec "Soundblaster" où Raphael annonce la couleur : « Hééééé, it’s Raphaeeeeeeeeeeel !! Ooooooh gosh !! So, music must be creativity and not just vanity ! Hear dis !! Boom !! ». Ok, donc là on sent que ça ne va pas être la même ! Et effectivement, on a cette fois-ci vraiment l’impression d’écouter un truc nouveau. Un petit riff de guitare entêtant, couplé à un petit sample pitché « soundblaster ». Raphael utilise un petit gimmick, une sorte de petit cri qui n’est pas sans rappelé les Dj des 70’s comme U-Roy, Big Youth ou Dillinger par exemple. Excellent !
"Mind vs Heart" chanson éponyme, reprend la recette de l’intro : guitare acoustique, voix et bonus ici, quelques percussions apportant un petit côté brute, nyabinghi même je dirais, à l’affaire. Là aussi, simple efficace et très réussi !
"Inna Dis Ya Time" est très roots. De bonne facture, elle se laisse écouter avec plaisir. Alors le morceau qui suit est beaucoup plus surprenant. Soudainement, alors que tout se passait plutôt pas mal, Raphael décide de coller au plus près du titre de sa chanson "In every style" et nous propose une version R&Bisée (ou Rapée je vous laisse seul juge). Ce n’est pas mauvais, mais ce n’est pas non plus celle qu’on retiendra de l’album selon moi.
L’ensemble des tracks suivantes sont toutes orientées roots et sont de très bonne qualité. On retiendra plus particulièrement "Duppies inna dance", "Gideon" ou "Knocking". Deux invités sur cet album et pas des moindres, puisque l’on retrouve le Gwada boy, Tiwony et l’Allemand qui a marqué les esprits avec sa prestation sur le dernier album de Dub Inc, Skarra Mucci.
Au final, il en ressort un album solide, bien construit, fait avec passion et intelligence ; le moins que l’on puisse dire c’est que pour un 1er opus, Raphael frappe très fort. L’ensemble est très clean, maitrisé de bout en bout. Les productions sont léchées et les lyrics, aussi justes sur le fond que sur la forme, sont callées à la perfection.
Un album à se procurer d’urgence et nul doute que nous entendrons parler de cet artiste dans les semaines/mois à venir. Le reggae en Europe se porte bien et ça fait plaisir à entendre.
Site officiel de Raphael, par ici.
Enjoy 😉