Janka Nabay, le roi incontesté de la bubu music sierra-léonaise est de retour avec Build Music, son deuxième album sur Luaka Bop, label de David Byrne, sortie le 24 mars 2017.
Contraint de fuir son pays en guerre, les expériences avant-gardistes de ce musicien visionnaire sont nées de cette migration forcée. Il transforme une musique de procession cérémonieuse en funk extatique - complexe et sautillant - sur boîte à rythmes, décoré de flûtes synthétiques.
Catapulté vers une renommée nationale au milieu des années 90, c’est seulement en 2010 que le travail de Janka traverse les frontières. Alors qu’il étudiait la musique en Sierra Leone, Wills Glasspiegel – journaliste, académicien et cinéaste, ayant notamment révélé la célèbre scène Shangaan Electro en provenance d’Afrique du Sud – tomba sur un tas de cassettes collecté par la BBC, dont l’un des premiers enregistrements de Nabay. Il se lança alors à sa recherche, découvrant que ce dernier avait émigré aux Etats-Unis… Il retrouvera finalement sa trace dans un restaurant de poulet frit de Philadelphie.
Se produisant régulièrement en solo au Zebulon, un bar de Brooklyn, un groupe se forme peu à peu autour de lui. Baptisé Bubu Gang, ses membres – dont la chanteuse et bassiste syrienne Boshra AlSaadi, et Jason McMahon (Chairlift) – partagent cette vision futuriste de la bubu. En 2012, Janka sort son premier album, En Yah Say, sur le label new-yorkais Luaka Bop, fondé par David Byrne et réputé (entre autres) pour avoir fait renaître les enregistrements de William Onyeabor. Enregistré avec le Bubu Gang, ce premier effort reflète surtout l’esprit du groupe sur scène. Il sera salué par la critique..
Build Music est davantage le fruit d’un travail de studio méticuleux où Nabay s’est entouré d’ingénieurs du son et de collaborateurs désireux de magnifier cette approche électronique de la bubu music. Adoptant un processus créatif similaire à celui de ses premiers enregistrements dans son pays natal, il a notamment enrôlé le producteur Lanzo On D Beat de Freetown pour réenregistrer "Sabanoh", l’un de ses vieux classiques.
Ressuscitée et modernisée en pleine période de guerre civile durant les années 90, la bubu music de Nabay prendra définitivement une tournure politique après sa détention par des rebelles, alors qu’il était surveillé par des enfants-soldats… Le cœur lourd, il s’enfuit vers les Etats-Unis en 2003.
Incarnant la nature conflictuelle de sa propre vie de musicien immigré, Janka se considère également comme le porte-parole de la bubu music sierra-léonaise, se qualifiant lui-même de "cowboy noir", en mission transatlantique, sculptant sa musique futuriste avec l’esprit d’un artiste révolutionnaire.
Janka Nabay - "Build Music"