Pour celles et ceux qui ne connaissent pas encore, le Dub Camp Festival est porté par l’association Get Up! qui a pour but de promouvoir la musique reggae-dub (en mode sound-system) dans les Pays de la Loire. La 1ère édition fut réalisée en 2014 et ils en sont cette année à la 6ème, qui a eu lieu les 11, 12, 13 et 14 juillet derniers. Le festival se passe dans un cadre agréable et bucolique près du lac de Vioreau classé zone Natura 2000 (faunes et flores préservés, possibilité de randonnées, diverses animations autour de l’environnement, plage, …).
Qui dit festival, dit les à-côté, et le Dub Camp n’est pas en reste avec la vente de produits locaux et artisanaux mais aussi des animations sur le site du camping en lien avec l’association Eco Mind qui propose de fabriquer du dentifrice et du déodorant maison dans l'esprit 0 déchets. Il y a aussi des activités sportives : on notera le retour pour la seconde édition consécutive du boxmen (course en portant une enceinte), la slackline pour les plus équilibristes d’entre nous ou encore des jeux d’eaux pour se rafraîchir avec notamment le ventriglisse. On notera aussi les divers exposants entre vente de vinyles, vente de sacs en coton et en chanvre ou encore présentation du fonctionnement d’un sound-system avec manettes interactives.
Chaque année le festival sait se renouveler. Cette année 2019, l’association Get Up! a mis en place le Juke-box Arena. Interactif, ce juke-box ne contient pas moins de quatre-vingt 45 tours d'époque, que ce soit des classiques du genre (“Tenement Yard” de Jacob Miller par exemple) ou des titres plus obscurs, tout le monde y trouvera de quoi danser au milieu d’une cour caribéenne reproduite grandeur nature située au coeur du festival ou tout simplement chiller en buvant un thé.
(Cf : Facebook Dub Camp Festival Officiel)
© David Gallard
Vendredi 12 juillet
Arrivé sur le site du festival à 18h, après quelques aventures dont seuls ceux qui n’ont pas encore le permis peuvent comprendre, l’odeur de menthe poivré qui titille mes narines m’accueille comme pour me confirmer que je suis au bon endroit. A peine arrivé que je cours allez voir ce qui sera mon premier concert de ce week-end de 3 jours au Dub Camp Festival. Destination ? L’Outernational Arena où je me pose pour écouter Dub Shepherds. Le public exécute des danses plutôt timides au début du show, peut être aussi est-ce dû à un côté plus ou moins aérien de la musique. Le MC y a remédié petit à petit en étant de plus en plus dynamique envers les festivaliers depuis sa cover d’un des morceaux de Lee Scratch Perry, attirant ainsi plus de monde et des danses plus nombreuses.
20h : Manudigital prend le contrôle des platines. 2 ou 3 notes plus tard un amas de personnes s’engouffre sous la Dub Club Arena comme irrésistiblement attirées par le son de l’artiste. Après avoir joué 3 morceaux de son dernier album Bass Attack sorti en octobre 2018 Manudigital mash up le chapiteau en jouant un remix du titre “Make It Bun Dem” de Skrillex et Damian Marley puis enchaîne avec son morceau “My Story” avec Panda Dub et Royal (aussi sur l’album Bass Attack). Manudigital a défendu avec brio son dernier album validé par le public de la Dub Club Arena.
Il tire sa révérence avec une reprise d’un des titres de Raggasonic ainsi que du classique “54-46 Was My Number” de Toots & The Maytals avant de laisser la place au sound-system manceau Irie Ites qui a su capter le public d’entré de jeu. Les mêmes qui sont venus mash up l’opening session du jeudi 11 juillet sur le sound-system 360° de King Shiloh avec Pablo Gad venu pour la première fois en France. Après quelques speciales et ganja tunes, le vétéran Linval Thompson tant attendu par le public (il n’est pas venu en France depuis 7 ans), arrive pour reprendre ses classiques dont “I Love Marijuana” notamment. Irie Ites termine son set avec le morceau “Rock It” et une exclusive tune produite par le label.
