Cela avait été l'une des bonnes surprises de 2022 : la sortie de Troika, le premier effort de ce super groupe de prog. Un petit bijou de douceur qui faisait du bien dans un contexte un peu sombre. On avait espéré une tournée mais malheureusement nos prières n'avaient pas été entendues. Pour nous consoler, le groupe D'Virgilio, Morse & Jennings (abrégé en DMJ) remet le couvert et nous offre Sophomore qui sortira le 10 novembre. Alors pour ce deuxième album, essai transformé ?
On ne va pas trop vous faire languir longtemps : si vous avez aimé le premier, vous aimerez. Si vous ne connaissez toujours pas le groupe, jetez-vous à l'eau. Comme sur l'album précédent, les membres ont enregistré à distance mais cela ne se sent absolument pas. Il y a une sensation de cohésion hallucinante dans la composition, dans les harmonies et chaque musicien est à sa place. Comme pour Troika, les morceaux sont servis par une production sublime qui révèle tout : que ce soient les lignes de basses magnifiques, les percussions diverses ou les voix différentes de chaque membre.
L'album reprend dans la même atmosphère que le premier opus avec "Hard to be Easy". On a toujours ce côté feel good, hyper groovy un peu funky à la Kesiah Jones mais résolument folk. On a l'impression d'être au milieu d'une bande de potes qui a posé ses instruments pour se faire plaisir. L'orgue hammond de Neal Morse est chaud à souhait, les guitares semblent résonner à côté de nous et Nick D'Virgilio fait toujours preuve de finesse et de technicité notamment dans le jeu au charley. Un morceau classique certes mais qui met direct la patate et qui semble taillé pour le live. Même constat pour "Anywhere the Wind Blows".
Autre morceau dans cette même veine : "I'm not Afraid" toujours aussi feel good. On sent la patte de Nick qui apporte un petit côté Spock's Beard dans la progression d'accords. D'ailleurs avec Neal Morse cela marche du tonnerre et sur quelques morceaux on se croirait revenu au temps des classiques de leur ancien groupe de prog. En effet, lorsque DMJ veut sonner plus rock comme sur "Mama", les compositions pourraient très bien avoir leur place sur les albums X ou Snow. Mais ce qui apporte cette touche d'originalité est clairement la voix de Ross Jennings.
En effet, le chanteur d'Haken magnifie les compos et dès qu'il se met à chanter, cela prend une autre direction. En témoigne la très sympathique "Tiny Little Fires" avec son riff au xylophone en mesure asymétrique. Le morceau dévoile clairement les influences Yes du groupe notamment dans les arpèges à l'orgue qui rappellent le style de Rick Wakeman. Puis on évolue vers un rock typé Rush. Du classique certes mais ça fait du bien.
"Linger at the Edge of my Memory" démarre par une atmosphère proche de "Soon", autre composition de Yes et permet de montrer une facette plus sombre du groupe. En effet, la grosse nouveauté de cet album est d'explorer une musique plus sombre. Et le morceau le plus intéressant et le plus marquant reste "The Weary One". Dans toute la discographie de Neal, on ne l'a jamais vu aussi brisé, fatigué au chant. On imagine très bien une soirée feu de camp qui se termine et un homme blessé qui exprime toute sa douleur dans sa musique. Le morceau est poignant et marquant. Autre morceau très prenant : "Weighs me Down" avec son riff lourd proche de "Goodbye Blue Sky" de Pink Floyd. Les harmonies entre les trois chanteurs sont sublimes et quelques passages font penser à du Transatlantic, autre projet de Neal, mais en plus atmosphérique.
Le groupe développe donc dans cet album plusieurs émotions : la peine, la joie et même la liberté sur le titre "Right Where You Should be". Certes c'est une ballade morsienne assez classique mais la guitare hawaienne transforme la chanson en un road trip assez sympa. DMJ se permet même une incursion du côté de l'Espagne avec le très Joe Cocker "Walking on Water". Cette ambiance à la "Don't Let Me Be Misunderstood" est agréable, le tout servi par une basse funky et des percussions sublimes.
Comme pour un très bon élève lors d'un conseil de classe, cette chronique ne va pas s'attarder sur cet album car il n'y a rien à dire de négatif. Tout est bien construit, la cohésion est là, le groupe reprend les traceurs développés lors du premier album en apportant un peu plus de prog et de douleur. Néanmoins, comme le petit Oliver Twist dans son orphelinat, on en voudrait encore. Une quarantaine de musique, douze morceaux dont deux versions alternatives, notre cerveau addict au groupe aurait aimé que l'album soit rempli.
On se consolera en écoutant d'une traite les deux opus qui constituent leur discographie et on continuera de formuler le voeu de voir ces trois génies en live dans une petit salle, proche du bord de la scène.
L'album sera disponible le 10 novembre sur le label Inside Out ou sur Radiant Records.
Images : DR Inside Out
Tracklist
01. Hard To Be Easy
02. Linger At The Edge Of My Memory
03. Tiny Little Fires
04. Right Where You Should Be
05. The Weary One
06. Mama
07. I’m Not Afraid
08. Weighs Me Down
09. Walking On Water
10. Anywhere The Wind Blows
11. Right Where You Should Be (ALT VERSION)
12. The Weary One (ALT VERSION)