Entretien avec Bazil

A peine fini notre entretien avec Flavia Coelho au No Logo Festival (live report ici), nous croisons Bazil, le MC qui accompagne Manudigital sur sa tournée. Nous lui demandons alors s'il peut nous accorder une interview, proposition qu'il accepte avec plaisir. En effet, le Tourangeau est un fan de La Grosse Radio et il nous le fait clairement savoir durant tout notre échange.

Il nous parle de son admiration pour Damian Marley, de ses expériences à l'étranger (Jamaïque, Etats-Unis) et de ses productions.

Bonjour Bazil, merci de nous recevoir au nom de La Grosse Radio. Peux-tu te présenter ?

Bonjour, je m'appelle Bazil. Je fais de la musique, notamment du reggae, je chante en anglais. Là, je suis au No Logo avec Manudigital. Et je kiffe La Grosse Radio, c'est donc un plaisir d'être ici avec vous !!

Merci ! Tu fais partie de ces chanteurs français qui s'expriment en patois jamaïcain. D'où t'es venu cette volonté ?

C'est parti du fait qu'à l'âge de 10 ou 11 ans, j'ai découvert les albums de Bob Marley, alors que je n'écoutais pas beaucoup de musique à l'époque, du moins je n'étais pas fan d'un genre en particulier. Bob Marley m'intriguait énormément et du coup j'ai essayé de comprendre ce qu'il disait. En effet, sa musique avait quelque chose d'attirant en ce qui concerne les sonorités et je me rendais compte qu'il avait un charisme incroyable en regardant les photos sur les disques. C'est alors que petit à petit, j'ai cherché à en savoir un peu plus, à lire des livres sur lui, sur le reggae, sur la Jamaïque, etc... Parallèlement à cela, je commençais à jouer de la guitare avec mes potes, à écrire quelques rimes et à m'inspirer de ce que j'entendais. J'ai consulté des dictionnaires d'anglais jamaïcain, ça s'est développé au fur et à mesure et plus tard je me suis rendu en Jamaïque et j'ai pu approfondir ce que j'avais initié à Tours, où j'habitais à l'époque.

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Tu as vécu à New York quelques temps, ville qui est très riche musicalement. Qu'as-tu retenu de cette expérience ?

En fait, j'ai vraiment découvert le dancehall moderne là-bas, car avant j'étais encore basé sur le reggae roots 70's et le rub-a-dub 80's. A New York, j'ai été trimballé dans des soirées purement jamaïcaines dans le Queens ou dans le Bronx. Avant d'aller en Jamaïque, j'ai eu un aperçu des soirées uniquement dancehall et c'était énorme. Je découvrais des artistes comme Vybz Kartel, que je ne connaissais absolument pas. Des fois, je me rendais tout seul au fin fond du Queens à une soirée où on m'avait invité. Cette expérience a été très enrichissante pour moi, qu'il s'agisse de la langue, de la culture, du reggae. C'est là-bas également que j'ai rencontré des Jamaïcains pour la première fois.

Ton dernier EP, High on Music, est assez éclectique, on peut y écouter du reggae, du dubstep, du hip-hop. Comment s'est déroulée la composition ?

J'ai sorti mon premier album fin 2011 début 2012 avec Sherkhan à la production. Immédiatement après, j'ai commencé à faire des instrus moi-même. J'ai pu accumuler plusieurs riddims et cet EP je l'ai entièrement produit. Je n'ai pas fait appel à des beatmakers extérieurs, simplement à quelques potes. On a fait les tracks quand on avait le temps, à la maison sur un ordi ou en studio. On a enregistré à différents endroits : des prises de voix ont été faites en Jamaïque, afin d'obtenir un résultat propre, mais d'autres ont été exécutées à l'arrache dans des chambres. Finalement, High on Music est l'aboutissement de tous ces phénomènes, c'est une première production et il est très imparfait ; d'ailleurs, avec le recul, je me rends compte que je changerais plusieurs choses. Mais en même temps, je ne voulais pas d'un disque uniforme avec un seul style : on a composé des morceaux dubstep à base de bass wobble, car j'étais influencé par Skrillex à l'époque, d'autres un peu plus sweet avec des chœurs, mais je tenais tout de même à incorporer un peu de reggae new roots. Ainsi, l'EP est assez versatile, mais c'est entièrement produit à la maison. C'était un essai pour moi afin de voir ce que ça pouvait donner lorsque je me mettais seul à la composition. C'était une bonne expérience.

Tu viens de parler de Skrillex à l'instant. Tu t'inspires également beaucoup de Damian Marley. A ce propos, ton morceau "Love again" m'a beaucoup fait penser au titre qu'ils ont fait en commun, "Make it bun dem". Est-ce un hommage que tu as voulu rendre ?

On voulait composer un morceau de dubstep, on s'est demandé quel était celui qu'on pourrait imiter et on a pris "Make it bun dem" au niveau du tempo et je ne m'en cache pas du tout. "Junior Gong" est un artiste que j'admire énormément, surtout concernant son flow qui oscille entre quelque chose de rapide et un côté plus lent. En fait, c'était plus un exercice de style, à savoir faire une version sans être de gros producteurs, c'est une sorte de clin d'œil. C'est cool que tu l'aies remarqué !!
Je voudrais d'ailleurs adresser un BIG UP à mon pote Romain Ghezal avec lequel j'ai co-produit et réalisé cet EP.

