Voilà un nom que vous risquez d'entendre de plus en plus lors des jours, mois et peut-être années à venir. Le duo belge d'Arsenal connaît en effet un succès grandissant et, pour ne rien arranger, a sorti récemment un 4e album très convaincant, Lokemo (parce qu'ils ont enregistré à Locqémeau dans les côtes d'Armor). Et ce 4e essai pourrait s'avérer être celui de la consécration tant il s'avère dans l'air du temps (ce qui, on est d'accord, n'est pas nécessairement un compliment). Pourtant, la pop/rock des belges atteint ici un niveau d'aboutissement et d'éclectisme vraiment balèze. Les musiciens expliquent n'avoir voulu s'imposer aucune limite, ce qui explique aussi pourquoi on passe allègrement de titres énergiques à de l'électro. L'électro, une composante très importante du son du groupe, on se rapproche limite de Daft Punk par moments. On n'est certes pas dans une boîte de nuit pour autant, simplement on sent que les musiciens connaissent leur sujet et ne se contentent pas de balancer une petite boucle pour séduire le mainstream. Mais le panel d'influences ne s'arrête pas là puisqu'il se rapproche aussi de la disco, s'aventure vers des passages beaucoup plus planants, voire même des titres branchouilles et un peu insupportables sur les bords.
Commençons donc par les sujets qui fâchent : "High Venus" s'avère particulièrement sucrée et ne plaira pas à tout le monde. Bon beat, mais cette désagréable impression que c'est quand même un peu trop, un peu trop de strass et de paillettes. Question de goûts sans doute. On sera beaucoup moins indulgent envers cette horreur de "Glitter and Gold" en fin d'album, sur laquelle on croirait entendre des écureuils sous cocaïne en train de se taper le trip de leur vie. Que les auditeurs qui ne sont pas sous cocaïne ne pourront apprécier de la même façon. Et pourtant, ce titre pourrait peut-être devenir la bande-son idéale pour les soirées branchouilles ultra parisiennes bien propres sur elles, allez savoir ? Dans l'air du temps on vous dit. Néanmoins, cette faute de goût (par ailleurs immédiatement contre-balancée par une piste ambiante qui conclut l'album de belle façon) ne saurait remettre en question les autres qualités de ce Lokemo.
A commencer par la chanson titre, terriblement efficace, électro mais avec un vrai mordant rock qui accroche l'auditeur et devrait faire un malheur en ouverture des prochains shows d'Arsenal. Etre dans l'air du temps peut avoir des bons et des mauvais côtés : les mauvais, c'est quand on tombe dans la chanson/parodie comme celle décrite plus haut. Les bons, c'est quand on parvient à synthétiser tout ce qui marche dans un tout cohérent en y ajoutant une personnalité propre. Arsenal se lâche avec classe et balance une ribambelle de titres terriblement accrocheurs parfaitement équilibrés. Il faut entendre ce beat et la montée en puissance typiquement électro de "One day at a time" pour se rendre compte à quel point le duo a su digérer ses influences pour affiner son style et le rendre plus percutant.
Des bons titres qui pleuvent, un album de la durée idéale pour être écouté sans lassitude (40 minutes), ce d'autant plus que plusieurs courtes pistes font office d'intermèdes et de respirations bienvenues pour se replonger dans les beats dansants proposés par le groupe... Ajoutez qu'Arsenal sait aussi sortir des titres planants et épurés ("Fear of heights") et des tubes imparables ("Melvin"), et vous comprendrez qu'on a là un très bon cru, un groupe qui est parvenu à se hisser en première division à force de travail (le groupe existe quand même depuis 1999 et a sorti son premier album en 2003). Devant cette belle réussite, on ne peut que souhaiter que ça continue, tout en espérant que le groupe ne passe pas du côté obscur en se mettant par la suite à ne plus faire que du "Glitter and Gold" ou ne sature ses chansons de Ohohohoh comme l'ont fait beaucoup d'autres (nest-ce pas M83). D'ici là, ce Lokemo est un album très plaisant qui devrait faire de nombreux adeptes et qui ne l'aura pas volé.
7,5/10