En ces temps troublés et où l’actualité apparait particulièrement anxiogène, il est bon de pouvoir se tourner vers un nouvel album des Flower Kings. En effet, depuis ses débuts le combo mené par Roine Stolt propose un rock progressif de grande classe, optimiste et délicieusement vintage. By Royal Decree ne déroge pas à la règle et s’inscrit dans la droite lignée de ses prédécesseurs directs, à commencer par Waiting for Miracles et Desolation Rose, tout en retrouvant l’esprit des premiers albums tels que Back In the World of Adventures ou Stardust We Are.
On le sait, le line up des Flower Kings a longtemps été à géométrie variable, avec des musiciens gravitant autour du noyau dur, composé de Roine Stolt (guitare, chant) et Hasse Fröberg (chant, guitares acoustiques). Pour ce nouvel album, les jeunes recrues Mirko de Maio (batterie) et Zack Kamins (claviers) sont toujours de la partie, mais à la quatre-cordes, une transition s’effectue entre Jonas Reingold, bassiste depuis 2000 et Michael Stolt, frère du leader et ancien bassiste de la formation sur les quatre premiers opus. Reingold ne pouvant poursuivre ses activités live avec les Rois des Fleurs, c’est tout naturellement que le bassiste d’origine revient dans le groupe, les deux musiciens se partageant la moitié des titres, leur instrument étant par ailleurs bien mis en avant à travers un mixage impeccable.
Côté musique, nous ne sommes pas dépaysés, les Flower Kings proposent un rock progressif épique (« The Great Pretender »), frais et toujours à cheval entre traditions 70’s (« A Million Stars ») et modernité néo-prog (« Blinded »). Si l’on devait situer cet opus dans la riche discographie du combo suédois, il trouverait ainsi sa place entre Waiting for Miracles et Retropolis, évitant l’écueil des compositions trop jazzy et expérimentales, comme le groupe avait parfois pu le pratiquer sur Unfold the Future ou Paradoxe Hotel / The Sum of No Evil. Seul le saxophone discret de Rob Townhend vient régulièrement rappeler cet héritage et apporte un plus indéniable à l’ensemble.
Contrairement à ce à quoi les Suédois nous ont longtemps habitué, aucun titre ne dépasse les dix minutes sur By Royal Decree. Les Flower Kings vont ainsi à l’essentiel, malgré un double album, qui finalement s’assimile très facilement lorsque l’on est familier avec l’univers du combo. On ne va pas se mentir, comme souvent avec les albums doubles, certains titres auraient pu être supprimés, comme le curieux « Letter », « Open Your Heart » à l’ambiance très pastorale et à deux doigts de la mièvrerie ou « Silent Ways » trop proche de Yes.
Mais avec de solides titres comme « Blinded », « The Darkness in You », « The Great Pretender », « Revolution » ou « A Million Stars » (qui bénéficie d’un superbe pont atmosphérique), Roine Stolt renoue avec les grandes compositions des Flower Kings, sans risquer de lasser avec des titres trop longs. On apprécie également de retrouver certains thèmes d’un titre à l’autre (le thème de « A Million Stars » se retrouve sur « Revolution »), offrant ainsi une plus grande cohérence à l’ensemble. Par ailleurs, Roine Stolt retrouve un style peut être plus mélancolique qu’à l’accoutumée (« Moth », « The Great Pretender », « A Million Stars », « Revolution », « The Darkness in You ») ce qui renforce la puissance émotionnelle des titres.
Alors certes, à la première écoute, certains trouveront sans doute que les Flower Kings ne prennent pas de risque et proposent un album dans la lignée des précédents. Mais ce By Royal Decree dégage un petit plus qui le rend immédiatement attrayant et supérieur à Island sorti en 2020 et donne envie d’y retourner. La grande force de ces compositions réside probablement dans la complémentarité des timbres de voix de Hasse Fröberg et Roine Stolt, qui se répondent régulièrement et apportent beaucoup d’émotion à l’ensemble (« The Soldier ») ou encore dans les soli sublimes du leader du groupe (« Funeral Pyres », « Revolution » à 3 :15, « The Darkness in You ») qui ne tombe jamais dans la surenchère technique ni la démonstration.
Pour résumer, ce By Royal Decree est un bon cru qui ravira ceux qui avaient apprécié le retour des Flower Kings avec Waiting For Miracles. Les similitudes avec ce dernier sont nombreuses, outre sa pochette, et prouvent que Roine Stolt et ses compères savent revenir à l’essentiel, à savoir écrire une musique riche et touchante à la fois.
Tracklist :
The Great Pretender
World Gone Crazy
Blinded
A Million Stars
The Soldier
The Darkness In You
We Can Make It Work
Peacock On Parade
Revolution
Time The Great Healer
Letter
Evolution
Silent Ways
Moth
The Big Funk
Open Your Heart
Shrine
Funeral Pyres
Sorti le 4 mars chez Inside Out Music
Photographie promotionnelle : © DR