Une chanson = Une histoire
Vous connaissez désormais le principe de cette nouvelle série d'articles parue sur notre webzine.
Les artistes ont accepté de partager avec vous le souvenir de l'une de leur création. Ce sont eux qui ont écrit les mots que vous allez lire. L'occasion pour La Grosse Radio Reggae de les remercier tant de leur gentillesse que de leur disponibilité.
Pour le webzine, il s'agit bien entendu de remettre le projecteur sur ces artistes et surtout vous faire partager l'histoire d'un morceau qui a peut-être compté pour vous ou tout du moins reste une référence. Ce que certains appellent un Big Tune !
Rendez-vous a donc été pris avec l'artiste Tim Strickaz Downing. Il est l'auteur de cette superbe chanson qu'est "As We Speak" sortie sur l'album The First Tales of Strickaz Chapitre III, le dernier album des Strickaz (la grosse chronique ici by Titi Photo).
Tout d'abord, un peu d'anglais : "As We Speak" est une expression qui signifie "Pendant qu'on parle" et non pas "Comme on parle". Nous sommes en 2014 et Tim Strickaz Downing commence l'écriture de ce Tune.
Cette chanson traite de la situation au Proche-Orient, sans pour autant le dire directement, mais les paroles en elles-mêmes pourraient correspondre à tous les conflits durant lesquels les populations subissent la guerre civile.
Pourquoi cette région en particulier? me direz-vous.
Il faut savoir que l'épouse de Tim Strickaz Downing est Libanaise. Avec le temps, l'artiste a pu apprendre l'histoire de ce pays ainsi que des pays alentours. Il s'est vite rendu compte que toutes ces guerres étaient liées. Nombreuses d'entre elles auraient pu être évitées, mais il y a malheureusement un intérêt à ce qu'elles perdurent. Pétrole, intérêts politiques et financiers, conflits religieux, manipulations et mensonges des médias... .
Le premier couplet commence avec ces paroles :
"Sitting here, watching this.
I'm so powerless against this crisis"
"Je suis assis là, je regarde. Je suis impuissant face à cette crise". C'est tout simplement un constat.
Derrière notre télévision ou nos journaux, nous sommes horrifiés. Mais le pire, c'est que ces informations ne sont qu'1/100ème de la réalité de ce que ces pauvres gens vivent. A travers les médias, il y a cette distance. On éteint la télé, et c'est comme si cela n'existait pas. On ferme le journal et on oublie vite ce que l'on vient de lire.
Impuissant, oui, mais conscient. Conscient de la réalité.
Tim Strickaz Downing n'est pas quelqu'un de particulièrement religieux ni pratiquant, mais sa famille est de tradition Anglicane-Protestante. Un jour, en rentrant du travail, il décide de passer à l'église pour se retrouver un peu avec lui-même. Et là, il éclate en sanglot rien qu'en pensant aux visages des enfants qui vivent et qui meurent quotidiennement durant les conflits mondiaux. C'est en ce moment, ça se passe maintenant. Ce n'était pas il y a deux semaines, ni trois mois, ni même un jour : c'est MAINTENANT !
Alors oui, on peut en débattre, diffuser de grandes émissions, sortir des grandes phrases, tout ça ne changera rien... . Il faut continuer d'en parler, non pas par intérêt d'audience ou de "likes" mais pour la mémoire, le futur et la dignité de ces victimes.
Musicalement, Tim Strickaz Downing a repris la structure rythmique de "Cool Rasta" des Heptones, en y rajoutant une petite touche durant le refrain. Nécessité d'avoir un one-drop bien "Fat" pour cette chanson lourde de sens pour lui. Rien de tel que le rythme du reggae roots pour illustrer ses paroles.
"Je n'ai pas besoin de le préciser tellement c'est logique pour moi,
mais le reggae a une tradition de paroles conscientes.
Il serait impensable pour moi et pour Strickaz
de faire 8 chansons parlant de fête et seulement 2 de sujets engagés".
Une autre volonté, a été de mettre l'accent sur les chœurs pour donner cette sensation d'appel au loin de notre conscience et aussi pour évoquer les voix de ceux qui souffrent . C'est aussi pour cela que c'est la seule chanson sans cuivres, pour permettre à tous les musiciens de pouvoir chanter en live.
"Depuis que je joue et enregistre du reggae,
c'est la première fois que retrouve le "son" du one-drop
que je recherchais depuis tellement longtemps.
Ce son de la caisse claire qui claque et
qui rend ce rythme si simple mais tellement efficace" !
"Un gros Big Up à mes Strickaz qui ont fait sonner cette chanson très importante pour moi comme je le l'imaginais, et un special Big Up à Romain Ghezal qui a mixé notre album et lui a donné cette sonorité reggae que l'on voulait tant depuis le premier chapitre de notre trilogie".
Strickaz - "As We Speak"
Rendez-vous le dimanche 26 février pour le prochain Flachback : I&I - "Rasta Ganja Mariguana"