(Cf : Facebook Manu Irie Ites Malhoeuvre)
Place ensuite aux rennais de Legal Shot sound-system tout d’abord avec Lasai et le vétéran Daddy Freddy qui n’hésitera pas à faire un remix du titre “Throne” de Koffee comme pour donner de la force à la nouvelle génération d’artiste féminine. Ce dernier entraînera tout le public avec sa vibe très énergique et son flow rub-a-dub style. Viens ensuite Samory I, l’un des membres de la nouvelle génération jamaïcaine qui appartient au jeune mouvement Reggae Revival, qui ravit le public. Il reprend des titres de son premier album Black Gold sorti en juillet 2017. Il commence avec son titre roots profond “Serve Jah” puis “Fear Of Jah”, “Because I’m Black” et finit son set par son single “Rasta Nuh Gangsta”. Pour la fin de cette soirée je me rend vers l’Outernational Arena, où il y a l’air d’y avoir plus de monde, pour voir jouer Aba Shanti I. Du son très lourd et un public plein d’énergie envahit le chapiteau avant la fermeture du site du festival. Le public semble déçu que cela se termine si tôt, 3h du matin, mais ce n’est pas grave le festival continue en off sur le site du camping.
Samedi 13 juillet
Pour faire patienter les festivaliers jusqu’à l’ouverture du festival le Rootsman Corner, situé sur le site du camping, ouvre ses portes à 12h avec Prayazen sound-system & Zofa.
En plus de différents shows de qualité le festival laisse la place à plusieurs conférences aux sujets intéressants : tout d’abord ce samedi sur King Tubby (le « Dub Inventor ») pour les 30 ans de sa disparition tenu par Zonard (le selector d’Echotone), puis sur l’histoire du dub jamaïcain en général tenu par Thibault Ehrengardt de Dread Editions, la suite reprendra le lendemain avec 2 autres conférences. De quoi apprendre ou renforcer ses connaissances du milieu sound-system, car le dub est une musique s’inscrivant dans une culture plus large qu’est celle de la Jamaïque. Ces 2 conférences illustrées par des extraits de morceaux sont suivies par une heure de sélection spécial King Tubby.
A 21h je me dirige vers l’Outernational Arena voir Brainless pour une heure de son (trop ?) épuré. En tout cas le chapiteau et ses alentours sont blindés de gens dansant et écoutant assis par terre pour les plus éloignés. Plus les minutes passent plus le public est en feu. Au milieu de son set l’artiste demande une minute de silence pour Steve noyé dans la Loire à Nantes pendant la fête de la musique à cause d’une charge de police non autorisée du fait qu’un sound-system ait joué plus longtemps que l’heure permise par la ville.
Le son de la Dub Club Arena sous laquelle jouait Wandem sound-system & Afrikan Simba paraissait plus organique, en tout cas ils ont retourné le chapiteau. La journée se termine par une déambulation de l’ENR (Ensemble National du Reggae) reprenant des classiques du genre dont notamment “Sinsemilia” et “Guess who’s coming to dinner” de Black Uhuru, “Roots, Rock, Reggae”, “Get Up, Stand Up” et “I Shot The Sherif” de Bob Marley, “46-59 Was My Number” de Toots & The Maytals entre autre. Le public du samedi fut plus nombreux.
Dimanche 14 juillet
Aujourd’hui le site ouvre à 12h30 et j’hésite entre Moja en version acoustique et Nai-Jah en version acoustique. Choix cornélien. Solution ? J’ai choisis d’aller voir un peu des deux. Sous les 2 chapiteaux les gens étaient assis pour mieux savourer ces moments de roots introspectifs et envoûtants. Le titre “Hot Town” de Nai-Jah sonne au loin comme une invitation à le rejoindre et plaît beaucoup au public. Le public réagit aussi bien à “Last Call” un titre parlant des réfugiés. Lee festivaliers sont venus tout aussi nombreux pour écouter Moja interpréter “One”, “Back to the World” entre autre.
