Après la grosse interview que Thomas SMAD nous a accordée à l’occasion de la sortie de son premier album (de deux ans de travail acharné et passionné pour le sortir), il était dans la suite logique de chroniquer ce 12 titres tout en restant objectif, car quand on côtoie certaines personnes, on pourrait perdre notre côté critique, mais il n’en est rien. De côté négatif, il ne peut en être question sur ce pur joyau.
Avec une entrée guitare qui sera du plus bel effet en live, l’album s’ouvre sur un titre fort, "Indépendant", le texte de SMAD est tout autant recherché que la mélodie de la voix et comme il dit :
« Ne passe pas ta vie dans le corps d’un autre,
Ta personnalité fait la richesse de ce monde »
Le ton est donné, à travers cet album, il fait vivre ses rêves et c’est un argument que l’on peut tous suivre.
L’intro de "Les rêves" se veut plus moderne avec une envolée d’orgue. Tout comme le titre précédent, il y est question de rêve avec notre zone de confort (avec la sécurité au quotidien). Aller au-delà, c’est aller dans la zone de peur avant d’attaquer la zone d’apprentissage pour finir dans la zone de grandeur, celle où l’on vit ses rêves et trouve notre valeur, une sorte de nirvana terrestre.
Un très bon beat pour "La différence" où la chanson nous parle de racisme qui gangrène la société et les âmes alors que la complémentarité est bien plus porteuse. Le flow de SMAD peut varier du simple au double, voir triple pour une fin de chanson en apothéose.
« Tu n’es l’exemple de personne, sache que mes principes,
Je les garde, j’aime la vie et j’aime les gens ».
Pour le morceau suivant, un très bel orgue en intro, un one drop en grosse caisse et une ligne de basse bien violente, qui rentre bien dans la tête pour ne plus en ressortir sur ce "reggae français" bien différent du même titre que Taïro, mais tout autant intéressant.
Une musique universelle, même si elle reste quand même underground et ce qui en fait sa force. Comme le chante Thomas, il est toujours debout malgré les détracteurs, ou ceux qui se sentent ‘populaires’ parce qu’ils passent en radio.
« Pour vous », dès la première note, dès le chant sonne comme du Ben l’Oncle Soul, et revient très vite dans ce que l’on connaît. La voix de Cam du groupe Ryon se marie à merveille avec celle de SMAD, ils nous donnent une belle leçon de partage. Et quand le tempo part au galop, SMAD chevauche le riddim avec une facilité déconcertante, dans un pur fast style (avec une pensée pour Smiley Culture RIP, un des maîtres du genre).
Un riddim fortement roots pour "De l’or". SMAD nous fait la voix de tête et les chœurs pour ce morceau qui fleure bon les années 70’s oui car « notre vie vaut bien plus que de l’or ». Cette chanson, qui nous parle de valeur humaine, est la seul composée par SMAD sur cet album et nous montre combien il est à l’aise dans la création de riddims, qu’ils soient dancehall, drum’n’bass, ou ici dans un nu-roots digne des aînés jamaicains.
Le morceau suivant attaque plus rapidement, la basse tape dans le bas-ventre comme pour faire comprendre que ceux qui vivent en "Double jeu" (ou une vie double) se prennent un jour ou l’autre un sacré coup de poing quand ils sont découverts. Les mythomanes, ceux qui s’inventent plusieurs vies finiront seuls, mais non sans avoir fait souffrir leur proche. On retrouve le côté humain dans ces bassesses, alors qu’il pourrait vivre heureux simplement et cherche des aventures, des moments légers plutôt que de consolider ce qu’il a commencé à construire.
le SMAD Crew : Yoann "Yok's", Alexis "selecta Z, Thomas 'Smad et Simon "Slim"
On arrive au morceau le plus drum’n’bass de l’album, le bien nommé "Dynamite "que l’on a pu découvrir en avant première grâce à la superbe vidéo imaginée par Slim (chronique ici). A conseiller de mettre les basses à fond, de pousser quelques meubles car une forte envie de bouger va vous prendre à l’écoute de morceau fortement addictif et comme le dit Thomas :
« On met des actes sur les mots, des claques et du flow, on est des dynamites enclenchées »
On explose sur cette musique sans avoir à mettre le fil rouge sur le bouton rouge et le film vert sur le bouton vert comme le répétait le Colonel Blanchet, nom de code Mirabelle de la 7ème compagnie !
