Al’Tarba & Senbeï – Rogue Monsters

Quand on regarde la pochette de ce Rogue Monsters, on s'attendrait plus à un album de dubstep, de metal, de techno, de hardcore, bref de ces genres musicaux qui ne font pas dans la douceur et la légéreté. Non pas que ce Rogue Monsters soit d'un calme à nous bercer durant ces après-midis de grisaille, mais il entre en contradiction avec l'artwork. Bref, on ne va pas épiloguer, cette remarque n'avait uniquement pour but d'introduire cette chronique, vu qu'on ne savait pas quoi dire.

Mais alors, si ce n'est pas du dubstep ou du metal, de quoi s'agit-il alors ? De hip-hop, pardi ! Ce Rogue Monsters est en effet l'œuvre de deux alchimistes du hip-hop hybride et éclectique (ou alors on dit plutôt abstract, je ne sais plus...), Al'Tarba et Senbeï, beatmakers signés chez Banzaï Lab, ce label bordelais autant influencé par Ninja Tune, Jarring Effects ou Chinese Man Records. Et voilà, tiens, un argument de plus, pour confirmer l'essence hip-hop hybride de Rogue Monsters.

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Jusqu'à présent, on avait plutôt l'habitude d'entendre ces deux trublions en solo (ou alors au sein de side projects, tel que Smokey Joe & The Kid pour Senbeï), mais cette fois-ci ils ont décidé d'unir leurs forces pour proposer un album qui synthétise toute leur esthétique et leurs influences, à savoir...un hip-hop hybride truffé de samples, d'electro, de breakbeat, etc... Un album aussi smooth qu'énervé, aussi planant que puissant, un album hybride, quoi !

Bon, et alors il dit quoi ce Rogue Monsters ? A vrai dire, vous en aviez déjà eu un bref aperçu avec le premier single, qui, intitulé "More Pressure" (voir ici), pourrait être la synthèse entre le son de C2C couplé à des basses très grasses. Vous voyez le genre...et c'est cette esthétique qui va primer dans une bonne partie de l'album. En effet, les deux protagonistes n'y sont pas allés de main morte avec les basses sur leur galette. C'est ce qui en ressort dès le premier titre, "Rakshasa", où l'on sent poindre également quelques ambiances à la Chinese Man (samples extrême-orientaux et scratches), mais aussi sur "Gangsters" façon FatBoy SlimSenbeï et Al'Tarba se sont même acoquinés avec le dub et le trap par intermittence.

"Gangsters", y aurait-il des réminiscences de Smokey Joe & The Kid sur cet album ? Pas véritablement en ce qui concerne le format musical, mais les deux compères ont littéralement commis un "Hold Up" sur les instrus de C2C avec le track du même nom. Et on reste sur les références de truands avec "Boris The Blade" (vous savez Boris le hachoir ou Boris pare-balles dans Snatch) dans ce hip-hop qui sample même le film et où l'on retrouve Illaman et Youthstar au mic. L'autre feat. de l'album, "On hante la ville", en compagnie des Droogz Brigade, est un hip-hop boom-bap loud & heavy dont les lyrics abondent, quant à eux, en références plus fantastiques (Dracula, La dame blanche, etc...) reflétant les aspects les plus inquiétants des rues.

Mais au-delà de ces prods épiques et énervées, Senbeï et Al'Tarba ont su aussi faire preuve de douceur via quelques ballades, telles que "Yellow Fields", ou "Oh Edwaaaaard" à mi-chemin entre Moby et DJ Shadow. C'est d'ailleurs l'ultra célébrissime "Organ Donor" de ce dernier qui aura probablement servi de trame aux deux beatmakers pour ce qui est sans conteste le meilleur titre de l'album, à savoir "Falling" : une rencontre virtuelle de plus de 7 minutes entre DJ Shadow, les Beastie Boys (dans leur versant rock) et les claviers de Ray Manzarek des Doors. On retrouve cet esprit rock dans un "Interlude" complètement barré, désopilant et keupon.

Puis on revient cependant assez rapidement à des orientations bass music, qu'il s'agisse du très saccadé "Dahomey", de "Yurei & Baku" à base de dubstep ou encore du pêchu "Tarikh" qui, avec ses réminiscences dub, nous rappellerait presques les riddims du plus digital des albums d'High Tone, à savoir Outback.

Et c'est avec une touche plus calme et smooth, voire jazzy, que les deux acolytes nous signifient leurs adieux avec "Lonely Bones", concluant un Rogue Monsters tout aussi cinématographique qu'éclectique, énervé que posé, bouillant que calmant et où dans lequel ils ont réussi à dépasser leurs contradictions.

TRACKLIST 

1. Rakshasa
2. Hold Up
3. Gangsters
4. Boris the blade ft Illaman & Youthstar
5. More pressure
6. Yellow fields
7. Dahomey
8. Interlude
9. Oh, Edwaaaard
10. Tarikh
11. Yurei & Baku
12. On hante la ville ft Droogz Brigade
13. Falling
14. Lonely Bones

Artistes : Al'Tarba & Senbeï
Album : Rogue Monsters
Label : Banzaï Lab
Date de sortie : 08/02/2019

NOTE DE L'AUTEUR : 7 / 10



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