C’est maintenant le temps d’aller voir Mungo’s Hifi sous la Dub Club Arena et une chose est sûr ils font l’unanimité auprès du public, avec leur sonorité moderne impossible de rester statique. S’ensuit Stand High Patrol DJ Set comme un enchainement logique.
15h : suite des conférences de la veille avec une première faisant le tour de quelques portraits de tueurs, chanteurs et politiciens véreux de Jamaïque par le conférencier Thibault Ehrengardt de Dread Editions. On commence avec celui d’Edward Seaga ancien premier ministre de Jamaïque de 1980 à 1989 membre du JLP (Jamaican Labour Party), celui dont on dit qu’il aurait importé des armes en Jamaïque pour armer les gun-mens de Tivoli Gardens, le quartier qu’il a fait construire, où il hébergeait des pauvres dans ses immeubles sans leur demander de loyers en échange de l’assurance de voter pour lui. Entre exécution de criminels ne voulant pas le soutenir, encourageant la guerre civile et en mentant auprès de Reagan (son ami) faisant passer la politique du PNP (People’s National Party) parti opposé, pour du communisme en pleine guerre froide, il a fortement bouleversé la Jamaïque de son vivant. Il est mort le 28 mai dernier. Autre portrait, celui de “Johnny too bad”, un grand voyou de Trenchtown inspirant à un ami musicien appartenant au groupe The Slickers le titre apparaissant sur la B.O du film The Harder They Come. Ce voyou fut interprété au cinéma par Jimmy Cliff. La deuxième conférence concerne l’évolution du mouvement sound-system en France ainsi que les contraintes pour les organisateurs de soirées dub. Cette conférence est tenue par Sébastien du Dub Station Festival, Antoine de Cartel Concerts et de Olivier président du Dub Camp Festival.
Suite à ces conférences je m’installe à l’Outernational Arena pour écouter Zenzile accompagné de Winston McAnuff. Avant le set, les gens viennent progressivement et s’assoient autour du chapiteau pour attendre. Zenzile nous fait la surprise d’accueillir Jayree (chanteur du groupe City Kay) venu défendre leur dernier album 5+1, Zenzile meets Jayree alternant les prestations de Winston McAnuff et de Jayree. Une petite frayeur concernant la prestation de Winston McAnuff car on entend un mot sur cinq quand il chante, heureusement le problème s’est réglé après 2 morceaux. Le chapiteau de l’Outernational se vide de plus en plus lorsque O.B.F prend le contrôle de la Dub Club Arena. Ils sont venu avec le jeune et talentueux artiste UK Charlie P, mais aussi Sr Wilson, Shanti D et Junior Roy pour nous donner une très belle prestation. Le festival se finit sur le camping sous le Rootsman Corner avec Stepperd Allianz et Prayazen sound-system.
C’est ainsi que se clôt la 6ème édition du Dub Camp Festival porté par l’association Get Up! On remerciera bien sûr toute l’équipe du festival pour cette magnifique programmation qu’ils nous ont offerte. Certains festivaliers m’ont confié que cette édition leur avait permis de renouer avec le festival. On n’oubliera pas non plus de remercier les bénévoles, toujours au petit soin pour s’assurer que cette édition soit un régal pour tous. Les dates de la prochaine édition sont déjà publiées, ça se passera du jeudi 9 juillet au dimanche 12 juillet 2020 toujours dans le magnifique cadre que nous offre le lac de Vioreau à Joué-sur-Erdre dans le 44, Pays-de-la-Loire. On se dit à l’année prochaine ! Big Up !
(Cf : Facebook Dub Camp Festival Officiel)
© Remi Molinero
Merci à Irie Ites pour l'autorisation du partage de la photo de Manu aux platines.
Merci de même au Dub Camp Festival (Association Get UP! ) pour les photos;