La Grosse radio reggae continue ses aventures cross over. Après le reggae salsa de Sergent Garcia, voici le reggae hip-hop de l’Entourloop.
Ce duo de beatmaker stéphanois a déjà fait parler de lui notamment avec des featuring de qualité comme le "Dreader than dread" avec l’intenable Skarra Mucci qui comptabilise plus d’un million de vues sur youtube. Ils sont connus sur la toile pour leurs mash up et leur ep 2 titres « Back in town » sorti fin 2014, ainsi que pour de nombreux mix.
Pourtant malgré un grand nombre de productions à leur actif et des concerts à travers la France et à l’international, ils ont sorti le 4 mai 2015 leur tout premier album Chickens in your town et ce n’est pas peu dire qu’il était attendu.
Composé de The Architect et Deejo, 2 djs multifacettes et diggers infatigables (collectionneurs de vinyls), L’Entourloop fait sa spécialité des mix regggae hip-hop avec un univers bien à eux.
Le titre de l’album fait référence à l’album du dj jamaïcain Dr Alimantado, Best dressed chicken in town, qui parlera aux fins connaisseurs.
Fidèle à leur devise « Banging hip-hop inna yardie style », les 2 trublions débarquent avec 13 titres survitaminés.
Tous les morceaux de l’album sont ponctués d’illustrations sonores bien senties; issus notamment de films français et d’extraits de sons dont on se demande s’ils sont réels ou inventés. Le nom du groupe vient d'ailleurs d'un jeu de mot avec un film de 1980 L'entourloupe, et la boucle (loop en anglais) utilisée par les djs pour répéter une séquence musicale.
Les titres sont d'ailleurs souvent accompagnés de samples, ce qui est une des bases de leur travail musical. Le nom d’un des membres de l’Entourloop, The Architect, dit bien leur volonté d’aller chercher les sons partout où il y en a et de construire sur cette base leur propre musique. On reconnait d’ailleurs certains classiques du reggae. Et ce n’est pas tout, ils s’aventurent aussi sur le terrain du swing, du jazz et d’autres influences dans un joyeux mélange qui ferait bouger la tête du plus insensible.
Ils ont su bien s’entourer par des mc’s tous plus talentueux les uns que les autres, avec tous des styles différents : hip-hop, ragga, jungle, reggae, dubstep, de Jamaïque, d’Angleterre et d’ailleurs.
Certains titres sont clairement hip-hop, d’autres beaucoup plus reggae mais avec toujours cette énergie et ce groove qui font leur marque de fabrique.
Les 2 acolytes arrivent en tout cas à nous emmener dans leur univers peuplé de beat incisifs et de skanks acérés.
L’album s’ouvre sur un titre instrumental aux accents swing avec notamment un solo de trompette révélateur.
Le second titre "Lobster Shwarama" associe un beat hip hop à un skank de guitare où on retrouve Troy Berkley et Khoe Wa pour alterner des couplets hip hop et des passages plus ragga sur fond de musique indienne.
Le titre "Back in town" issu de leur premier ep réuni le vétéran Jamalski pour des passages fast style proche d’un style plus jungle qui se marie bien à une rythmique reggae entraînante. Il est associé au jeune rappeur Bang on ! et à N’Zeng, un ancien du Peuple de l’herbe, pour des solos de trompette. Le style est à rapprocher de l’instrumental "Moving along the line" ou de "Recordz Masta" avec Dj O’legg et Teekay.
On enchaine avec des morceaux vraiment hip hop comme "This how we rock", en duo avec le mc Aaron Cohen et quelques sessions de scratchs puissantes ou encore "Puff of Rhymes" avec Haltman Harry et Zeb Mc Queen sur un tempo plus lent.
Ils s’aventurent sur les terres de la jungle sur le titre "Thru di groove" qui démarre tranquillement en reggae avant de partir sur une instru drum’n’bass porté par le flow de Little Harry et Thioum C.
On retrouve ensuite Skarra Mucci sur "Dirty Money" avec Mc Youthstar, qui a notamment participé à la tournée des 10 ans de Chinese Man et N’zeng. Encore une fois le reggae agrémenté de scratchs et du flow rapide de Skarra Mucci fonctionne très bien.
On continue sur du reggae avec "Madder than that" où la grosse voix et le flow ultrra rapide de Ruffian Rugged fait des merveilles sur un sample classique reggae. Pour moi l’un des meilleurs morceaux de l’album.
Le prochain morceau "AlI want to do" featuring LMK montre encore tout le talent de la chanteuse lyonnaise aussi à l’aise sur un flow hip-hop que plus rapide en mode ragga, dance hall, ce qui convient à merveille au son hybride de l’Entourloop.
Toujours dans l’inventivité, ils arrivent même a marier le hip hop avec le rock steady, sur le surprenant "Bandulu Supa Lova".
Le titre "Time to grow" avec la jeune rappeuse californienne Gavlyn sur des samples de "Born a loser" de Derrick Harriot, clot l’album en douceur.
L’Entourloop signe un très bon premier album dans leur style si particulier et répondent avec brio aux attentes qu’ils ont suscités avec leurs productions précédentes. Avec d’excellents featuring et une recherche musicale pointue (bon courage pour retrouver la totalité des samples utilisés tant ils sont bien insérés), on est vraiment sur un album atypique qui fait du bien.
Un conseil, échauffez-vous bien les cervicales avant d’écouter cet album !