Là encore, pour "Soudés", se fait entendre un très belle alchimie entre les voix de SMAD et de Lidiop. Chantée en français, anglais et Wolof, cette chanson nous parle d’Unité, qui est une des clés du bonheur et de la vie au même titre que l’éducation d’ailleurs. Un très bon riddim de Backwash band où basse/batterie/guitare/claviers nous donnent un reggae très efficace dans un message universel à travers les instruments et les voix, Unité étant synonyme aussi d’amour (de son prochain et de ces proches).
Avec "Humains", SMAD signe ici le titre le plus sombre de l’album, un de ces titres qui nous fait comprendre qu’ici en France, nous ne sommes pas si mal logés (bien que sur certains points, il y aurait matière à réflexion). Une chanson qui prend aux tripes, sur la condition humaine avec ceux qui quittent leur pays, non par plaisir, mais bien pour protéger leur vie et qui parfois fait que leur famille se trouve dispersée, éclatée.
Les mots de SMAD font mouche, tantôt dans les chœurs, tantôt dans l’exercice très réussi de plusieurs tonalités de voix et rien que
« Je n’ai pas choisi d’être ici, la vie m’a posé devant ta porte
car la mienne est en train de brûler »
met le frisson et devrait faire réfléchir plus intelligemment ceux qui fustigent les migrants.
"Nouvel album" a un riddim que ne renierait pas King Jammy car dès les premières notes, on se remémore son "Punnany" popularisé par Admiral Bailey en 1986 ! Un titre dancehall qui fera danser les massives où il nous parle de ce fameux album « Indépendant ». La musique parfois ralentit pour donner place à de très jolis chœurs puis le beat accèlére et SMAD nous envoie la puissance de flow fast-style tel un tir de mitraillette.
L’ascenseur émotionnel est à son comble avec le titre "Infréquentable" qui conclue cet album. Démarrage guitare sèche avec la voix d’un des plus grands du reggae français actuel, Max Livio, percussions, la voix de SMAD, les autres instruments arrivent la magie opère, on est loin, très loin, on voudrait que le temps s’arrête tandis que la guitare avec pédale wouah-wouah accompagne ces deux superbes voix. Le morceau est tout simplement parfait avec des paroles qui coulent comme une jolie Couze qui viendrait se jeter dans l’Allier avec du SMAD dans le texte
« un franc parlé, la tête dure comme une armure,
assumant de ne pas penser comme les autres »
et du Max Livio évidemment
« Sache que l’honneur fleurit sur la fosse
C’est pas de votre faute si vous êtes con »
EP et album, suite logique, pochette esquisse et création par Yok's, infographiste et photographe de Smad Crew
Les musiciens que ce soient les Wihad, Les frères Cirade, le Backwash band, M'doezen, Ben wah ou Smad lui-même nous ont concocté de superbes morceaux éclectiques tandis que Max Livio a été le grand frère, le mentor, l’ingénieur du son, un artiste entier au cœur ouvert vers les autres.
La pochette imaginée par Yok's (infographiste et photographe au sein du SMAD crew) est un pur chef d’œuvre. Le lion et SMAD, indépendants et ensemble en même temps, marchant sur les pavés de la réussite vers cette cité de babylone, nous apprennent que le contenu de cet album va en faire rêver plus d’un. Et le livret qui accompagne celui-ci avec les paroles est un plus dans le packaging parfait.
Au pays de l’ASM, on peut dire que l’essai est transformé pour ce 12 titres de SMAD. Il faut reconnaître que le travail a été de mise pendant 2 ans pour accoucher de celui-ci.
SMAD, humaniste au grand cœur qui aime le partage tout en gardant cette part d’indépendance, cet album en est la preuve vivante !
Tracklist :
1-Indépendant
2- Les rêves
3- La différence
4- Reggae français
5- Pour vous feat. Cam (Ryon)
6- De l’or
7- Double jeu
8- Dynamite
9- Soudés feat. Lidiop
10- Humains
11- Nouvel album
12- L’infréquentable feat. Max Livio
Sortie le 08/11/2019
Smad Music / Lacaz
En digital sur toutes les plateformes de téléchargement légales
ou en CD sur le site officiel
Extraits de paroles avec l’aimable autorisation de Thomas ‘SMAD’
Photos avec l’aimable autorisation de Yoks/Smad Crew