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Quant au morceau "High on music", il est plus influencé par la scène hip-hop américaine contemporaine avec des artistes tels que Travis Scott ou Young Thug. Est-ce que tu suis ce genre d'artistes ?

J'essaye de me tenir au courant, le problème c'est qu'il y a tellement de choses qui sortent en ce moment que j'ai un peu du mal à suivre. Mais il arrive souvent que je sois agréablement surpris en écoutant des morceaux de ce style-là. Parfois, je me dis que je suis bête de ne pas connaître toute la bio des artistes que j'ai pu découvrir, alors que je devrais. Il va vraiment falloir que je m'y mette !
Sinon, je suis un gros fan de Kanye West, j'adore vraiment sa démarche, même si certains disent que c'est un gros con mégalo. Il fait juste parler les gens. Je trouve qu'il a toujours été en avance musicalement. Il fait partie de ces artistes qui n'ont rien à voir avec le reggae que je respecte et qui m'influencent d'une manière ou d'une autre par leur démarche artistique.

Tu accompagnes Manudigital sur sa tournée. Peux-tu nous parler de votre rencontre ?

On s'est connu avec Manu il y a quelques années lorsque mon premier album est sorti. Il m'a fait écouter des instrus qu'il avait composées à l'époque et je les ai trouvées excellentes. Les gens ne le connaissaient pas autant que maintenant, mais je sentais qu'il avait un grand talent ; pour moi, ses productions valaient autant que celles de Corleon ou d'Alborosie. On avait enregistré un single ensemble, "Musical Town", il y a trois ans, qui a reçu un bon accueil. Par la suite, Manu est parti en tournée avec Biga*Ranx et moi je suis allé vivre à Chicago, par conséquent, on s'est un peu perdu de vue pendant quelques temps. Et lorsque je suis rentré en France, on s'est de nouveau rencontré et il m'a demandé d'être son MC pour sa tournée, proposition que j'ai acceptée naturellement sachant qu'on avait eu un bon feeling. Je respecte beaucoup son travail, c'est un réel bosseur et c'est la raison pour laquelle on parle de lui maintenant. Avant qu'il soit connu, il avait déjà tout un catalogue de prods derrière lui. BIG UP Manu !

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Tu viens d'évoquer "Musical town", mais tu es également présent en feat. sur l'album de Manudigital sur "Digital Luvin". Avez-vous un projet d'album ou d'EP ensemble ?

On a quelques titres sur lesquels on a travaillé, mais qui ne sont pas encore sortis. On n'a pas encore décidé la façon dont on allait les utiliser, soit un EP en commun ou alors je les inclurai dans mon prochain album. Mais en effet, on a des sons avec Manu, forcément puisqu'on est en tournée depuis un bon bout de temps. Je le pousse pour en faire d'autres, mais il est très occupé lorsque nous ne sommes pas sur la route et il faut pouvoir arriver à le choper. Mais bon, c'est dans les tuyaux.

Sur scène, Manudigital est-il le seul maître d'œuvre ou alors t'arrive-t-il d'apporter quelque chose en plus ?

Le show est entièrement produit par Manu, à part quelques clins d'œil hip-hop. C'est clairement lui le chef d'orchestre du show. En ce qui me concerne, je suis le seul chanteur réel, en parallèle avec les autres artistes qui apparaissent virtuellement sur l'écran. Ma spécialité est donc d'être le MC vivant, c'est une sorte de tampon entre les prods et les vidéos de Manu et le public, je suis entre les deux. Sur le set, on joue quelques morceaux qu'on a faits ensemble et je pose des couplets par une sorte de freestyle sur une face B d'instrus qu'il a composées pour d'autres artistes.

J'ai déjà posé la question à Flavia Coelho tout à l'heure. Sachant que vous chantez tous les deux sur l'album de Manudigital, vous verra-t-on ensemble sur scène ce soir ?

(rires) On vient d'arriver, j'ai vu Flavia cinq minutes, on n'en a pas encore parlé !! Mais tout peut arriver, alors restez connectés. Je ne sais pas encore, mais ça me ferait plaisir en tout cas. D'ailleurs, BIG UP Flavia, c'est une artiste que je kiffe vraiment.

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Tu l'as brièvement évoqué à l'instant, mais as-tu un album de prévu prochainement ?

Dès que j'ai un peu de temps, lorsqu'on n'est pas en tournée, j'essaye de travailler sur des chansons. Mais savoir exactement quand ça va sortir et ce qu'il va y avoir dans l'album, ce n'est pas encore bien défini. J'ai beaucoup de choses en stock, il va falloir trier. Dans l'idéal, ce serait de sortir un album en début d'année prochaine.

Un dernier mot pour La Grosse Radio ?

La Grosse Radio, ça fait cinq ans que je vous écoute. A chaque fois que je cherche quelque chose sur Google, vous apparaissez en premier dans les résultats. BIG UP, ça fait plaisir de faire une petite interview pour La Grosse Radio. J'espère que vous continuerez à jouer la musique de Manudigital et la mienne. Merci pour le taf que vous faites et votre soutien. A bientôt !!

BIG UP à toi aussi Bazil !!

Crédit photos : Frédo Mat



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